Pascal Rambert nous raconte une histoire éternelle d'une grande humanité : deux êtres se sont aimés et se quittent. Le jeu des comédiens, Audrey Bonnet et Stanislas Nordey, époustouflants dans ces deux monologues à vif, est d'une intensité profonde.
Un couple clôture son amour en deux monologues qui vont au bout de leur pensée, deux longues phrases qui ne sauraient s’interrompre, manière de solder les vieux comptes et marquer dans une langue poussée à bloc le territoire des corps.
Sont-ils musiciens ? Danseurs peut-être ? On sait seulement qu’ils sont artistes. Stan et Audrey. Audrey et Stan. Pascal Rambert a donné à ses personnages les vrais prénoms des deux comédiens pour qui il a écrit ce texte cousu main. Pour créer le trouble, supprimer les filtres, les mettre à nu. Leur amour est fini, il faut conclure.
À tour de rôle, ils disent leur vérité, sans majuscule, sans ponctuation. La salle de répétition qui accueille leur huis clos devient chambre des tortures où les armes destructrices sont les mots. Telle une danse mentale, les mouvements invisibles de l’âme se débattent à l’intérieur des corps. Écrasée par le poids des paroles de Stan, Audrey doit rester droite, ne pas fléchir.
Mais chacun porte sa propre violence : celle, offensive et guerrière, de l’homme dont le cœur est devenu froid ; celle, calme et insidieuse, de la femme dont le pouvoir de destruction est ailleurs.
Joué plus de deux cents fois depuis sa création en 2011, Clôture de l’amour est un spectacle d’une intensité rare, où les mots transpercent les cœurs et cognent les tripes, disséquant sans ménagement le sentiment amoureux.
Musique d'Alain Bashung.
« Les deux comédiens donnent une intensité saignante à la séparation. Sans pathos, juste secoués d'une énergie, d'une dureté terribles : faire souffrir l'autre pour moins souffrir soi… Audrey Bonnet et Stanislas Nordey sont tout simplement magnifiques, bouleversant le public alors que leur jeu semble à l'opposé même de l'émotion, paradoxaux, surprenants, immenses comédiens dans l'âme, le corps, et le sang. » Télérama, Fabienne Pascaud, 18 juillet 2011
« Le directeur du T2G retrouve la formidable ironie d'une écriture puissante et belle. Il dirige deux interprètes sublimes dans un face à face éprouvant et singulier Clôture de l'amour. (...) Deux interprètes immenses face à face dans une partition qui reprend un thème connu (la rupture) mais dont Pascal Rambert a fait un texte très original et puissant auquel deux heures durant on est suspendu (parfois l'on rit) comme à l'écoute d'une oeuvre musicale envoûtante. » Blog du Figaro, Armelle Héliot, 18 juillet 2011
« (...) la pièce de Pascal Rambert, jouée par Audrey Bonnet et Stanislas Nordey, a fait se lever le public, le jour de sa création à Avignon, dimanche 17 juillet. Il y avait de quoi : deux heures durant, un combat s'était livré, imparable, sans merci, saisissant. » Le Monde
« Qu'ils sont beaux et douloureux les amants brisés. Depuis dimanche soir, Avignon s'est inventé un couple de légende : Stan et Audrey. (...) La Clôture de l'amour est un spectacle miraculeux. (...) Stanislas Nordey donne à son personnage la rage d'un guerrier antique, mâtinée de l'ironie d'un jeune homme d'aujourd'hui. C'est très fort. Audrey Bonnet est bouleversante de sincérité et d'orgueil blessé - la façon dont elle reprend le dessus après « l'assaut » mortel de son futur ex-compagnon est impressionnante. » Les Echos
« Stanislas Nordey, avec sa singulière dynamique de jeu, et Audrey Bonnet, à la force époustouflante, sont, comme leur partition, inoubliables. » Le JDD, Annie Chénieux, 02 octobre 2011
« Ce théâtre de la langue et du corps, cette performance viscérale de Stanislas Nordey et Audrey Bonney, cette Clôture de l'amour de Pascal Rambert comme la crise universelle du désir amoureux, c'est un bloc de matière meurtrie dont la densité irradie et pèse lourd sur nos poitrines. » Sophie Lespiaux, Une chambre à soi, 30 avril 2013
J’écris Clôture de l’amour pour Stanislas Nordey et Audrey Bonnet. C’est Stanislas Nordey qui m’en a parlé en premier. Qui m’a dit : « J’aimerais
un jour jouer dans tes pièces ». J’ai dit OK. J’ai dit j’ai une idée de séparation dure. Une séparation dure entre quelqu’un de ton âge et une jeune femme aussi de ton âge.
J’ai dit je voudrais que ce soit Audrey Bonnet. Il a dit « J’aime beaucoup Audrey Bonnet ». Alors j’ai dit demandons à Audrey. Audrey a dit « oui ». J’écris pour Stanislas Nordey. J’écris pour sa manière de projeter les mots. Cette manière articulée de dire la langue Française. Cette manière unique de faire du langage une respiration entière du corps. Le corps respire chez Stanislas Nordey.
Chaque mot devient – de la première lettre à la dernière – un monde abouti et plein. Ce sont des couteaux. Des lames brillantes préparées. Enclenchées. Armées. Soigneusement rangées. Prêtes à être sorties en ordre. Des mots dans l’ordre : dans leur aspect premier, secondaire, tertiaire. En toute objectivité frontale et froide. Là, devant la bouche. Portés par la puissance nerveuse et sèche du corps. Le corps est sec. Précis. Méchant. La bouche est mobile, insatisfaite, aigre. Les yeux accompagnent une sorte de panique qu’on ne voit pas s’interrompre. Un étonnement. La main, puis les mains, prolongent l’idée. Les sortent du corps à la manière de phylactères rétifs, froids ou soudain incendiés. Le corps est le support. Il porte en son entier la diction. Il est diction à vrai dire. Rien n’est jamais satisfaisant dans l’élocution. Rien. On le voit bien : les mains, la bouche, les yeux, les jambes – ce ballet dur – cherchent, avancent, repartent, rentrent, sortent, re rentrent, re sortent (ne glissent jamais : jamais) vont devant, vont loin (sur le plateau là-bas), au sol – surtout au sol – en haut (majoritairement en haut mais plus à l’horizontal net du sol ) tancent, exaspèrent, recommencent (ne battent pas en retraite : jamais) recommencent encore : ça y est le sens est là. Le sens est là.
Devant. Devant nous. On a suivi le sens depuis l’intérieur du corps de Stanislas Nordey (il était dans la bouche, il était sur les mains, on l’avait vu dans les jambes, la poitrine) maintenant le sens est là depuis l’intérieur du corps jusque-là devant nous. Matériel. Pas rigolo. Brut.
Comme ça tiens le sens il n’y a pas de problème il est là réel pas rigolo il est là tiens prends le sens. Cela est une masse. Du début à la fin. A fragmentation en plus. Pour causer de justes dommages à la tête. J’écris pour ça. Pour ça chez Stanislas.
J’écris pour Audrey. J’écris pour le corps d’Audrey. Pour cette courbe fine du haut en bas qui écoute. Audrey écoute. J’écris pour cette écoute puis pour ce corps courbe et fin qui s’est tu et puis parle. Alors quand ça parle ça parle droit dur et en tessiture medium-grave. Parfois ça grimpe des sortes de courbes inattendues dans le registre haut et puis ça oblique en piqué vers le bas hyper rapide.
Et puis ça s’arrête. Et ça écoute à nouveau. Et c’est le silence. Le corps qui attend. Il respire. Il respire depuis le début ça c’est sûr. Mais il attend. Il sait comme personne le corps d’Audrey Bonnet le créer le silence. Dire eh alors ? D’avoir l’air soudain super actif dans l’immobilité totale. Presque débile. Façon idiot du village. Je suis là. J’emplis (par mon silence) ton espace. J’attends.
Et je reprends. Les mots sont ronds. Plats. Les mots sont plats et épineux. Des fois totalement abandonnés devant elle parce que le doute est dans le sens. Le doute prend le sens. Le sens est remis en doute devant la bouche comme des poissons morts dont on regarde la fraîcheur dans l’oeil.
Tu es vivant sens ? C’est quoi ton verso ? Il est où ton recto ? Hello ???
Ça commence où il paraît ? Ca va à quel endroit ? Il y a ça dans le jeu d’Audrey Bonnet : une incrédulité. Un effarement. Une écoute qui écoute le brut, le direct, le matériel, le pas rigolo et qui dit : ah bon ? Ah bon ? Et ça recommence à la manière du combattant immobile Audrey Bonnet ça recommence ça rattrape les mots directs, bruts, matériels, métalliques, pas rigolos d’avant et ça les saisit et ça les regarde comme des poissons morts pour voir si la vie est encore dedans si l’amour (Clôture de l’amour) est bien mort.
Pascal Rambert
2 comédiens investissent un plateau nu : intensité et cruauté, est-ce le théâtre de leur vie qui se joue ou la répétition d’un prochain spectacle ? À méditer
Que dire ? Ce spectacle laisse sans voix. Un texte coup de poing. Une comédienne qui remplit l'air de toutes ses cellules et ses ondes, même quand elle ne parle ni ne bouge. Pascal Rambert, en comédien, touchant, humain, portant son propre texte dans ses tripes. Il faut accepter de se laisser atteindre par une pièce comme celle-là, mais quel bonheur quand elle s'installe en nous et nous hante encore après le spectacle !
Pour 2 Notes
2 comédiens investissent un plateau nu : intensité et cruauté, est-ce le théâtre de leur vie qui se joue ou la répétition d’un prochain spectacle ? À méditer
Que dire ? Ce spectacle laisse sans voix. Un texte coup de poing. Une comédienne qui remplit l'air de toutes ses cellules et ses ondes, même quand elle ne parle ni ne bouge. Pascal Rambert, en comédien, touchant, humain, portant son propre texte dans ses tripes. Il faut accepter de se laisser atteindre par une pièce comme celle-là, mais quel bonheur quand elle s'installe en nous et nous hante encore après le spectacle !
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