En attendant Godot

Paris 18e

du 25 mars au 3 mai 2026 2h15

En attendant Godot

Pour clore en beauté son cycle Beckett, après Fin de Partie, Jacques Osinski retrouve Denis Lavant (Molière du comédien dans un spectacle de théâtre public 2025) rejoint par Jacques Bonnaffé, Aurélien Recoing et Jean-François Lapalus pour En attendant Godot, la plus célèbre pièce de l’auteur.

En attendant Godot - Photographies

  • Mystérieuse attente

Sur scène, un arbre sans feuilles. À ses pieds, un homme : Estragon. Entre un autre homme : Vladimir.

Ils attendent Godot… Ils ne le connaissent pas mais l’attendent comme un sauveur.

Aucun ne sait au juste de quoi ce mystérieux personnage doit les sauver, si ce n’est peut-être, justement, de l’horrible attente.

  • Note d'intention

C’était inévitable. Après Cap au pire, L’Image, La dernière bande, Fin de partieEn attendant Godot, la pièce des débuts (et du triomphe) de Beckett au théâtre, celle dont il disait qu’il l’avait écrite à une époque où « il ne connaissait rien au théâtre », celle qui lui fit, alors qu’il assistait aux répétitions de la mise en scène de Roger Blin, comprendre le concret du théâtre. Cette création coïncidera avec un anniversaire : celui de mes 30 ans de théâtre.

En 1995, je mettais en scène La Faim de Knut Hamsun, mon premier spectacle totalement professionnel, avec (déjà) Denis Lavant. Compagnons indéfectibles, nous nous retrouverons en 2025. Denis sera Estragon. Jacques Bonnaffé sera Vladimir.

Aurélien Recoing Pozzo, Jean-François Lapalus Lucky. Si j’ai longtemps évité En attendant Godot, c’est sans doute parce qu’elle est la plus connue des pièces de Beckett. Nous avons tous en tête l’image de ces deux vagabonds en chapeau melon, attendant devant un arbre malingre. Attendant quoi au juste ? On ne sait plus trop. Attendent-ils même ? On ne saurait le dire.

Godot viendra-t-il ? On ne se pose plus la question. On sait qu’il ne viendra pas et peut-être que c’est dommage. Toutes ces images, ces idées autour de la pièce, comment s’en débarrasser ?

Je voudrais revenir au texte même et non à l’idée que l’on s’en fait. Le texte, ce sera celui de la version de San Quentin, version à laquelle Beckett participa et qu’il valida en 1984 pour une mise en scène de Walter Asmus. Prenant sa source dans la version établie par Beckett pour sa propre mise en scène d’En attendant Godot en 1975 à Berlin, au Schiller Theater, sur laquelle Asmus était son assistant, cette version me semble la plus aboutie, la plus charnellement théâtrale. C’est la version d’un homme qui a expérimenté la pratique du théâtre. Beckett vint participer pendant dix jours aux répétitions et, selon le témoignage des acteurs, « ajouta de la chair aux os » du texte, modifiant certaines didascalies.

De plus en plus, Beckett metteur en scène m’intéresse. J’aime son attention aux déplacements, aux distances entre les corps, cette façon d’essayer de « donner un cadre à la confusion » pour reprendre ses propres termes. Dans cette version, Estragon et Vladimir sont sur scène dès le début, inséparables. Beckett note : « Estragon est sur le sol. Il appartient à la pierre. Vladimir est lumière. Il est orienté vers le ciel. Il appartient à l’arbre. » (The theatrical notebooks of Samuel Beckett, Waiting for Godot, édité par James Knowlson et Dougald McMillan). J’aime cette attention que Beckett porte aux éléments : minéral (pierre), végétal (arbre), animal (homme). Il y a là quelque chose de très concret, très terrien qui m’intéresse.

J’ai envie de partir de cela pour mettre en scène Godot. « Route à la campagne, avec arbre. Soir. » dit la première didascalie de la pièce. Beckett racontait que le tableau de Caspar David Friedrich, Deux hommes contemplant la lune avait été la source d’inspiration de Godot. Et effectivement, tout est dans le tableau : la route, l’arbre, les deux compagnons… Et la lune, cette lune qui se lève à la fin de chacun des deux actes comme un coup de théâtre, signant à chaque fois la fin du jour et le fait que Godot ne viendra pas aujourd’hui mais peut-être demain (et ce « peut-être » – dont Beckett disait qu’il était l’essence de son théâtre – m’intéresse). Pour moi, cela peut être un point de départ.

Regarder le tableau de Friedrich est une autre façon de regarder la pièce, plus charnelle, moins abstraite. Les deux personnages de Caspar David Friedrich sont inextricablement liés l’un à l’autre tout comme le sont Vladimir et Estragon. L’un ne va pas sans l’autre. J’ai envie d’explorer ce lien entre eux. Je crois qu’ils s’aiment, que Beckett a saisi ici précisément l’essence des relations humaines. L’attente aussi m’intéresse, une attente réelle, un espoir réel. Est-ce qu’il ne se passe vraiment rien dans la pièce ?

Je ne pense pas. Énormément de choses arrivent : Estragon a mal aux pieds (comme toujours chez Beckett, le corps est primordial), entre Lucky suivi d’une corde puis de Pozzo, entre la lune… Tous ces microévénements ont leur importance et je songe que tous les personnages de la pièce sont âgés et qu’avec la vieillesse, tout comme dans l’enfance, vient cette attention aux petites choses. Vladimir et Estragon sont-ils vraiment des vagabonds comme on a pris l’habitude de le penser ?

Cela dépend de ce qu’on entend par « vagabond ». Ils ont eu autrefois une vie, peut-être confortable, installée, à Paris.

Il y est fait plusieurs fois allusion. Quelque chose les a jetés là, sur une route, à attendre. En relisant la pièce, ayant à l’esprit le fait qu’elle avait été écrite en 1948, je me suis souvenu que Beckett avait été résistant et dû s’enfuir à Roussillon. Godot pourrait-il être un passeur ? Celui qui a le pouvoir de sauver les hommes en les faisant passer en zone libre ? Beckett se souvient-il de faits réels ? Pierre Temkine a fait à ce sujet des recherches passionnantes. Replaçant la pièce dans un contexte historique, il va même plus loin : pour lui, « le projet initial de Beckett a été d’écrire une pièce sur deux hommes traqués dans la France en guerre, dont l’un au moins serait juif ».

Plusieurs éléments de la pièce accréditent cette idée. C’est en partant de ce concret de l’écriture que j’ai envie de faire entendre le texte. Il ne s’agit évidemment pas d’inscrire à gros sabots la pièce dans une époque mais d’avoir sa date d’écriture à l’esprit. L’épure n’en sera que plus grande. Je songe également au fait que Beckett était irlandais et qu’on a pu rapprocher Godot de La Fontaine aux Saints de Synge, ce qui amène à regarder l’écriture de Beckett comme plus terrienne qu’on ne le pense.

C’est peut-être en retournant aux sources de la pièce que nous pourrons nous abstraire d’une certaine tradition et regarder Godot d’un œil neuf. Dans un monde qui a mal tourné Vladimir et Estragon attendent un monsieur Godot qui pourra les aider. S’ils ne partent pas, c’est qu’ils ne peuvent pas partir. Peut-être très concrètement : parce qu’il y a autour d’eux des forces qui les menacent. Prisonniers d’un présent immuable, ils attendent. Godot viendra peut-être. Ils n’ont d’autre choix que d’y croire. Les spectateurs partis, Vladimir et Estragon, restés sur scène, attendront toujours.

Jacques Osinski

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