Félicie, la provinciale

du 11 au 12 avril 2001

Félicie, la provinciale

CLASSIQUE Terminé

Lieu : grande salle MCNN
Le retour à Nevers de Roger Planchon et du Théâtre National Populaire de Villeurbanne après son triomphal « Avare » en 1999. La création ayant lieu en février 2001, nous ne pouvons vous en dire plus, sinon l’assurance d’avoir un très grand spectacle d

Lieu : grande salle MCNN
Le retour à Nevers de Roger Planchon et du Théâtre National Populaire de Villeurbanne après son triomphal « Avare » en 1999. La création ayant lieu en février 2001, nous ne pouvons vous en dire plus, sinon l’assurance d’avoir un très grand spectacle d’un de nos plus grands metteurs en scène français. »

Présentation
Roger Planchon, un metteur en scène, un chef de troupe, un comédien

Présentation

Deux pièces étonnantes composent notre spectacle. La provinciale est une comédie. Félicie est un conte de fées éducatif, une féerie morale. La provinciale est, elle aussi, une pièce d’éducation, mais l’éducation dont il s’agit ici est morale en profondeur. Pour être plus efficace, la pièce est libertine. C’est le pendant théâtral des Liaisons dangereuses que Laclos écrira vingt ans plus tard. La provinciale présente une leçon de libertinage, un libertinage hardi. «Hard», dirait-on aujourd’hui.

Une jeune veuve provinciale, une héroïne dont l’intelligence pétille, va vivre une étrange histoire d’amour avec le Chevalier de la Trigaudière, un roué qui connaît les usages. «Son libertinage le rend illustre, en fait un héros qu’on est curieux de voir. On se le montre en spectacle. Où est-il ? se dit-on. Le voilà ! C’est lui le fameux violeur de l’ordre !»

Une femme d’intrigues, une somptueuse libertine, l’admirable Madame Lépine, dont on dit : «Quelle succession de mouvements libertins n’a-t-il pas fallu pour aguerrir son âme, pour la familiariser avec l’idée du crime !», mettra le piment qu’il faut dans cette idylle.

La manipulation des sentiments de la jeune veuve par la belle Madame Lépine et ses subtils complices sera exemplaire et impitoyable. Pauvre Félicie !

Tel est le Monde Vrai, dit Marivaux, où «il y a deux sortes d’ambitions. Celle d’amasser du bien, celle d’amasser des honneurs». Entendez, du pouvoir, pas des médailles. «Il y a des gens qui n’ont que la première, d’autres que la seconde, d’autres qui ont les deux. Les premiers n’ont point d’âme, les seconds sont des superbes qui en ont trop. Les premiers sont toujours en danger d’être fripons et le sont souvent, les seconds, quoique généreux, sont toujours en danger d’être méchants et le sont quand il faut. Les troisièmes ne méritent pas qu’on les remarque. Ils n’ont pas assez de force pour être méchants ni assez d’avarice pour être fripons.»

Tel était le jugement de Marivaux sur la société du XVIIIe siècle. Hausserait-il le ton pour condamner la nôtre ? Que dirait-il de nos nouveaux roués, avides de pouvoir et de biens, branchés sur les nouvelles technologies ? Que dirait-il de nos «affaires» ? De nos nouveaux chevaliers d’industrie, de nos nouvelles putains de la République ?

Les historiens qui travaillent sur le XVIIIe siècle sont frappés par les points de convergence avec notre époque. Lorsque les interdits moraux tombent, comment une jeune femme vit-elle l’absence de barrières ? Lorsque règne la liberté des mœurs, qu’est-ce que la pudeur ? Comment une jeune femme lit-elle et ressent-elle les articles des journaux féminins ? Une semaine, ils argumentent pour la réserve et la prudence ; la semaine suivante, pour la liberté sans contrainte. Ces journaux-là se foutent des contradictions de leurs discours : ils vendent du papier. Qui parcourt le courrier des lectrices de ces journaux est convaincu de l’actualité profonde des deux récits théâtraux de Marivaux. Chaque semaine, comme l’héroïne de Marivaux, des «Félicie» y exposent leurs «tourments», leurs désarrois, leurs «épopées sensuelles» aux retournements et aux chutes imprévisibles. A quelle morale s’accrocher dans le no man’s land moral ? Aujourd’hui, en Europe, en Amérique du Nord, combien de millions de jeunes Félicie sautillent d’un pied sur l’autre ? Est-ce par désinvolture, sentimentalité ou snobisme qu’une Félicie plantureuse s’agenouille, dans un bureau ovale ? Et la suite est burlesque. Cette bêtise insignifiante devient le centre d’intérêt de la société «mondaine» mondiale. La «mondanité» à l’échelle de la planète, n’est-ce pas admirable ? Comment Marivaux, attentif observateur des mœurs de son temps, aurait-il commenté et transposé ce «scandale» dans ses Journaux ?

Dans les scènes «conte de fées» de cette version scénique, Madame de La Thibaudière retrouve son prénom, Félicie, et fait remonter à la surface son âme d’adolescente. Dans ces moments-là, cette héroïne devient une copie conforme de la «femme d’aujourd’hui» que souhaitent voir naître journalistes et présentatrices de 40-50 ans, dans les journaux féminins ou sur les petits écrans T.V. Elles affirment : «La régression est indispensable à celle qui n’est plus une jeune fille, pour mettre un peu de fantaisie dans sa vie. Âge mental souhaitable pour une femme de 40 ans : 12-13 ans.» Ce sont d’ardentes militantes d’un retour à l’esprit «gamin», d’un comportement «à l’étourdi». Marivaux devrait être ravi que ces clones de Félicie autour de nous prolifèrent, lui qui, dans ses pièces, a si souvent et si malicieusement décrit ce mécanisme.

Dans des registres très différents, les deux œuvres se répondent : l’une et l’autre présentent la même leçon d’éducation sensuelle, sentimentale et morale. Une jeune personne va à la découverte du monde, pour être plus précis, de la société. Les deux histoires témoignent, en profondeur, de la même exigence morale. Les deux réunies forment un «roman d’apprentissage» exemplaire.

Félicie, «une féerie mise en dialogues». La provinciale, une comédie réaliste. C’est la dernière œuvre que Marivaux publia. Trois ans avant, malade, il avait rédigé son testament. Quelque temps après la publication de La provinciale, le 12 février 1763, Monsieur Pierre Carlet de Chamblain, dit Marivaux, meurt à Paris, rue Richelieu.

Aujourd’hui, nous tenons Marivaux pour l’auteur qui a pris sur ses épaules l’écriture théâtrale de son temps. Inventeur scénique, il est le seul qui comprit de l’intérieur Bérénice de Racine. Voltaire, qui méprisait Marivaux, n’a fait que parodier Corneille ou Racine. Voltaire connut le succès. Tenu en piètre estime, attaqué par les critiques de son temps, Marivaux n’osait même plus présenter ses pièces aux comédiens susceptibles de les jouer. Il réussit à faire publier La provinciale mais, pour éviter les coups de trique, sans nom d’auteur.

Félicie fut lue et refusée par la Comédie-Française. Le manuscrit resta égaré longtemps. A notre connaissance, Félicie n’a jamais été jouée. La provinciale n’a connu qu’une mise en scène, mais aucune représentation à Paris. Ces deux œuvres ont été oubliées, ignorées, et pourtant leur intérêt est grand.

Dans l’adaptation scénique que nous proposons, nous avons groupé les deux récits. Ainsi, le poids du réel approfondit la féerie et la féerie donne une intériorité à l’aventure réaliste et comique de la jeune veuve qui découvre la sensualité sans contrainte.

Cette adaptation est née pour un projet double : une fiction cinématographique ou télévisuelle et un spectacle théâtral. Il s’agit donc de l’écriture d’un scénario et d’un montage de scènes. Au texte des deux œuvres sont jointes quelques phrases tirées des Journaux de Marivaux. C’est un scénario dialogué par cet auteur, cela va sans dire. A partir de ces quelques textes et des deux œuvres de Marivaux, nous présentons une fiction pour écran, grand ou petit, et pour la scène.

Roger Planchon

Roger Planchon, un metteur en scène, un chef de troupe, un comédien

Depuis les débuts de sa Compagnie, en 1950, Roger Planchon met en scène et joue. Sa vie se passe sur le plateau. Avec ses acteurs, il partage les dangers et les plaisirs des représentations et des tournées théâtrales. Il passe des jeux burlesques de Bottines et collets montés aux aventures de d’Artagnan et aux enfances du Roi Henry. Quand il devient dramaturge, il joue les rôles qu’il écrit : le vieil Émile Chausson dans La remise, le curé Guy Duverger dans L’infâme, le capitaine Simon des Jallades dans Le Vieil Hiver, le banquier Bertaux dans Le Radeau de la Méduse, le Solitaire dans Le cochon noir...

En 1972, dans Le massacre à Paris de Christopher Marlowe, il interprète le duc de Guise sous la direction de Patrice Chéreau, qui inaugure la scène rénovée du TNP-Villeurbanne. Depuis, il a tenu une douzaine de rôles en vingt-cinq ans, notamment dans ses mises en scène de Molière - Tartuffe et George Dandin, - de Shakespeare - Antoine - et de Marivaux - le philosophe du Triomphe de l’amour. Il était Harpagon dans L’avare, en ouverture du Festival Theater der Welt Berlin 99.

M. B.

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Maison de la Culture de la Nièvre

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Spectacle terminé depuis le jeudi 12 avril 2001

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