Glengarry

du 5 octobre au 31 décembre 2000

Glengarry

CLASSIQUE Terminé

Sous ce titre mystérieux (un jargon publicitaire pour désigner une réalisation immobilière de luxe), David Mamet a écrit un chef-d’œuvre, éclatant de vie, de violence comique, d’intelligence (la pièce a reçu le prix Pylitzer). Dans cette pièce limpide et directe, Mamet attaque de front la société amér

Nouvelles versions
Une pièce limpide et directe
De l’autre côté de la vie
Un auteur rigoureux
"La musique est mon modele" Entretien avec David Mamet

Nouvelles versions

Les premières versions de Glengarry (sous son titre initial Glengarry Glen Ross, qui venait d’obtenir le Prix Pulitzer) et de American Buffalo ont été créées respectivement à La Criée - Théâtre National de Marseille et au Théâtre Tristan-Bernard à Paris en 1985 et 1986. Pierre Laville, dont David Mamet avait, deux ans auparavant, adapté Le Fleuve Rouge (Red River) pour les Etats-Unis, en avait écrit les textes français, et Marcel Maréchal les mettait en scène et les révélait au public.

Depuis lors, l’œuvre de David Mamet s’est développée et précisée ; une dizaine de productions a été présentée (par les théâtres les plus divers, de la Comédie-Française aux théâtres privés, des Centres dramatiques nationaux au Ballatum, ou à Vidy et au Varia) ; simultanément, après le dramaturge on découvrait le cinéaste (Engrenages est devenu un film de référence).

Aujourd’hui, Pierre Laville a écrit de nouvelles versions de ces pièces, qui sont publiées chez Actes Sud-Papiers. Au Théâtre du Rond-Point, Marcel Maréchal met en scène Glengarry, et Michel Fau American Buffalo, dans des distributions et des productions nouvelles.

L’impact du théâtre de David Mamet ne cesse de s’étendre. Aujourd’hui plus encore qu’hier, on est étonné par sa vitalité. C’est une œuvre d’exception qui se signale par sa puissance dramatique, la constance du propos, la rigueur de la construction, la singularité de la forme.

Faussement réaliste, d’une écriture singulière et décalée, il est, à la fois, un théâtre subtil, souterrain, complexe, fondé sur le non dit, et un théâtre qui attaque de front toutes sortes d’aliénation, de domination et de violence avec une lucidité exemplaire.

Une pièce limpide et directe

Sous ce titre mystérieux (un jargon publicitaire pour désigner une réalisation immobilière de luxe), David Mamet a écrit un chef-d’œuvre, éclatant de vie, de violence, de comique, d’intelligence.

Comment, exaspérés par l’émulation et la concurrence, les employés d’une agence immobilière à Chicago vont, chacun pour soi, voler les fichiers des clients de leur patron, et ce qui s’en suivra... Qui sera le voleur ? Qui sera le pigeon et paiera pour les autres ? Qui tirera son épingle du jeu et récoltera pouvoir et argent ? Qui dominera ?

Au premier degré, Glengarry est une histoire policière à suspense. Elle est, aussi et surtout, sur plusieurs plans, une cinglante attaque contre un monde d’oppression et de destruction des forces humaines.

La pièce est limpide et directe. Elle contient une allégresse, une énergie de provocation uniques dans le théâtre contemporain.

De l’autre côté de la vie

Méfions-nous du prétendu "réalisme" du théâtre américain. Le théâtre américain serait "cela" et uniquement "cela". Le théâtre européen, lui, serait symboliste, absurde, lyrique !

Trop facile ! Plus une œuvre est dite réaliste plus on doit la traiter de manière rythmique et allusive. Le réel a son poids d’insoutenable qu’il faut savoir rendre métaphorique... autrement, où est l’art là-dedans ? Qu’est-ce qu’on a à fiche que se soit (paraît-il) comme "ça" dans la réalité. On ne se paie pas une toile, on ne vient pas dans les rouges théâtres pour être comme dans la grisaille des rues stressantes de rage et de peur.

Comme le dit le docteur Destouches en exergue au Voyage au bout de la nuit :"Voyager, c’est bien utile, ça fait travailler l’imagination. Tout le reste n’est que déceptions et fatigues. Notre voyage à nous est entièrement imaginaire. Voilà sa force. Il va de la vie à la mort. Hommes, bêtes, villes et choses, tout est imaginé. C’est un roman, rien qu’une histoire fictive. Littré le dit, qui ne ne se trompe jamais. Et puis d’abord tout le monde peut en faire autant. Il suffit de fermer les yeux. C’est de l’autre côté de la vie".

Voilà. C’est ainsi que je rêve les personnages de David Mamet. Dans Glengarry, ce sont leurs âmes que nous voudrions faire parler. C’est peut-être "pas responsable une âme", comme dit encore Céline, mais quand ça parle sur un plateau de théâtre, c’est quelque chose.

Marcel Maréchal

Un auteur rigoureux

David Mamet aime comparer ses pièces à des chaises. "Ecrire c’est mon métier", dit-il avec la fierté de l’artisan. Il taille le langage comme d’autres la pierre ou le bois. C’est de son travail qu’il est fier, pas de lui-même. Paraître ne l’intéresse pas.

Mamet a une foi inébranlable, fanatique dans le théâtre. Il a toujours eu beaucoup de tendresse pour les acteurs, et plusieurs de ses pièces parlent directement du théâtre : "Je ne me suis jamais ennuyé en regardant des acteurs, surtout en répétition. On les voit faire des choses qui vous crèvent le cœur".

Tous les personnages de Mamet parlent un langage qui nous frappe par sa justesse, que l’on reconnaît parce qu’on l’entend dans la vie, mais qu’on n’avait jamais entendu au théâtre auparavant. Mamet est un auteur rigoureux, réduisant le texte à l’essentiel.

Le style de Mamet est en quelque sorte une version américaine du style de Pinter : une distillation du langage parlé, concret, réel, une arme autant qu’un moyen de communication. Les personnages luttent avec la langue sans pouvoir la maîtriser, sans pouvoir s’exprimer d’une manière satisfaisante, en perpétuelle compétition, celle de notre monde moderne. Les personnages négocient leur survie, mais comme dans Beckett la lutte est sous-tendue par une ironie corrosive, à la recherche de leur identité. La rapidité effarante et la vigueur du langage expriment avec d’autant plus de force la peur, le désespoir, la rage de ces personnages. Avec, par-dessous, une vraie générosité.

"La musique est mon modele" Entretien avec David Mamet

Où est la différence entre sujet théâtral et sujet cinématographique ?

Si je décide de manger ce soir dans un restaurant français, italien ou indien, l’un vous donne plus envie que l’autre. Pourquoi ? Je ne sais pas. Viscéralement, l’un vous semble une meilleure idée que l’autre. D’abord je pense à raconter une histoire intéressante avant de choisir le medium.

Pour des sujets contemporains comme le harcèlement sexuel dans Oleanna par exemple, j’essaie de me soumettre à la forme pour trouver une distance esthétique entre moi-même et mon matériel.

Vous avez appris les lois dramatiques, mais reste-t-il indispensable d’accumuler des expériences dans la vie pour raconter des histoires passionnantes ?

Aux Etats-Unis, on dit qu’on ne peut chanter le blues sans l’avoir eu auparavant. L’expérience n’est pas forcément une question d’âge. Beaucoup de jeunes ont des idées incroyablement puissantes et ils ont connu des moments décisifs. Seulement, en vieillissant on trouve parfois la capacité de les communiquer d’une autre manière.

J’ai fait beaucoup de jobs différents qui m’ont fait rencontrer des gens de toute sorte. Cela m’a aidé à inventer des personnages. Pour le film Engrenages par exemple, je suis entré dans l’univers des joueurs et ainsi j’ai pu dévier et exorciser mes propres tendances criminelles. Ecrire est mon moyen de vivre ces fantasmes dangereux.

Ecrivez-vous aussi pour vous engager, confronter les spectateurs aux problèmes sociaux et politiques ?

Non, je veux raconter une histoire, je ne veux rien "révéler" : le sujet me vient à l’esprit par coïncidence. Si les gens arrivent à bien suivre mon histoire, ils peuvent y découvrir d’autres éléments. Quand je commence à écrire, j’ignore mon "thème" - je pense à l’histoire. La musique est mon modèle : parfois un morceau me comble tellement que j’y trouve la vie elle-même. Malgré le fait qu’elle consiste seulement en des notes isolées, la musique peut avoir une unité immense et la puissance de provoquer des émotions les plus profondes - sans que le compositeur les ait mises sciemment dans son oeuvre.

Mon but serait d’écrire une pièce qui arrive à émouvoir les gens par sa pureté - comme un morceau de musique. 

Extrait d’un entretien réalisé par Marcus Rothe pour l’Humanité.

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Spectacle terminé depuis le dimanche 31 décembre 2000

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