Les Histoires d’Edgar

Bagnolet (93)
du 7 au 26 novembre 2005
1h50

Les Histoires d’Edgar

Les Histoires d’Edgar repose sur un montage d’extraits tirés de deux romans. Les livres de Wideman entrelacent son expérience personnelle à la tragédie de l’histoire collective afro-américaine depuis les cales des négriers jusqu’aux pénitenciers américains. Quant à la langue, elle se donne le plus souvent l’apparence de l’oralité et se sert de jeux sonores, d’ambiguïté syntaxique, de rythmes inattendus, langages codés, sautes de diction propre aux formes de poésies traditionnelles africaines.

De l'écriture...
... au spectacle
Extraits de presse

Jean-Pierre Richard est son traducteur. Il lui consacre : Du négrier au bateau ivre, figures et rythmes du temps chez John Edgar Wideman, une importante étude des thèmes récurrents de l’œuvre qui s’entrelacent, se superposent et se retrament d’un roman à l’autre, autour du thème central sur lequel son oeuvre se fonde : la tragédie de l’histoire collective afro-américaine depuis les cales des négriers jusqu’aux pénitenciers américains. Pas un livre qui ne réfléchisse l’histoire raciale, la pensée raciale, et ne lui oppose un refus de cette pensée univoque et destructrice du “noir” et “blanc”.

Pas un livre qui ne reflète aussi la tragédie de l’histoire familiale (son frère et son propre fils sont en prison à perpétuité), la défection des pères « ces murs de silence qui constituent un des stigmates de la race », la hantise du feu, la fièvre raciale et la tempête, le basket et le blues, le questionnement face à l’œuvre d’autres artistes tel Giacometti, le peintre Bearden, Muybridge, Thélonius Monk, et Godard pour le livre à venir.

Il situe ses romans dans des lieux réels et pourtant métaphoriques : le côté d’Homewood, lieu des mémoires, de l’enfance, des récits ancestraux, et le côté de Philadelphie, lieu du chaos, de la fièvre, du feu, du massacre, de la peur et du rêve. Pour échapper à la malédiction de la race, le moyen sera la fiction, écrire des histoires qui se substituent à l’Histoire et la transcende. L’Histoire imposée cède la place aux histoires exaltantes, celles qui vous poussent à vivre et penser autrement.

Les procédés qu’on retrouve d’un livre à l’autre sont déroutants et brisent les modes de lecture traditionnels. Wideman brouille les repères narratifs, rend poreuse la frontière entre la fiction et sa propre biographie, démultiplie les points de vue, mélange les époques, passe sans transition d’un style littéraire à l’autre - lyrique, épistolaire, dialogué - d’un type de langage à l’autre avec une priorité donnée à la voix, à des voix qui s’entremêlent et contribuent à inscrire la narration dans un tissu d’histoires qu’il juxtaposent à la sienne propre et à la grande Histoire collective. Pas de linéarité, plutôt des strates, des fragments, des superpositions de temps différents, un goût pour le va-et-vient, la discontinuité et l’inachevé.

Quant à la langue, elle se donne le plus souvent l’apparence de l’oralité et se sert de jeux sonores, d’ambiguïté syntaxique, de rythmes inattendus, langages codés, sautes de diction propre aux formes de poésies traditionnelles africaines. Les histoires d’Edgar tend à faire entendre cette langue singulière et à révéler quelques principes de composition.

Deux villes et L’Incendie de Philadelphie sont publiés aux éditions Gallimard, traduction Jean-Pierre Richard.

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L’adaptation théâtrale tend à faire entendre cette langue singulière et à révéler quelques principes de composition. Elle s’articule en trois parties distinctes dans la forme. Les deux premières sont tirées de Deux Villes, la troisième de L’Incendie de Philadelphie.

Chez Edgar à danser
Ce chapitre relate la rencontre entre une jeune femme noire, Kassima, et un certain Mr Jones dans un bar de nuit. Elle va l’emmener chez elle. Et chez elle il se retrouve dans une maison si semblable à celle qu’il habitait enfant que tout un pan de mémoire lui revient ; des voix oubliées se mettent à résonner au cours de cette soirée de sexe et d’alcool. Les principes d’écriture de John Edgar Wideman s’y concentrent : discontinuité narrative, superposition des époques, polyphonie et diversité des langages..
Cette partie est entièrement traitée par une bande son. Les voix sont enregistrées, celle du narrateur (Mr Jones), celles des disparus que la mémoire ressuscite (en anglais), dans un environnement sonore riche et composite. Le public, placé dans un strict rapport d’écoute, est plongé dans le noir percé par quelques images des deux protagonistes, comme des instantanés muets de cette soirée et de leur nuit.

Lamentations
Le décor représente une chambre. Mr Jones est là, endormi. Kassima, elle, parle, se parle, long monologue intérieur inspiré des Lamentations de Jérémie. En paragraphes brefs, elle dit ce qui l’a amené à passer la veille au soir une petite robe verte et des chaussures à talons aiguilles de femme fatale : elle raconte son histoire, ces derniers mois qui ont vu la perte de ses deux fils, son mari enfermé, sa traversée du temps du deuil et son rapport au Livre d’où elle a tiré la force de continuer à vivre. Récit simple, à peine romanesque, d’une destinée tellement commune dans les milieux noirs américains. Tout repose sur la présence de celle qui interprète Kassima, dans la lumière du jour qui se lève ; plus d’autre son que le modelé de sa voix.

La Tempête
Changement de décor, un cadre urbain extérieur. Un homme, l’une des figures de l’auteur, celui qu’on aura vu dans la chambre, expose sa théorie et sa lecture de La Tempête de Shakespeare. Il veut monter la pièce avec des gamins noirs, pour qu’ils accèdent à la grande littérature anglo-saxonne. Il jouera Prospéro et répète avec Caliban portant de très lourdes dreadlocks semblables à des chaînes. Étonnante joute oratoire qui embrasse l’Histoire afro-américaine et une histoire de la langue depuis Shakespeare jusqu’aux parlers contemporains. Il défend la pertinence du projet, défini sa dramaturgie qui met en lumière la problématique raciale. Dans cette démonstration de La Tempête, Wideman adopte une écriture traversée par des rythmes propres au rap, au slam qui donne à sa langue une singulière énergie. Caliban en contrepoint joue des percussions et des parlers africains. Mais le spectacle n’aura pas lieu : le jour où il doit être présenté, un déluge s’abat sur le parc où les tréteaux étaient dressés. Les gamins seront les laissés pour compte de l’histoire. La malédiction se répète, la métaphore est clairement énoncée. A la manière des conteurs, les deux comédiens s’adressent directement au public, et font le va et vient entre le rôle qu’ils jouent et le commentaire. Mr Jones dira la fin du récit dans la chambre de Kassima comme si cette Tempête intérieure c’est à elle qu’il l’avait raconté.

"« Un qui écoute », dit de lui-même l’écrivain noir américain John Edgar Wideman, dont l’œuvre résonne de ces voix multiples qui habitèrent la maison de son enfance à Homewood, dans le ghetto noir de Pittsburg. Une maison où les femmes parlaient tant et plus, sans se douter que tous ces mots fascinaient le petit garçon qui, plus tard, deviendrait écrivain… C’est cette même qualité d’écoute qu’offre la mise en scène de Xavier Marchand soutenue par un trio d’acteurs africains époustouflant. Incroyablement à l’aise dans cette œuvre dense et complexe où l’auteur enchevêtre à loisir différents niveaux de langue, le passé, le présent, la fiction et l’autobiographie, Marchand pratique des coupes franches pour mettre en regard quelques pages de Deux Villes et de L’Incendie de Philadelphie. (…) Saisi d’une belle intuition, Xavier Marchand a retravaillé la traduction de Jean-Pierre Richard avec ses acteurs, en piochant dans le parlé actuel des rues d’Abidjan. Et nous ouvre ainsi à l’écoute de cette « langue primale » à laquelle aspire Wideman - cette langue mêlée d’avant le langage articulé - où le sens passe moins par les mots que par leur rythme, leur sonorité." Maïa Bouteillet, Libération, 25 juin 2004

"Épaulé par des comédiens convaincants, le metteur en scène Xavier Marchand a parfaitement réussi à adapter à la scène les extraits des deux romans de l’écrivain américain John Edgar Wideman sur lequel il avait choisi de centrer son travail. (…) Introduite par un prologue maîtrisé où, grâce à un éclairage soigné, se détachaient progressivement dans une obscurité complète des objets ou des silhouettes sombres, la représentation restituait l’existence d’une femme noire frappée par le malheur. Incarnée avec justesse par Marie-Sohna Condé, cette héroïne tragique nous plongeait crûment dans la réalité sanglante des ghettos." Lyon Capitale, 30 juin 2004

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