Les bonnes

Paris 18e
du 30 mars au 16 avril 2011
1h30

Les bonnes

D'un fait divers atroce, Genet écrit une sorte de mythe. Tragédie de l'intime et du désir, Les bonnes nous plonge dans le pays de l'imaginaire amoral. C'est une intense cérémonie de l'amour et de la haine à laquelle Guillaume Clayssen donne rites et totems et, avec ses trois comédiennes, il nous livre une inquiétante étrangeté.
  • Tragédie de l'intime, du désir et de l'ambivalence

Deux sœurs, Claire et Solange, servent Madame comme femmes de chambre depuis des années. Profitant des sorties nocturnes de Madame, les deux sœurs s’adonnent au rituel d’un jeu de rôle sadique dans lequel, l’une d’elle, joue Madame en revêtant ses habits et ses accessoires et où se révèle la haine latente et refoulée existant entre Servante et Maîtresse. La finalité du jeu est de parvenir à la seule issue logique : le meurtre de Madame par la Bonne.

D’un fait divers atroce, Genet écrit une sorte de mythe. Ce huis clos théâtral nous plonge dans le pays de l’inquiétante étrangeté, de l’imaginaire amoral, le pays obscur et oublié de chacun. Tragédie de l’intime, du désir et de l’ambivalence, Les Bonnes est une cérémonie de la haine et de l’amour.

  • Note d'intention

Les Bonnes ou la tragédie de l'apparence

Les Bonnes est la pièce la plus jouée du théâtre de Jean Genet. C’est une œuvre pourtant minimaliste. Comme dans une tragédie classique, tout y est unité : le temps, l’espace, l’action. Trois personnages seulement interviennent dans ce thriller théâtral. Pourquoi alors tant de mises en scène pour une œuvre, en apparence, si simple ? L’unité de cette pièce est un trompe-l’œil magnifique. Chaque réplique, chaque moment de jeu, peuvent être lus de mille manières différentes. A la surface de l’œuvre, tout semble classique, clair, mais dès que le regard et l’imaginaire du lecteur ou du spectateur la creusent, naissent toutes sortes d’interprétations possibles. L’intensité de la fable, la densité de l’écriture de Genet, le mystère de ses personnages, rendent la lecture et la mise en scène des Bonnes inépuisables.

Mais vers où aimerais-je aller dans ce texte profondément baroque et apparemment classique ?

L'intime et le monstrueux

L’œuvre de Jean Genet a pour lieu de naissance l’univers carcéral. C’est dans ce tout petit espace coupé du monde qu’est la prison et qu’il connut à plusieurs reprises dans sa jeunesse, que Genet découvrit l’immensité de l’imaginaire et du rêve. Enfermé entre quatre murs, c’est là qu’il se mit à écrire et rencontra la force subversive de la poésie.

Ce rapport étrangement harmonieux entre un espace physique très confiné et un espace mental sans limites, constitue le fil conducteur de ma future mise en scène des Bonnes. Claire et Solange dans la pièce craignent en permanence que leur cérémonie secrète ne soit vue du voisinage. Elles s’enferment dans la chambre de Madame pour y jouer et y imaginer le meurtre de celle-ci. Les deux bonnes inventent, à l’intérieur d’un espace clos, un monde infini où leurs fantasmes prennent corps.

Cette intimité monstrueuse que nous donne à voir Genet, cette solitude à deux qui met en scène toutes sortes de pulsions socialement condamnables, constitue en soi un enjeu théâtral fort mais ô combien délicat à représenter. Car contrairement à l’image un peu stéréotypée d’un théâtre de Genet où la théâtralité part dans tous les sens, il me semble que le jeu et l’imaginaire ont chez cet auteur, et particulièrement dans Les Bonnes, une fonction extrêmement rigoureuse et complexe dont le but n’est pas de nous éloigner de nous-mêmes mais de nous rapprocher de ce qu’il y a en nous de plus intime. Genet fabrique un univers baroque et barré pour raconter la vie dans ses secrets les plus inavouables.

Ainsi Claire et Solange sont-elles si éloignées de nous ? Ou, au contraire, n’expriment-elles pas une folie qui nous habite tous ? C’est cette seconde voie que je choisis pour ma mise en scène. Je veux montrer que le jeu de ces deux bonnes n’est en rien superficiel et relève bien au contraire d’un processus intime et universel.

La monstruosité qui s’exprime dans leur imaginaire théâtral est aussi la nôtre. Que nous soyons entre quatre murs, coupés totalement du regard des autres et de la société, et alors, tout comme Claire et Solange, nous mettons en scène nos monstres. Pour Genet, le théâtre n’est intéressant que s’il devient ce lieu vivant où apparaît notre intimité monstrueuse : « je vais au théâtre afin de me voir, sur la scène (restitué en un seul personnage ou à l’aide d’un personnage multiple et sous forme de conte) tel que je ne saurais ou n’oserais me voir ou me rêver, et tel pourtant que je me sais être. »

C’est donc à cette question passionnante que je désire répondre en mettant en scène Les Bonnes : comment concilier avec une extrême vérité l’intime et le monstrueux ? Comment montrer sans la dénaturer, sans la forcer, cette solitude humaine dans laquelle nos rêves les plus inavouables se font jour ?

  • Note de mise en scène

La distribution dans cette pièce est plus que jamais le point de départ de la mise en scène. Elle a un rôle sémantique immédiat. Pour ma part, j’envisage de travailler sur une distribution qui creuse plusieurs écarts d’âge. Car il me semble que l’inégalité des âges peut renforcer cette inégalité si fondamentale dans la pièce qu’est l’inégalité des apparences. C’est ainsi que je justifie une certaine liberté dans ma manière de distribuer les rôles, liberté non arbitraire puisque Genet lui-même avait émis le souhait que les deux sœurs notamment ne soient pas d’un âge trop rapproché.

La comédienne qui joue Madame est la plus jeune - 25 ans environ. Elle doit être très belle et jouer avec beaucoup de légèreté et de gaieté. Toutes les répliques qui, dans la pièce, soulignent que Madame est plus âgée que ses deux employées, peuvent être dites avec ironie afin de mettre davantage en valeur l’inégalité foncière qu’il y a entre elles.

L’actrice qui joue Claire a un âge intermédiaire entre celui de Madame et celui de Solange. Très belle au début, comme pourrait l’être Madame quinze ans plus tard, elle perd de son éclat, de sa belle apparence au moment de l’arrivée de sa maîtresse. L’âge intermédiaire de Claire, fait qu’elle peut être ou la grande sœur de Madame ou la petite sœur de Solange, ce qu’elle est effectivement dans la pièce. Solange, elle, est jouée par une actrice d’une cinquantaine d’années. Tous ces écarts d’âge visibles doivent donner l’impression d’avoir d’un côté une Madame hors du temps, de la matière, de l’action, et de l’autre deux bonnes vouées au travail, au vieillissement, à la haine de soi et des autres. Ce parti pris d’une distribution aussi hétérogène révèle, je crois, combien cette pièce est en définitive une tragédie des apparences.

  • La presse en parle

« La mise en scène est parfaitement maitrisée et chaque réplique s'inscrit très exactement dans la folie des corps et des attitudes (…). Guillaume Glayssen n'a rien laissé au hasard et la qualité des lumières n'a d'égal que l'originalité des costumes. » Dominique Feig, L'Alsace

« Guillaume Clayssen surligne dans une mise en scène très visuelle, choc et tapageuse, l'animalité des personnages et la tyrannie de l'apparence. » Myriam Ait-Sidhoum, Les dernières nouvelles d'Alsace

« (...) On se laisse volontiers séduire. Parce que les actrices (...) impriment à la partition un rythme, un souffle dans des corps à corps hypnotiques, chuchotés et presque dansés. (...) L'intime et le monstrueux se croisent ici au détour d'un bain rouge sang. Le crime était presque parfait. » Marie-José Sirah, L'Humanité

« (...) La cérémonie revêt des couleurs de show TV, avec micro et effets sonores : un artifice réussi du côté de la surenchère et de l’ironie, de la distance et de la comédie. Chants religieux, prières, psalmodies, Solange (Flore Lefebvre des Noëttes) et Claire (Anne Le Guernec), jeu juste et âpre, sont vêtues de la bure des religieuses, une robe informe et sans couleur, coiffées d’une perruque blonde synthétique. » Véronique Hotte, La Terrasse

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Spectacle terminé depuis le samedi 16 avril 2011

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