L’Amante anglaise

du 28 avril au 11 juillet 2009

L’Amante anglaise

Ludmila Mikaël, André Wilms et Ariel Garcia Valdès interprètent cette œuvre bouleversante en forme d'interrogatoire lucide, écrite par Marguerite Duras d'après un fait divers dramatique.

Prix du Syndicat de la critique 2009 pour la meilleure comédienne : Ludmila Mikaël.

La pièce
La chronique
Note d'intention
La presse

  • La pièce

Inspiré d’un fait divers, Marguerite Duras interroge Claire Lannes auteur du crime de sa cousine Marie-Thérèse Bousquet, sourde et muette, et Pierre Lannes, son mari.

« Le 8 avril 1949 on découvre en France, dans un wagon de marchandises, un morceau de corps humain. Dans les jours qui suivent, en France et ailleurs, dans d’autres trains de marchandises, on continue à découvrir d’autres morceaux de ce même corps. Puis ça s’arrête. Une seule chose manque : la tête. On ne la retrouvera jamais… Dès qu’elle se trouve en face de la police, Claire Lannes avoue son crime… mais n’a jamais réussi à donner d’explications… » Marguerite Duras

  • La chronique

« Le crime évoqué dans l'Amante anglaise s'est produit dans la région de l'Essonne, à Savigny sur Orge, dans le quartier dit de "La Montagne Pavée" près du viaduc du même nom, rue de la Paix, en Décembre 1949. Les gens s'appelaient les Rabilloux. Lui était militaire de carrière à la retraite. Elle, était sans emploi fixe. Le crime avait été commis par la femme Rabilloux sur la personne de son mari : un soir alors qu'il lisait le journal, elle lui avait fracassé le crâne avec le marteau dit "de maçon" pour équarrir les bûches. Le crime fait, pendant plusieurs nuits, Amélie Rabilloux avait dépecé le cadavre. Ensuite, la nuit elle en avait jeté les morceaux dans les trains de marchandises qui passaient par ce viaduc de la Montagne Pavée, à raison d'un morceau par train chaque nuit. Très vite, la police avait découvert que ces trains qui sillonnaient la France avaient tous ceci en commun : ils passaient tous justement sous ce viaduc de Savigny sur Orge. Amélie Rabilloux a avoué dès qu'elle a été arrêtée.

Je les ai appelés les Lannes. Elle, Claire, Claire Lannes. Lui, Pierre, Pierre Lannes. J'ai changé aussi la victime du crime : elle est devenue Marie Thérèse Bousquet, la cousine germaine de Pierre Lannes, celle qui tient la maison des Lannes à Viorne.

Je crois que la peine d'Amélie Rabilloux a été considérablement écourtée. Au bout de cinq ans, en effet, on l'a revue à Savigny sur Orge. Elle est revenue dans sa maison, rue de la Paix. Quelquefois on l'a encore revue. Elle attendait l'autobus en bas de sa rue. Toujours elle était seule. Un jour on ne l'a plus vue. A Savigny sur Orge personne ne se souvient plus. Le dossier du crime d'Amélie Rabilloux rejoint définitivement les Archives Judiciaires Nationales en Indre-et-Loire.

C'est dans la chronique de Jean-Marc Théolleyre que j'ai appris l'existence du crime d'Amélie Rabilloux. Le génial chroniqueur du Monde disait qu'Amélie Rabilloux, inlassablement, posait des questions pour essayer de savoir le pourquoi de ce crime-là, qu'elle avait commis. Et qu'elle n'y était pas parvenue. »

Marguerite Duras

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  • Note d'intention

L’Amante anglaise est basée sur un fait divers, Marguerite Duras a redistribué les sujets de ce drame de façon inattendue et plus dramatique pour sa pièce : Claire Lannes ne tue pas son mari mais sa cousine sourde-muette, qui, à l’instance de Pierre Lannes était venue vivre avec eux. Pourquoi Claire Lannes a-t-elle commis ce meurtre ?

Les procès de cette veine scandalisait l’écrivain qui en avait déjà suivit un en 1968 et c’était exprimée ainsi : « Ce que je voudrais pouvoir exprimer, c’est la situation psychologique de l’accusé devant - en particulier - la salle comble de mardi après-midi. C’est une situation entièrement fonctionnelle. L’accusé n’a plus rien à dire parce que l’appareil judiciaire la force à nous le dire dans son langage à lui. Lorsque l’accusé a avoué par deux fois son impuissance à se raconter : « J’aimerais pouvoir m’expliquer mais je ne peux pas y arriver », personne n’a insisté pour qu’il y arrive. Je ne savais pas qu’on coupait à ce point la parole aux accusés. Ils ne peuvent parler qu’interrogés. Et dès qu’ils se lèvent pour parler, on ne leur laisse pas le temps de le faire. La dernière personne qui compte à ce procès c’est évidemment l’accusé. (…) Il y a injustice, quant à nous, lorsqu’un criminel, n’intéresse plus personne, mais elle ne s’intéresse plus à elle-même. Elle n’est plus personne. »

Dans L’Amante anglaise, les aveux sont déjà établis ; Claire Lannes a avoué avoir tué sa cousine, sourde et muette, mais n’arrive pas à trouver une explication à son geste ; « je cherche pour elle », dit l’interrogateur.

J’ai commencé à m’intéresser à cette pièce un été il y a deux ans, quand la petite fille Maddie avait disparu au Portugal. Jour après jour on voyait ses parents à la télévision et en photos dans les journaux. Leurs visages, leurs positions, leurs phrases, leurs actions, étaient scrutés à la lumière du doute ou de la compassion. Le même visage semblait coupable ou innocent en quelques minutes.

Dans la pièce, bien que la coupable, Claire Lannes (Ludmila Mikaël) soit désignée, Marguerite Duras la fait apparaître de façon parfois « innocente » mais aussi ambigüe. Pierre Lannes (Ariel Garcia-Valdès), est parfois bavard et affable, mais révélant aussi une culpabilité qu’il ignore sans doute. Pierre Lannes se comporte de façon « excessivement » normale, presque insolite pendant que Claire Lannes exprime des réactions folles auxquelles nous pouvons nous identifier ; du moins qui nous touchent. C’est ce que l’Interrogateur (André Wilms) nous révèle.

Rendre L’Amante anglaise proche d’un documentaire ; en exprimer l’hyper-réalisme et ne pas entrer dans une fausse mélodie durassienne, élaborer un travail lucide et intérieur avec les comédiens : voilà ce qui m’excite dans cette pièce. Un interrogatoire se joue devant nous, d’une seule traite.

L’Amante anglaise a été écrite pour être jouée devant un rideau de fer, et donc dans un espace défini, presque technique, ce qui rend l’atmosphère pré-carcérale très crédible. Sur ce rideau je désirerais voir projeté des trains, en route ou en gare. Ils évoqueraient ce crime étrange après lequel Claire Lannes éparpillait les pièces du corps de sa victime. Le train serait aussi comme un moteur puissant de déplacement, comme un transport vers l’inconnu ; le train comme l’expression d’une vie libre : il avance sur les rails, les aiguillages le font changer de direction d’une façon surprenante. Les rails deviennent des « cours de vie », ils évoquent des décisions surprenantes, des déraillements parfois, ils deviennent un système d’artères, symbole de vie et d’existence. Les images projetées de trains deviennent une façon de rythmer la narration.

J’ai eu la chance de pouvoir travailler à ce projet avec Caroline Champetier, chef-opérateur qui a filmé les trains, leur vitesse, la violence de leur apparition, la géométrie qu’ils dessinent dans l’espace ; avec le décorateur Bernard Michel qui m’a proposé l’envers du rideau de fer, et avec Bernadette Villard pour les costumes. La pièce se jouera dans les lumières de Dominique Bruguière, André Serré en assurera l’illustration sonore.

Marie-Louise Bischofberger

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  • La presse

« On a l’impression qu’ils écrivent la pièce en direct ; chaque mot, s’ajoutant à un autre, tire un fil fascinant et inquiétant. Ludmila Mikaël revient avec un jeu extraordinaire. Elle n’aurait pu souhaiter meilleurs compagnons qu’Ariel Garcia-Valdès et André Wilms. » Brigitte Salino, Le Monde, 13 mai 2009

« On ne perd pas un mot d’une histoire-d’une douleur-traitée comme un documentaire et assumée par trois acteurs à charge intérieure forte. » Renés Solis, Libération, 9 mai 2009

« Ludmila revient sur les planches après neuf ans d’absence… Un personnage envoûtant. » Nathalie Simon, Le Figaro, 28 avril 2009

« Les interprètes subjuguent et l’on peut dire qu’ils subvertissent la manière classique d’interpréter L’Amante anglaise. On ne s’ennuie pas une seconde, on est tendu, tenu par le suspens (…) et même on rit. Ces trois là sont d’immenses acteurs. » Armelle Héliot, 29 Avril 2009

« Ludmila Mikaël dans la peau d’une meurtrière. Son retour au théâtre est à la mesure de son absence… Ludmila exhibe l’honnêté, le perfectionnisme. » Delphine de Malherbe, Le Journal du Dimanche, 26 Avril 2009

« Trois virtuoses des planches apportent une lumière plus sensuelle à la célèbre pièce inspirée d’un fait divers. Un trio de comédiens rares qui par leur seule présence, donnent une couleur nouvelle à l’histoire (…) Ils revivifient le texte, les personnages, par leur vitalité, leur sensualité. Très intéressant. » Armelle Héliot, Le Quotidien du Médecin, 6 Mai 2009

« On est subjugué par la finesse du jeu d’Ariel Garcia-Valdès (…), On admire la délicatesse, la profondeur, l’intelligence de Ludmila Mikaël. On est saisi par la force de l’écrivain. Un très beau moment. » Armelle Héliot, Le Figaro, 4 Mai 2009

« Trois comédiens immenses… » Les Inrockuptibles, 28 Avril 2009

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Spectacle terminé depuis le samedi 11 juillet 2009

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