Deux faces d’une figure vouée, dès sa
naissance, à un destin contradictoire et
exemplaire, grandiose et monstrueux à la fois - un être singulier qui peut
faire songer aussi bien au Christ des
Evangiles qu’à l’illustre Zampano de
La Strada. L’héroïque Héraklès est-il
un rejeton de Zeus, le dieu des dieux qui vint, dit-on, honorer la couche d’Alcmène ? Le ridicule Hercule n’est-il
que le fils, humain trop humain, d’un mari trompé nommé Amphitryon, prêt à propager les rumeurs les plus
grotesques pour essayer de sauver les apparences ?
Le héros des douze travaux, illustre entre tous, est l’un
des très rares mortels à s’être élevé jusqu’à l’Olympe ; et pourtant, il doit une part de sa gloire sublime aux
expériences les plus dégradantes ou les plus douloureuses. Il a connu l’esclavage. Il a purgé de leur fumier
les immondes écuries d’Augias. Frappé de folie, il a massacré ses propres enfants. C’est encore lui, le corps
rongé par le plus atroce des venins, qui s’est fait porter sur un bûcher pour tenter en vain de se réfugier dans
le néant...
Avec Ajax / Philoctète, en 1997, Georges Lavaudant avait abordé une première fois le répertoire
grec dans un diptyque du même ordre. À partir des Trachiniennes et d’Héraklès furieux, deux tragédies de
Sophocle et d’Euripide, sans s’interdire quelques incursions contemporaines, il propose ici le portrait concentré
d’un être invincible et souillé, parcourant la gamme la plus large des expériences humaines, jusqu’au fond énigmatique de la souffrance.
D’après Les Trachiniennes de Sophocle et Héraklès furieux d'Euripide. Textes français de Daniel Loayza.
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