Woyzeck d'après Woyzeck

du 6 mars au 2 avril 2010

Woyzeck d'après Woyzeck

Un des plus merveilleux textes de théâtre mis en scène avec une virtuosité éblouissante par Gwenaël Morin. Woyzeck comme si vous y étiez, une expérience de théâtre incroyablement vivante et prenante. A vivre.

Je veux essayer de le rendre à la vie… et je vais le faire avec un couteau

  • Entretien avec Gwenaël Morin

Question : Woyzeck figure parmi la série des classiques du théâtre que vous montez depuis un an dans le cadre de votre projet Théâtre Permanent aux Laboratoires d'Aubervilliers. Vous êtes en ce moment, à la mi-novembre 2009, en cours de répétitions, comment abordez-vous cette pièce ?

Dans notre travail, il est question d'expérience, il faut traverser le texte. Ainsi, les choix dramaturgiques se font "expérience faisant". Mais, et c'est déjà un premier parti pris, je souhaite qu'on traverse tout ce qui est Woyzeck, y compris les paragraphes qui sembleraient avoir été barrés. Nous allons tout prendre de ce qui a été rassemblé par Büchner dans le dossier Woyzeck et nous allons tout jouer dans l'ordre chronologique donné par les éditeurs.

Ce qui est très étonnant quand on joue tous les éléments ; il y a quatre manuscrits donc quand on joue tout, il y a des scènes qui sont reprises, modifiées, il y a des personnages récurrents qui changent de statuts, il y a des personnages dont le rôle est rempli par un autre personnage dans une deuxième partie… on aperçoit la musique de l'ensemble. Ce n'est pas une cohérence rationnelle mais c'est loin d'être un hasard. Nous sommes surpris par la cohérence musicale de la répétition de ces scènes. S'il y a une absence de hiérarchisation classique, une absence de narration cohérente, il y a une force qui n'est pas celle que l'on pourrait trouver en mélangeant par exemple les scènes un texte comme Lorenzaccio. D’ailleurs si l'on s'amuse à re-mélanger les scènes de Woyzeck, cela devient très compliqué. Il y a donc une beauté, sinon une cohérence, dans cet ensemble. Il est intéressant de noter que Schoenberg et son écriture dodécaphonique soient les « presque » contemporains de Büchner, et je ne vois pas pourquoi on accepterait cette remise à plat de la composition musicale et pourquoi on s'efforcerait de retrouver une cohérence narrative à ce que Büchner aurait écrit. Il n'y a donc pas de raison qu'on accorde à Schoenberg ce qu'on refuse à Büchner. Je ne cherche pas à prouver quoique ce soit, mais en tout cas il s'agit dans un premier temps de traverser cette matière.

Question : Que vous inspire le personnage de Woyzeck ?
Je retiens son insignifiance, il est noyé dans la masse. C'est quelqu'un qui n'a aucun intérêt, qui fait que ce les gens font tous les jours. Mais il tue sa femme, alors il enraye le cycle et devient alors un personnage public. Ce qui est étonnant c'est qu'à partir du moment où il commet cet acte démesuré, on se met à regarder sa vie insignifiante avec un œil neuf, rafraîchi. On devient alors attentif à ce qu'est un homme qui en rase un autre, attentif à un homme qui, pour pouvoir vivre, livre son corps à la science, attentif à ce que c’est qu'un soldat…. Il faut faire un acte exceptionnel pour pouvoir s'intéresser à ce qui est insignifiant. À travers Woyzeck, le monde nous apparaît pour la première fois, la tragédie est là. C'est une tragédie de l'insignifiant. Il est insignifiant dans le sens où c’est quelqu'un qui est d'accord, pas impliqué. Il faut bien vivre, et, dans son cas, il faut bien survivre. C'est un pauvre qui est à la limite de basculer en dehors du champs social. Le cas Woyzeck n'est pas un cas isolé, bien sûr il commet un meurtre, mais beaucoup peuvent le comprendre.

Question : La mise en espace dans vos mises en scène joue un rôle actif dans la perception du texte. Dans Les Justes de Camu, présenté au Théâtre de la Bastille, vous aviez inclu les spectateurs à l’intérieur d’un cordon de sécurité de manière à accroître la tension de l’acte terroriste à l’œuvre dans la pièce. Comment imaginez-vous le traitement scénique, scénographique pour Woyzeck ?
Je pense qu’on va faire un dispositif quadri-frontal. Les gens autour, non pas comme dans un cirque, mais comme une espèce de « patate », tous autour de Woyzeck. Je ne souhaite pas de mise à distance de l'image. Ce n’est pas quelque chose qu’on regarde, c’est quelque chose qui fait partie de nous, il est parmi nous. C’est une façon de le faire surgir parmi nous comme dans un bar, dans un foyer, comme dans une salle de bal. Parce que la pauvreté, liée à un manque d'argent, se traduit par la nécessité de se nourrir, de dormir et de baiser, il existe un besoin de tromper ça. L'alcool, la fête, la danse, le chant repoussent le fait de devoir se nourrir, dormir... On ne va pas faire un cabaret mais c'est un peu comme si on avait dégagé de l'espace pour faire la nique à la nécessité animale qui nous traverse.

Propos recueillis par Aude Lavigne, Aubervilliers, mois de novembre 2009

Woyzeck, Georg Büchner / version reconstituée, manuscrits, source. Traduction nouvelle, préface et notes par Jean Louis Besson et Jean Jourdheuil. Paru le 22 juin 2006. Editeur : Ed. Théâtrales

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Spectacle terminé depuis le vendredi 2 avril 2010

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