Pour un oui ou pour non

Clichy La Garenne (92)
le 29 novembre 2008
1h20

Pour un oui ou pour non

Chacun des deux personnages est interprété simultanément par deux comédiens, l'un utilisant la parole, l'autre la langue des signes. Étrange va-et-vient entre le mot et le geste qui expriment la même humanité, fascinante plongée au-delà du langage qui révèle l'insondable profondeur du non-dit.

Spectacle en Français et en Langue des signes Française.

Présentation
Notes de mise en scène
Notes pour la musique
Genèse d'un projet

H1 et H2, les deux personnages de la pièce, ont beaucoup de difficulté à se comprendre et à se faire comprendre, comme l'ont très souvent les mal entendant et les entendants entre eux. C'est pourquoi, Philippe Carbonneaux et Emanuelle Laborit ont créé le spectacle en langue des signes. Ils sont six sur le plateau : deux comédiens, deux musiciens, en contrepoint, et, auprès d’eux, Emmanuelle Laborit et Chantal Liennel, toutes deux mal entendantes.

Malentendus, suspicions, quiproquos, non-dits blessent l’amitié. Donner à comprendre au-delà des mots, entre les mots ce qui se joue entre deux amis c’est l’enjeu de Pour un oui pour un non. C’est aussi le défi relevé par le metteur en scène et les comédiens qui donnent chair à l’humour, la finesse et l’intelligence de l’auteur. Deux amis de longue date se sont éloignés. Pourquoi ? La cause est incertaine : il semble que l’un des deux ait eu une façon condescendante de dire à l’autre qui se réjouissait d’une réussite personnelle "c’est bien…ça !"

"Le texte de Nathalie Sarraute est rempli de non-dits, de sousentendus, de quiproquos, qui nourrissent la relation compliquée entre les deux protagonistes", souligne Emmanuelle Laborit, comédienne et directrice de l’International Visual Theatre. Quatre comédiens se partagent l’interprétation des deux rôles. Deux le disent à voix haute, les deux autres en langue des signes mais tous l’incarnent au plus proche. Loin d’égarer le spectateur, ce dispositif donne toute sa dimension à la pièce, nourrit et prolonge sa réflexion. Et si le théâtre était avant tout un partage ?

Adaptation en LSF : Philippe Galant, Jérôme Horry
Musique : François Marillier

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L’origine du projet
Il faut remonter assez loin… ma première rencontre avec des comédiens sourds s’est faite autour d’une table avec des amis. A l'époque je ne connaissais pas la langue des signes et cette rencontre a été décisive pour mon apprentissage de celle-ci. Par ailleurs, la découverte de spectacles en langue des signes n’a fait que renforcer mon envie de travailler avec les artistes sourds. Il y a 5 ans, j’ai rencontré les comédiens d’IVT avec lesquels j’ai joué Antigone mise en scène par Thierry Roisin, spectacle en langue des signes joué par des comédiens sourds et entendants.
Pendant une tournée de 3 ans, j’ai partagé, autour de l’acte théâtral, leur vie, et nous avons vécu des moments d’une grande intensité. A la fin du voyage, nous nous sommes fait part du désir mutuel de retravailler ensemble. Il y a un an, Emmanuelle et Chantal m’ont parlé d’un projet qui leur tenait à cœur : adapter en langues des signes une écriture contemporaine. Après avoir lu plusieurs textes, notre choix s’est porté sur Pour un oui ou pour un non de Nathalie Sarraute.

Rencontre sourds et entendants
Le propos de notre projet est l’échange et le partage entre sourds et entendants. Les spectacles qui ont déjà été créés dans ce sens ont toujours été des rencontres très riches, tant chez les spectateurs que chez les acteurs. La langue des signes a toujours porté un regard neuf sur le théâtre d’aujourd’hui, elle nous re-questionne sur les textes existants et sur la manière de créer. Il s’agit de permettre à cette langue de cultiver sa force artistique et créatrice et de participer à un “ théâtre du monde ”.

Pourquoi ce texte ?
Ce qui nous a réuni autour de cette œuvre c’est avant tout le langage. Comment adapter en langue des signes une langue aussi construite, si économe et musicale qu’est celle de Nathalie Sarraute ? Cette dernière agit sur deux niveaux, c’est une langue en surface qui développe une sous conversation qui dévoile le trouble des personnages.
Ce qui nous a séduit dans ce pari, c’est le travail d’adaptation très précis et indispensable pour restituer fidèlement l’écriture de Nathalie Sarraute. La langue des signes, langue visuelle qui s’inscrit dans l’espace doit trouver ses équivalences aux mots choisis par Nathalie Sarraute. Cette écriture, où le silence à une extrême importance, où l’architecture est jalonnée de points de suspension, permet de laisser naître l’invisible de la relation entre les individus.

La rencontre sourds/entendants
La rencontre des sourds et des entendants, comédiens et spectateurs m’a toujours semblé être le premier moteur dans ces créations théâtrales. Nous nous rendons compte à quel point il y a à trouver et à chercher dans la richesse de cette confrontation. Pour ce projet, nous voulions restituer, dans les deux langues tous les mots de Nathalie Sarraute et pouvoir les mener de front sur le même plateau, dans un temps simultané, et trouver leurs points de rencontre et aussi leurs différences. Découvrir l’équilibre de la compréhension des deux langues sans que l’une soit la traduction de l’autre. “L’aventure théâtrale, pour moi, c’est partir pour les Indes et me retrouver en Amérique” A. Vitez.

Deux femmes, deux hommes, deux langues….
L’univers de Pour un oui ou pour un non est un univers mental où nous passons de l’intérieur à l’extérieur des personnages. Nathalie Sarraute parle de tropismes. Notre premier souci est de trouver la manière théâtrale de rendre visible ces mouvements. Aucune des deux langues utilisées ne pourra prétendre être l’intérieur ou l’extérieur des personnages : le va et vient de l’une à l’autre, leur décalage nous fait prendre la mesure de ce qui se vit derrière les mots et entre les corps, et nous révèle le trouble qui les agite. Le duel que nous propose Sarraute est bien sûr le conflit entre H1 et H2, mais aussi un combat dans lequel nous retrouvons tous nos antagonismes féminin et masculin, notre pluralité humaine. H pourrait être traduit par humain, les humains, dans toutes leurs contradictions. Le choix des acteurs : deux femmes, deux hommes, pour jouer H1 et H2 contribue à révéler cette complexité relationnelle. Nathalie Sarraute : “ C’est l’être humain pour moi, le neutre. Il y a un mot pour ça en russe c’est tcheloviek et en allemand Der Mensch, l’être humain peu importe l’âge, peu importe le sexe ” “ J’ai toujours pris des phrases qui pouvaient s ‘échanger entre des partenaires quels qu’ils soient ”

L’espace
Un carré au sol, traversé de médianes et de diagonales. L’architecture des lignes, offre une multitude de configurations comme autant de combinaisons de figures de combat. Un espace épuré, affranchi de toutes références sociales et de vraisemblances réalistes. Un lieu qui ne laisse qu’à voir et à entendre les corps.
Face à ce carré, le spectateur est le témoin de cette joute.

Interview Philippe Carbonneaux juin 2000

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Comme la reconstitution d'un crime aide à sa compréhension au moment du procès, la représentation de Pour un oui ou pour un non sera pour nous une tentative de "comprendre" de façon sensible, c'est-à-dire au moyen des sensations, le texte de Sarraute. Comprendre, entre les mots, au-delà des mots, ces phénomènes décrits par l'auteur, sous le fameux nom de "Tropismes".

La langue des signes et le français et, la manière dont l'une entrera en résonance avec l'autre, seront les outils principaux de notre exploration. Avec ses fulgurances, ses suspensions, ses impulsions rythmiques, le matériel musical sera le contrepoint et la ponctuation du visible. Alors que paradoxalement les deux comédiennes principales sont sourdes, la musique agira, de même qu'en photographie: comme un révélateur, rendant perceptible pour le public "entendant", l'énergie la plus intime/infime, circulant entre les quatre comédiens. Les deux instrumentistes (un altiste et une accordéoniste), comme deux sources de lumière, tenteront à leur façon d'éclairer, de donner à voir le cheminement intérieur des protagonistes, mais aussi leur propre questionnement.

Dés lors, leur présence sur le plateau sera abordée autant comme celle de témoins ou de voisins, que celle de chercheurs, associés aux acteurs et donc, par-là même: participants à la recherche qui anime "H1 et H2".

De ce fait, la présence des musiciens sera (sinon perceptible) repérable, pour le public "sourd".

Notre recherche portera donc sur la variation infime du son, des timbres ou des lignes mélodiques, et de leur incidence sur le plateau. Nous procéderons par touches successives, prendrons le temps de voir apparaître ou disparaître, se tendre ou se rompre, le mystérieux fil qui semble relier les deux personnages de la pièce.

François Marillier, 4 mai 2001

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"Pourquoi ai-je eu l'idée d'adapter et de jouer Pour un oui ou pour un non ?"

L'année dernière l'International Visual Théâtre a organisé une formation théâtrale que j'ai suivie. Lors de ce stage nous avons été amenés à travailler les textes de plusieurs auteurs contemporains dont Nathalie Sarraute notamment à travers Pour un oui ou pour un non. Je me suis dit que l'on pourrait adapter cette pièce en langue des signes. En effet, le texte de Nathalie Sarraute est rempli de "non-dits", de sous-entendus qui nourrissent la relation compliquée qui existe entre les deux protagonistes. Ce décalage constant entre les deux ami(e)s est à l'origine de situations douloureuses et drôles à la fois. Je retrouve les mêmes sensations de quiproquos dans la culture sourde et dans nos difficultés quotidiennes à bien communiquer.

Alors… j'ai eu envie de rencontrer Nathalie Sarraute, je lui ai écrit. Elle m'a répondu tout de suite. Je l'ai rencontré avec un interprète et lui ai parlé de mon projet, de mon désir d'adapter sa pièce en langue des signes et de mon souhait de la faire jouer par deux femmes : Chantal Liennel et moi-même. Or Pour un oui ou pour un non n'avait jamais été joué que par des hommes…

A ma grande surprise Nathalie Sarraute a été tout de suite enthousiaste et n'a posé qu'une condition : celle d'être le plus fidèle possible à son écriture, même dans le cadre d'une adaptation en langue des signes.

Elle m'a dit : "La pièce jouée par deux femmes … où est le problème ? Comment aurai-je pu écrire pour des hommes n'étant pas moi-même un homme ?… Pour H1 et H2 dans le texte H a ici le sens d'humain, les Humains, hommes et femmes, sourds et entendants."

Nathalie Sarraute est partie quelques mois après cette rencontre, elle ne connaissait pas le monde des sourds et leur culture, mais elle avait à cœur de voir la réalisation de ce projet. Je tiendrai parole."

Emmanuelle Laborit, septembre 1999

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16/18, allée Léon Gambetta 92110 Clichy La Garenne
Spectacle terminé depuis le samedi 29 novembre 2008

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