Dominique et Françoise Dupuy - W.M.D.

du 9 au 13 mars 2005

Dominique et Françoise Dupuy - W.M.D.

Les Dupuy ont marqué des générations de chorégraphes et interprètes. On va découvrir, dans ce projet W.M.D., l’acuité du regard de Dominique qui met en scène sa femme Françoise et le jeune danseur chinois Wu Zheng. L’Estran s’inspire de La Ballade de Nayarâma, un fils qui porte sa mère, dernier passage sur terre, solitude à deux, ultime acte d’amour filial. au programme également deux re-créations : Vieilles gens, vieux fers de Jean Weidt et Epithalame de Deryk Mendel.

3 œuvres chorégraphiques au même programme.

La mémoire qui danse
Les oeuvres

Redonner sens à l’Histoire

Vieilles gens, Vieux fers (1937)

Epithalame (1957)
L'estran (2005)

Il y a tant à dire sur Françoise et Dominique Dupuy, figures de la danse française, que ces quelques lignes, forcément réductrices, ne peuvent y suffire : ce couple, formé au classique, au mime ou au théâtre, n’a jamais cessé d’éprouver sa liberté d’esprit. Fondateurs des Ballets Modernes de Paris en 1955, « artisans de la danse », vulgarisateurs des principes contemporains et remarquables pédagogues, les Dupuy ont marqué des générations de chorégraphes et interprètes.

Françoise et Dominique restent d’infatigables défricheurs : on va découvrir, dans ce projet W.M.D., l’acuité du regard de Dominique Dupuy qui met en scène sa femme et le jeune danseur chinois Wu Zheng. L’Estran s’inspire de La Ballade de Nayarâma, un fils qui porte sa mère, dernier passage sur terre, solitude à deux, ultime acte d’amour filial. À cette création originale - et si personnelle -, viendront s’ajouter deux re-créations, non dans l’esprit d’un hommage, mais plutôt pour conjurer le mauvais sort de la mémoire chorégraphique.

Vieilles gens, vieux fers, pièce créée en 1937 par Jean Weidt, résonne étrangement avec notre temps : danse chorale avec masques, les vieillards mendiants de l’époque ne sont pas loin des SDF d’aujourd’hui. Weidt, que les Dupuy rencontrent lors de son exil parisien, fut proche des milieux communistes autant que de Jean Cocteau et Jean-Louis Barrault. Il pensait que la danse changerait les injustices sociales : les Dupuy, sensibles à son engagement militant, le tirent enfin d’un oubli proprement assourdissant.

Leur démarche est similaire avec Deryk Mendel et son Epithalame, conçu en 1957, pour le couple même. Cette pièce pour deux solistes et un chœur de cinq interprètes, dans le silence, fut l’un des fétiches des Ballets Modernes de Paris avant d’entrer au répertoire de la compagnie de Jean Babilée ou des Ballets Rambert à Londres. Se déroulant comme un rituel de fiançailles dans un décor de soie blanche seulement traversé d’un arc-en-ciel, Epithalame est tout entier dans un dépouillement comme une offrande du geste. Méconnu aujourd’hui, Deryl Mendel doit à Dominique et Françoise Dupuy d’entrer à nouveau dans la lumière. Parce que le corps, lui, n’oublie jamais.

Philippe Noisette

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Jean Weidt - Vieilles gens, vieux fers (1937)
Chœur de 11 danseurs et danseuses

Deryk Mendel - Epithalame (1957)
1 danseur soliste, 1 danseuse soliste et un chœur de 5 danseurs

Dominique Dupuy - L’Estran (2005)

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Des trois noms accolés de Weidt, Mendel, Dupuy, surgit un demi-siècle de modernité en danse et le plaisir très vif de suivre le parcours de Françoise et Dominique Dupuy, danseurs et chorégraphes, co-fondateurs des Ballets Modernes de Paris. Un parcours qui n’a jamais cessé de se renouveler.

Redonner sens à l’Histoire, re-présenter sur scène des œuvres occultées par l’oubli, tel est le propos de W.M.D. Conçu comme un triptyque, le programme regroupe trois œuvres singulières écrites en des temps différents, la dernière étant une création de Dominique Dupuy.

Les Danseurs Rouges
Créée en 1929, Vieilles Gens, Vieux Fers, danse chorale exécutée en groupe par onze interprètes masqués, n’est pas, socialement parlant, si loin de notre actualité. Né en 1904 à Hambourg, formé aux concepts de Laban et de Jooss, Jean Weidt fonde à Berlin en 1929 « Les Danseurs Rouges », collectif de jeunes danseurs révoltés par les inégalités sociales. Les idées communautaires germent dans l’Allemagne d’alors, largement développées par Laban dans ses danses chorales.

Fuyant Berlin et le nazisme, Weidt se réfugie en France où il tente, non sans mal, de réunir une compagnie. Ses « Ballets 37 » et « Ballets 38 » se produisent grâce à Dullin au Théâtre de l’Atelier. Viendra ensuite après la guerre les « Ballets des Arts ». Françoise et Dominique Dupuy y feront leurs premiers pas professionnels à une époque où la danse moderne est plutôt marginale, pour ne pas dire méprisée. Mais Weidt, comme Finkel et Child, réfugiés allemands eux aussi, sèment la danse de demain. Et l’idée qu’il n’y a pas de danse sans motivation profonde.

De Messiaen au silence
Lyrique et plus classique, plus léger aussi, Deryk Mendel avait été formé au Royal Ballet de Londres. Il s’associe pour un temps au travail des Dupuy qui ont fondé depuis peu « Les Ballets Modernes de Paris ». Epithalame, dont il signe la chorégraphie en 1957, met en valeur leur talent de danseurs et souligne l’émouvante personnalité de Françoise Dupuy. Cérémonie de fiançailles riche en symboles, cette pièce originellement conçue sur la musique de Messiaen, est finalement dansée dans le silence. Elle remporte un succès.

Une ballade de Narayama
Mettre en lumière Weidt et Mendel était un devoir de mémoire nécessaire. Puissions-nous y voir au-delà de cela, tout l’intérêt de la découverte d’une époque et d’un style.

Nul doute que L’Estran concocté par Dominique Dupuy apportera sa part de surprise et d’émotion. Y mettra-t-il de cet humour distancié dont il a le secret ? Ou bien restera-t-on dans la note métaphysique du propos : un fils portant sa mère vers un autre rivage ? Nous y découvrirons le danseur chinois Wu Zheng en compagnie de Françoise. Conçue comme un poème sur La Ballade de Nayarama , cette création conjure les aléas du sort et de l’Histoire en s’inscrivant dans ce parcours en marche que rien chez les Dupuy ne peut arrêter. Tant est forte, depuis Weidt, leur passion pour l’art chorégraphique.

Si riche est leur répertoire, si nombreuses sont leurs activités de chorégraphie, de danse, de pédagogie et même d’écriture. Sans compter la direction de plusieurs festivals et de séminaires de réflexion ; ni leurs fonctions au ministère de la Culture ou leur résidence chez Chopinot. Sans compter leur école de danse contemporaine à Paris ou celle du Mas de la Danse à Fontvieille.
Mais à quoi bon compter ? Au fil du temps demeure la danse.

Lise Brunel

L’idée du programme est de réunir trois œuvres représentatives du parcours de Françoise et Dominique Dupuy, non pour un quelconque hommage, mais pour un très simple constat de faillite de la mémoire.

Dans ce programme, les œuvres de deux chorégraphes du XXe siècle, totalement tombés dans l’oubli : Jean Weidt et Deryk Mendel. A ces deux œuvres viennent s’ajouter la création L’Estran de Dominique Dupuy.

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Conception et chorégraphie : Deryk Mendel
Chœur de 11 danseurs et danseuses

La pièce a été créée par Jean Weidt lors de sa première période parisienne et a figuré notamment dans le programme de la saison des « Ballets 38 » au Théâtre de l’Atelier, à l’invitation de Charles Dullin. Elle a été reprise par Weidt lors de sa seconde période parisienne en 1948 pour sa compagnie des « Ballets des Ans ». Françoise et Dominique Dupuy figuraient dans la distribution.

Au cours des ans, elle s’est intitulée Danse des Vieilles gens, Sous les ponts de Paris, et c’est le propre père de Dominique Dupuy qui avait finalement suggéré à Weidt le titre de Vieilles gens, Vieux fers.

La reprise de la pièce aujourd’hui est rendue possible grâce à un enregistrement vidéo réalisé à Berlin, mais elle bénéficie surtout de la mémoire corporelle de Françoise et Dominique Dupuy et de leur sensibilité encore vive au travail de leur premier maître.

Reconstruite dans sa forme originale de danse chorale avec masques, cette pièce n’en parle pas moins à un public de ce début du XXIe siècle. Les personnages, hier vieillards mendiants rejetés par la société ne sont pas loin des SDF et des sans-abris d’aujourd’hui.

La pièce est inspirée des Danses macabres . Même si la mort n’y est pas représentée, elle y est présente. Sur le plan poétique, elle évoque le Testament de François Villon, et sur le plan plastique, une sorte de Radeau de la Méduse ou certains tableaux de Goya.

Les personnages sont comme des sortes de mannequins animés, des automates anonymes suspendus aux fils invisibles de la Mort, et cependant profondément chargés d’une humanité qui les dépasse. Ces « suicidés de la société » ne sont pas sans évoquer les Suppôts et Supplications d’Antonin Artaud. Antonin Artaud, que Weidt a côtoyé à Paris dans les années d’avant-guerre.

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Conception et chorégraphie : Deryk Mendel
Scénographie : Imaï
1 danseur soliste, 1 danseuse soliste et un chœur de 5 danseurs

La pièce a été conçue pour Françoise et Dominique Dupuy et créée par eux au Concours International de Chorégraphie du Festival d’Aix-les-Bains où elle a obtenu le premier prix à l’unanimité du jury.

Primitivement conçue sur des extraits du Quatuor pour la fin du temps d’Olivier Messiaen, elle a été finalement dansée dans le silence. Cette version silencieuse a fait l’objet d’une réalisation filmique d’une grande qualité par la RTB et projetée ainsi, au cours d’une soirée mémorable, sur les écrans de la Télévision Belge.

Du reste, la renommée de la pièce fut immense et son accueil partout triomphal, tout au long de plus d’une centaine de représentations par Françoise et Dominique Dupuy et leur compagnie des Ballets Modernes de Paris, dont elle a été plusieurs années durant la pièce fétiche et emblématique de leur travail. Elle est rentrée un temps au répertoire de la compagnie de Jean Babilée et des « Ballets Rambert » de Londres.

Dans le décor de soie blanche du peintre japonais Imaï illuminé des couleurs de l’arc en ciel, la pièce se déroule comme un rituel de fiançailles. La gestuelle a un considérable impact sur le public non seulement par son fort sens symbolique, mais par son dépouillement et sa réduction à une expression simple et évidente. Cette gestuelle n’est pas sans affinité avec le maniement du verbe cher à Samuel Beckett.

Samuel Beckett dont Deryk Mendel fût l’ami, créateur de « Acte sans parole » à Paris, puis metteur en scène de toutes les pièces en Allemagne.

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Conception et Chorégraphie : Dominique Dupuy
Scénographie : Jean-Pierre Schneider

La pièce est conçue tout spécialement pour la rencontre entre Françoise Dupuy et le jeune danseur chinois Wu Zheng. L’Estran c’est la partie du littoral comprise entre la plus haute et la plus basse marée, c’est la laisse, jalonnée de débris que la mer abandonne au jusant. Dans ce lieu de solitude, rythmé du temps sans fin du flux et reflux, le fils emporte sur son dos la mère, pour son dernier jour sur terre.

La pièce est inspirée de La ballade de Nayarama , et n’est pas sans évoquer le destin même de la danse, soumise à l’effacement du temps.

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Spectacle terminé depuis le dimanche 13 mars 2005

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