- La grande pièce de Beckett
Après plusieurs monologues beckettiens en compagnie de Denis Lavant, Jacques Osinski fait un nouveau pari, excitant et effrayant : Fin de partie, la grande pièce de Beckett, sa préférée. Tout à coup, il faut voir les choses en grand. Sommes-nous sur terre ? Sommes-nous sur l’arche de Noé après la fin du monde ? Peut-être est-ce déjà le purgatoire…
La pièce raconte un monde qui s’écroule et donne la plus belle définition du théâtre qui soit : « Le souffle qu’on retient et puis… (il expire). Puis parler, vite des mots, comme l’enfant solitaire qui se met en plusieurs, deux, trois, pour être ensemble, et parler ensemble, dans la nuit. »
« Le duo mémorable formé par les deux comédiens fait résonner comme jamais la pièce de Samuel Beckett, présentée dans le OFF. » Fabienne Darge, Le Monde
« Ils nous font arpenter nos gouffres, affronter nos abîmes, avec une grâce maligne mêlée de philosophie. Rarement on nous aura aussi bien fait entendre un texte si magique. Effroyable et amical. » Fabienne Pascaud, Télérama TTTT
« C’est assurément la plus intense mise en scène de Jacques Osinski, mettant face à face deux acteurs géniaux : Denis Lavant (Clov) et Frédéric Leidgens (Hamm). Un sommet de sorcellerie théâtrale ! » Jean-Pierre Thibaudat, Médiapart
« Avec ses comédiens Jacques Osinski propose de s’embarquer vers une destination inconnue et de se laisser porter par cette étrange, quelque part entre terre et mer, pour jubiler ensemble ! » Gérard Rossi, L’Humanité
« Fin de Partie, une si belle fin du monde à Avignon. » Alexis Campion, Le Journal du Dimanche
« On se souvient de Michel Bouquet et Rufus incarnant Fin de Partie il y a 25 ans sur la scène du Théâtre de l’Atelier. Ce spectacle-là s’annonce aussi à l’Atelier. La filiation est faite […] grâce à Lavant et Leidgens, le public a ri tout au long de la pièce. Ils ont fini par être ovationnés ! » Oriane Jeancourt Galignani, Transfuge
Encore Beckett. Tant qu’il reste en lui des choses que je ne comprends pas, qui me sont obscures, étrangères, je crois que je peux le mettre en scène. Après Cap au pire. Après La Dernière Bande. Après L’image et Words and Music, Fin de partie donc : la grande pièce de Beckett, sa préférée, celle qu’on n’ose pas aborder sans un certain bagage.
Se dire je vais monter Fin de partie, c’est un peu comme se dire je vais monter Hamlet : Éxcitant et effrayant. Les métaphores maritimes abondent chez Beckett, l’Irlandais. Et j’ai en abordant Fin de partie, le sentiment d’accoster sur une île après avoir longtemps voyagé, avec mes précédentes mises en scène, sur une mer déconcertante, tantôt calme tantôt en furie.
J’ai fait le voyage à l’envers commençant par l’un des derniers textes Cap au pire pour arriver à Fin de partie, que Beckett écrivit juste avant La Dernière Bande. Après des années d’errance, Beckett est devenu un écrivain reconnu. Molloy a étépublié. En attendant Godot a connu un succès international.
Aborder Fin de partie, c’est me poser la question du théâtre, retrouver le théâtre, après m’être centré sur les mots et la musicalité : Tout à coup, il faut voir les choses en grand. Quatre comédiens sur scène et un décor. Je retrouve l’excitation d’une première fois, la magie enfantine des trois coups et du théâtre de Guignol. Il y a de cela dans le début de Fin de partie : Clov tirant les rideaux et soulevant les draps qui recouvrent Hamm et les poubelles de Nell et Nagg. C’est comme un petit théâtre, une scène qui tous les soirs commence et tous les soirs se termine, indéfiniment.
Jacques Osinski
« Je suis seul ici à la campagne, suis arrivé aujourd’hui et ai fait à pied les cinq kilomètres depuis la gare sous le soleil et dans le froid. Il y a eu des jours à Paris vers la fin de ton séjour où je me suis demandé si je pourrais jamais à nouveau franchir ce morceau de terrain debout dans cette vie. J’ai regardé mes arbres, l’érable negundo, le prunus et les tilleuls sont bel et bien en bourgeon, le châtaignier aussi, et le cèdre ne lâche pas ses aiguilles ; le « gazon » est blanc, la maison chaude et j’ai le Telefunken comme compagnie. Rien à manger dans la maison jusqu’à demain, à part du thé, du vin et du tord-boyaux, donc ça va.
Nouvelles de Godot : Glenville, l’obsédé des stars, s’est retiré remercions le Christ et Albery a acquis – en payant encore 250 livres d’avance sur les droits d’auteur pour lui seul 6 mois de plus d’option pour le R.U et les U.S.A. et parle presque sérieusement de monter la pièce à Londres en avril. Cet accord avait à peine été signé que j’ai reçu une lettre d’un certain Kerz (décorateur) du New Repertory Theatre de N.Y. me demandant l’autorisation de monter la pièce à Broadway avec Buster Keaton, Marlon Brando, Cox et Allen ! C’est désolant d’avoir à dire non. Imagine Keaton en Vladimir et Brando en Estragon ! (…) Ma bataille sans espoir contre mes fous continue, en ce moment j’ai fait sortir A de son fauteuil et je l’ai allongé sur la scène à plat ventre et B essaie en vain de le faire revenir sur son fauteuil. Je sais au moins que j’irai jusqu’à la fin avant d’avoir recours à la corbeille à papier. Je suis mal fichu et démoralisé et si anxieux que mes hurlements jaillissent, résonnant dans la maison et dans la rue, avant que je puisse les arrêter. J’espère que je vais un peu me calmer ici. »
Samuel BECKETT
Lettre à Pamela Mitchell
Ussy-sur-Marne, 17 février 1955 (Lettres II, Gallimard)
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