Les placebos de l’histoire

du 6 janvier au 4 février 2006
1H45

Les placebos de l’histoire

Des personnages à bout, au bout de tout, revenus de tout. Ils sont rassemblés dans un lieu pour tester un nouvel antidépresseur miracle. Avec eux, une directrice du marketing d'un grand laboratoire pharmaceutique et un psychiatre, préoccupés avant tout par l'idée que l'expérience soit probante. Leur regard « scientifique » est un peu troublé par cette perspective de rentabilité.

"J'espère ne jamais savoir sur quel pied danser"
A la recherche de l'antidépresseur miracle

Note de mise en scène
Extrait
Note d'intention
Note scénographique

  • "J’espère ne jamais savoir sur quel pied danser"

J’évite toujours de penser à ce que serait, devrait être, pourrait être ce que j’écris. Qu’elle se débrouille l’écriture avec elle-même, avec sa logique et ses rythmes pour savoir où elle en est, où elle s’en va.

J’aime ce qui ne tient pas tout debout, ce qui chavire et tente de rester debout. Ou bien le moment où ça tombe et ça s’effondre bien comme il faut.

J’aime les tentatives, l’équivoque, le trouble. Et aussi tenter de dire frontalement, voire maladroitement, ce qui me pèse. Parfois cela se mêle.

Parfois pas.

J’aime les visages dans la rue, les mouvements des corps, les inflexions des voix. J’espère ne jamais savoir sur quel pied danser.

Eugène Durif

Des personnages à bout, au bout de tout, revenus de tout. Ils sont rassemblés dans un lieu pour tester un nouvel antidépresseur miracle. Avec eux, une directrice du marketing d'un grand laboratoire pharmaceutique et un psychiatre, préoccupés avant tout par l'idée que l'expérience soit probante. Leur regard « scientifique" est un peu troublé par cette perspective de rentabilité.

À partir d’une pièce écrite il y a huit ans, Via Négativa, je fais une nouvelle tentative : « resserrer" l’intrigue, la situation, les relations entre les personnages et ce faisant écrire une « autre pièce"…, qu’il y ait un côté proche du cabaret avec de petites histoires, des chansons… Que cela puisse être férocement drôle et infiniment triste… Sans dérision, en tout cas… Leur laisser une chance à ces personnages, même s’ils peuvent paraître ridicules…

Eugène Durif

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"Mon travail s'appliquera à trouver sur scène l’humour du désespoir, à débusquer notre besoin de rire et de distance dans la douleur grâce à la fantaisie et la légèreté du jeu. Le spectacle accordera une place importante à la musique. En associant les thèmes les plus douloureux aux situations les plus loufoques, Eugène Durif leur confère une acuité et une mobilité captivante pour la scène."

Lucie Berelowitsch

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Antinéa : Il faut, en tout cas, que quelque chose se produise. Nos deux mains ne peuvent pas rester éternellement comme ça posées l'une sur l'autre sans qu'elles se touchent, se touchent vraiment, et nous à côté, à côté de nos mains, comme si nous n'avions rien à y voir. Nous devrions, par exemple, être incapables de parler, de dire quoi que ce soit, et nos regards l'un dans l'autre, nos regards là, et les visages l'un à l'autre tout près, tout près de… Au lieu de quoi, ces saletés de mains, comme des morceaux de bois, elles sont froides vos mains, elles sont glacées…
Pierre : Les vôtres ne sont pas très chaudes non plus.
Antinéa : J'ai des fourmis.

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  • Note d’intention

"Rien ne va, plus rien ne va, Pour vivre comme un homme droit" Vladimir Vissotsky

Il y a des lieux où se brisent les codes et les lois de la société.

Là se créent de nouveaux modes, de nouveaux rapports dus à l’immobilisation, à la promiscuité.

Les masques sociaux tombent, des liens se créent, d’amour ou de haine, qui se cristallisent au fil des jours.

Dans cet endroit, les patients se déplacent d’un lieu à un autre, parc, chambre, salon, fumoir, séance de psychothérapie, sans possibilité de trêve.
Ils sont en permanence sous le regard des autres, et surtout soumis au regard scientifique des médecins, qui les regardent s’agiter, prennent des notes, commentent, inhumanité de l’industrie pharmaceutique face à des personnes en détresse.

Les corps lors des errances dans le parc se cherchent, se frôlent, se croisent, divaguent, les mots s’échangent, parfois se déversent, et parfois manquent. Des histoires pour dire l’angoisse, la solitude, la difficulté à communiquer, à « fonctionner socialement ». Les personnages sont toujours un peu à côté d’eux-mêmes, dans un temps en suspens, un « présent sans temps », comme le formule Maldiney en parlant de la schizophrénie. Ils crient, ils fument, ils courent, se séduisent, et chantent aussi parfois.

L’enfermement, les effets secondaires des anti-dépresseurs, les séances de psychothérapie de groupe, vont petit à petit agir sur eux. Le rythme s’accélère, les passions s’exacerbent, les névroses s’accentuent, tous rentrent dans une danse infernale.

En résonance, l’étrange multiplication des pies, métaphore de l’échec de cette expérience : comme si tout petit à petit se fissurait et éclatait.
Mon travail s'appliquera à trouver sur scène l’humour du désespoir, à débusquer notre besoin de rire et de distance dans la douleur grâce à la fantaisie et la légèreté du jeu.

Interrogeant avec férocité et humour notre temps, Eugène Durif associe les thèmes les plus douloureux aux situations les plus loufoques et proches de la comédie et leur confère ainsi une acuité et une mobilité captivante pour la scène.

Lucie Berelowitsch

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  • Note scénographique

A décortiquer ce texte, quelques concepts me semblent importants à représenter. La surveillance, la promiscuité, la transparence.

J 'ai tout de suite pensé que, dans notre contexte de travail, il fallait en demander un maximum à notre plateau et voir ce qu'il pouvait nous offrir.

Il se trouve qu'il propose, en plus de sa cage de scène noire,une architecture de fond de scène qui peut nous fournir une bonne représentation d'un poste de surveillance et comme cette architecture se prolonge de chaque coté dans la salle nous tenterons aussi d'impliquer le public en lui donnant le sentiment d'être aussi à vue. C’est un petit subterfuge qui peut l'aider à réaliser à quel point il ressemble à ces acteurs. Voilà pour la surveillance.

La promiscuité et la transparence se joueront donc sur la scène.

Le noir, habituel à tous les théâtres est le bien venu dans la mesure ou il est tout et nulle part et me permettrait de rendre encore plus fort des concentrés de réalité que je situerais sur des chaises. Des chaises qui seraient presque costumées pour nous rejoindre sur le plateau, chaise lit, chaise jardin, chaise étagère, etc, ces chaises deviendraient une matière qui serviraient à dénommer des espaces. J'aimerais un assemblage biscornu aussi comique que l'assemblage des personnages de Durif.

Nous avons quand même besoin d'un peu plus et même si nous pensons à Dogville nous cherchons à construire en pourtour quelques petits lieux qui seraient comme les domiciles de chacun des personnages de la même manière que les cases d'un jeu de l'oie sont les maisons des pions.

Une fois tout cela placé, il nous faudra en jouer pour faire évoluer cette scénographie dans la ligne dramaturgique de l’auteur.

Goury

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Spectacle terminé depuis le samedi 4 février 2006

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