Le Petit Faust

Paris 9e

du 13 au 20 décembre 2025 2h

Le Petit Faust

Sur l’invitation du Palazzetto Bru Zane et après le succès de Coups de Roulis à l’Athénée en 2023, la metteuse en scène Sol Espeche retrouve le plaisir de la parodie, l’essence du Petit Faust à sa création, où le poids du destin originel ressemble bien plutôt à une prosaïque Roue de la fortune télévisée…

Le Petit Faust - Photographies

  • L'œuvre

Opéra-bouffe en trois actes et quatre tableaux d’Hervé sur un livret d’Hector Crémieux et Adolphe Jaime, créé au théâtre des Folies-Dramatiques (Paris) le 23 avril 1869.

Le 23 avril 1869, aux Folies-Dramatiques, le rideau se lève sur cet opéra-bouffe en trois actes. À peine deux mois auparavant (3 mars), Gounod avait dévoilé à l’Opéra de Paris la nouvelle mouture de son Faust, créé dix ans plus tôt au Théâtre-Lyrique (19 mars 1859). Dans leur livret, Hector Crémieux et Adolphe Jaime fils ont substitué une satire des mœurs à la dimension métaphysique du mythe : leur Marguerite, bien plus délurée que la Gretchen germanique, met l’école sens dessus dessous, séduit le vieux professeur Faust auquel son frère Valentin l’a confiée. Avec son amant rajeuni par Méphisto, elle finit dans un Enfer de fantaisie. Le triomphe remporté par ce Petit Faust, où Valentin est confié à un trial, Faust à un ténor comique, Marguerite à une mezzo-soprano Dugazon et Méphisto à une « chanteuse légère », doit beaucoup à Hervé qui, en fait, cite très parcimonieusement la partition de Gounod. Il en parodie parfois le style et les situations, avec une inventivité qui suscite l’admiration de la critique. Roqueplan, dans Le Constitutionnel, loue la musique « abondante, mélodique, riche d’esprit, de surprises, de couleur, de rythmes fins ou entraînants, d’heureuses trouvailles, même de sentiment ». La bouffonnerie se concentrant essentiellement dans les paroles, la Revue et Gazette musicale de Paris loue le « remarquable progrès dans la manière de ce compositeur, qui s’est affranchi de ses prétentions sérieuses non moins que de ses divagations excentriques ». L’« idylle » Les Quatre Saisons, chantée par Méphisto, est même comparée aux lieder de Schubert ! Mais Hervé, peu enclin à se laisser étouffer par ces compliments, se livre aussitôt à une auto-parodie avec Faust passementier, représenté le 4 juin 1869 à l’Eldorado.

  • Note d'intention

Charles Gounod signe en 1859 une œuvre dont le succès est sans conteste : Faust. Le public reçoit cette œuvre, inspirée par celle de Goethe, avec enthousiasme et sa popularité ne cesse de croître au fil des ans. C’est en 1869, 10 ans plus tard (lorsque l’œuvre de Gounod entre à l’Opéra de Paris), qu’Hervé propose une version parodique de cette dernière, « la consécration des chefs-d'œuvre » comme le cite Pierre Girod depuis la 500e de Faust. Pour reprendre encore les mots de Girod, c’est par cette parodie également que l’œuvre de Gounod a pu atteindre les publics « les plus éloignés de l’opéra ». Ces deux aspects me semblent fondamentaux. Qu’est-ce qui amène les publics à venir découvrir une œuvre, qu’est-ce qui les motive ? Pourquoi la parodie décomplexe ?

Si le succès du Faust de Gounod est sans nul doute celui de la musique, chez Hervé, c’est la transposition d’une œuvre par la dérision qui unit les regards : le public connaît les références de l’œuvre d’origine, il est complice des écarts d’histoire, des libertés prises par Hervé, il écoute, regarde et rit avec le spectacle. C’est une communion qui s’opère grâce à ce bagage culturel partagé. Alors comment rendre justice à cette union entre la scène et la salle ? Comment remettre au centre de la dramaturgie cette participation active du public par sa pensée et son savoir aiguisé ? Je pense que c’est en offrant un écrin pour accueillir une nouvelle lecture de l’œuvre d’Hervé que l’on considère le public d’aujourd’hui et que l’on peut se rapprocher le plus de ce qui en a fait le succès à sa création.

Hervé n’amuse pas uniquement avec la popularité du Faust de Gounod, il emprunte également d’autres déclinaisons du mythe de Goethe pour raconter son histoire et divertir le public. Tel un enquêteur, l’auditoire débusque, cherche et trouve ce qu’il connaît et ce qui est transformé. Penser la mise en scène du Petit Faust de Hervé avec la même énergie joueuse me semble essentiel. Pour cela, en premier lieu, je souhaite mettre en condition les interprètes pour qu’ils déploient un jeu riche, bigarré et fantasque. La qualité de jeu et d’interprétation sera le fil d’Ariane du spectateur. Et c’est cette maîtrise du jeu qui permettra à la musique de prendre tout son sens, d’en développer les couleurs et les nuances, car c’est bien elle qui est au cœur de ce projet. Le clown est magnifique car nous rions longtemps de ses échecs pour s’émerveiller enfin de ses succès. Faust a cela en commun : à force de pitreries et d’embûches dont on rit, on se laisse cueillir par sa poésie, on est touché par son malheur.

Quel pourrait être ce terrain de jeu dont je parle ? Quels référents proches de notre temps peut-on activer pour éveiller auprès du public comme chez les interprètes un plaisir commun à rire de ce que l’on connaît, de ce que l’on devine ? Faust est ici un vieux professeur persuadé que rien ne le détournerait du savoir. Et voilà qu’un volcan, une jeune femme, rompt en un instant ses certitudes et compromet sa droiture en éveillant des sentiments qu’il ne connaissait pas. Mephisto le met face à ses contradictions et l’embarque dans un jeu de piste dans lequel Faust va se perdre. On observe déjà comment la question du jeu est plurielle dans cette œuvre et c’est elle qui va m’offrir la porte d’entrée.

Les jeux télévisés des années 80-90 ont envahi les foyers des Français au souper, le week-end, en vacances. Ces jeux ont pris une place intime dans le quotidien des gens, par leur divertissement mais aussi car ils étaient eux-mêmes représentés par des candidats venus de toutes les régions et de toutes les origines sociales. L’identification à soi-même était très forte et on pouvait se projeter « à la place de » : « qu’est-ce que je répondrais ? Qu’est-ce que j’aurais dit ? Qu’est-ce que j’aurais fait ? J’aurais perdu, j’aurais gagné, j’aurais pris des risques, j’aurais été sage… » Ces divertissements, si légers soient-ils, ont fait preuve d’une force cathartique même quand la récompense était frivole, légère, sans conséquence. Certaines émissions me semblent directement liées à l’œuvre parodique de Hervé : La Roue de la Fortune (le lien est assez évident), Tournez Manège (le jeu de l’amour et du hasard comme dirait l’autre)...

Retrouver le plaisir de la parodie, l’essence du rire qui fut la signature du Petit Faust à sa création, voilà le défi de cette nouvelle mise en scène que je propose. Inventeur de l’opérette, Hervé a créé une œuvre fédératrice où chaque spectateur trouve sa place, le néophyte comme le connaisseur. C’est cela même qu’il faut faire renaître. Nous allons observer ce Faust, candidat, malgré lui, du grand jeu de la vie : il va tenter sa chance, parier, gagner, perdre... Et le public, observateur omniprésent et omnipotent, scellera son destin. Ce pouvoir redonné à l’auditoire va le pousser à se questionner sur sa place. Les épreuves, que Faust traversera à travers ces jeux « amusants », deviendront l’espace de la mise à nu d’un homme dont on dissèque les actions et les sentiments. Est-ce plus galvanisant de voir un homme chuter ou réussir ? Notre propre image s’y reflètera, et nous serons sans doute bien heureux de ne pas occuper sa place. À moins que le jeu de la cruauté nous fasse envie ?

La symbolique de ce qui tourne (la chance, l’amour, le destin) est très présente dans le mythe de Faust. On pense à Dante et à ses neuf cercles concentriques, passage obligé vers les Enfers. C’est pourquoi, comme une fractale, ce motif se déclinera de différentes manières dans la mise en scène à commencer par la scénographie. Avec Oria Puppo, scénographe, nous aurons imaginé une arène, un plateau de télévision où le public peut être omniprésent. Il s’agit d’un système qui permet de faire apparaître les épreuves que Faust va traverser ; on joue avec ce champ lexical du cercle, du rond, de la roue, on raconte ces émissions, et progressivement apparaît un univers plus déstructuré, disloqué qui montre la complexité de l’œuvre et ses différentes facettes.

Avec Sabine Schlemmer, costumière, et Maurine Baldassari, perruquière et maquilleuse, nous poursuivons, après Coups de Roulis de Messager, notre travail de recherche autour d’une époque contemporaine qui ne soit pas tout à fait la nôtre. Pourquoi chercher ce déplacement ? D’abord parce que si l’on veut raconter la naissance des plateaux télévisés des années 90, l’esthétique doit aider cette lecture. Ensuite, parce qu’il est plus difficile de raconter notre époque que le passé : nous manquons de distance avec elle, et contextualiser une fiction du XIXe siècle en 2025 contraint le spectateur à juger son présent, à porter un regard critique. L’esthétique devient subitement politique, et risque de nous éloigner de l’œuvre du Petit Faust, qui elle, reste intemporelle. J’aime travailler cette époque qui autorise la dérision, déploie la créativité et plonge le public dans un univers singulier. C’est aussi une époque charnière, le tournant des jeux télévisés qui ne se contentent plus de divertir par la légèreté mais qui amène les spectateurs à s’amuser du plus intime.

Sol Espeche

Le Petit Faust – Bande-annonce

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