Le chorégraphe Albert Quesada aime s'emparer de figures musicales : après sa pièce Solos Bach & Gould et Ensemble, fondée sur le travail de Leonard Bernstein, il présente aujourd'hui Wagner & Ligeti. De prime abord, le rapprochement des deux compositeurs n'est pas évident, et pourtant. En travaillant à partir de l'ouverture de Tannhäuser de Wagner (1842-1845), l'une des pièces les plus claires de la musique instrumentale « narrative », et de Lontano de György Ligeti (1967) œuvre orchestrale reposant sur une polyphonie fondée presque en permanence sur un canon imperceptible, ainsi que sur des extraits de répétitions de Ligeti transformés en matière sonore, Albert Quesada s'emploie à montrer leurs résonances, leurs convergences.
Il tisse ainsi des fils entre les deux partitions, éclairés par la danse qui joue tour à tour de l'unisson, du canon, de l'éparpillement et de la tension. Les interprètes forment comme des agrégats qui se décomposent et se recomposent, tels des notes sur une gamme, tentant de maintenir des points d'équilibre, à la fois ensemble et séparés.
Ligeti disait, parlant de Lontano : « Je pense toujours en voix, en couches, et je construis mes espaces sonores comme des textures, comme les fils d’une toile d’araignée, la toile étant la totalité et le fil l’élément de base. » Albert Quesada lui répond par la danse, offrant au spectateur la possibilité de voir se construire une structure musicale et explorant la façon dont l'esprit recompose une toile à partir de sensations et de réminiscences. Avec Wagner & Ligeti, il réussit ainsi, littéralement, à donner à voir la musique.
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