Pièces

Paris 20e
du 1 au 27 octobre 2001

Pièces

On pourrait dire qu'il s'agit du roman d'une vie. On pourrait dire aussi que c'est une fin de vie. On pourra parler d'un périple exemplaire. On dira qu'on suit de lieu en lieu le vieil homme spolié ; du moment du scandale (la spoliation) à celui de sa chute (il perd la raison). Qui est-il ce vieil homme, si ce n'est


Présentation
Notes de mise en scène

Je suis parti de ce fait divers : un bonhomme de 70 ans à peu près, qui habite dans le XXème arrondissement à Paris, et qui a tellement accumulé de journaux dans son appartement qu'il ne peut plus entrer. Donc, il dort sur le paillasson, ou il va dormir chez ses maîtresses.
Il y a eu une fuite d'eau dans l'appartement, une plainte de la part des copropriétaires, et, comme il n'était jamais là, on a dû entrer de force chez lui. Evidemment, une tonne trois de journaux leur est tombé sur la gueule. Les éboueurs ont ouvert les fenêtres et ont tout jeté, y compris ses collections et ils ont vendu aux enchères les meubles du vieux monsieur aux commerçants de la place, dans le XXème. Le vieux rentre chercher son courrier, comme une fois par semaine, et il voit sa porte défoncée, ses vitres cassées, et son lit en fer, point.
Il a résisté, il n'était pas comme tout le monde. On disait " c'est un vieux fou " , " c'est le vieux fou du quartier, c'est le clochard, etc. " . Je saisis cet homme au moment où il est expulsé par son propriétaire. Parce que le plancher penche, évidemment… une tonne trois de vieux journaux, ça abîme un plancher !
Et puis j'avais un autre fait divers en tête, celui d'une femme qui résistait à une Société, près de Grenoble. Elle était la seule habitante d'un endroit qui était totalement pris en charge par une société immobilière et qui voulait prendre tout le terrain. Elle se casse la rotule, elle va à l'hôpital, et pendant qu'on lui opère sa rotule - elle reste un mois ou deux à l'hôpital - on lui rase sa maison. Voilà. Avec l'accord de ses fils. (…)
J'avais comme point final l'histoire vraie, du père d'un ami à moi, qui a la maladie d'Alzeimer, et dont l'autre fils tient un local politique à Marseille. Il faisait du gardiennage dans ce local politique. Un jour le local politique déménage, et il continue à faire le gardiennage au même endroit. Et comme il est fou, on lui dit : " Mais oui, c'est ça, prenez le téléphone… " … Il dit : " Je prends les messages " , " Oui, c'est ça, prenez les messages… " . Il n'y a plus de téléphone, la ligne est coupée. C'est une histoire terrible, tragique. Voilà, j'avais le début et la fin. Après, j'ai tricoté comme ça, en neuf tableaux, la chute d'un homme.
J'appelle ça un " mystère laïc " . Un mystère au Moyen-Age, c'est la vie des saints ou de Dieu. Et là c'est la vie des laïcs, c'est la vie des gens d'aujourd'hui.
En neuf tableaux, on a la dégringolade…

Philippe Minyana / Propos recueillis

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On pourrait dire qu'il s'agit du roman d'une vie. On pourrait dire aussi que c'est une fin de vie. On pourra parler d'un périple exemplaire. On dira qu'on suit de lieu en lieu le vieil homme spolié ; du moment du scandale (la spoliation) à celui de sa chute (il perd la raison).
Qui est-il ce vieil homme, si ce n'est (une fois encore) une " figure du chagrin " , une figure bouleversée, une figure humaine (c'est-à-dire représentative de l'humanité) ? On pourrait préciser que c'est encore une " figure résistante " (quelqu'un qui n'est à aucun moment conforme) et qui est une victime, en quelque sorte, de nos systèmes structurés qui légitiment l'ordre et l'effort de communication. (…)

Philippe Minyana

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Il s'appelle Tac, et il est abandonné du monde. Son nom résonne comme un coup donné à la conscience fermée de chacun.
Il frappe aux portes, il montre sa figure de sainteté. Il repart sans écho, sans réponse non plus. Ceux qu'on nomme les proches sont d'autres éloignés, et les inconnus de passage s'enfoncent dans la terre avant lui.
Pièces est la mise en écriture d'un chemin de croix : lieu indéterminé, appartement, rue de village, salon de province, terrain en attente de construction, bureau d'un élu politique. Ces descriptions arpentent les espaces de nos fictions contemporaines. C'est là- dedans que ça parle, que ça se frotte, que ça se tue en mots, que ça attend une révélation déjà vieille comme ces masques d'humains accrochés à leurs mémoires vidées. (…)
Philippe Minyana continue sa " tresse " entre les faits divers (l'actualité reprise à son compte) et la mythologie telle qu'elle se fait avec nous (les vivants de son époque). C'est cela qui fait la stupeur de sa langue au théâtre, c'est la mise en œuvre de notre destin pris dans la perspective des temps, alors que notre nez est collé dessus. Par exemple : les habitants sont la figure de la rumeur, de la conscience. Figure ancienne qu'on a appelée le chœur, qui ici est aussi une écriture musicale, rythmique, qui devient le chant d'un peuple. Ce sont eux qui ouvrent la voie, ils donnent la fréquence de jeu, ils sont anonymes et éternels, ils sont là, à témoigner, et aussi à piller. Ces habitants s'excusent d'avoir acheté, profité de l'abandon d'un des leurs : le pauvre Tac. Rien de plus normal, de terriblement normal, de joyeux presque tellement le travers est face à nous, comme dans la pure tradition de la farce des mœurs.

Robert Cantarella

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Spectacle terminé depuis le samedi 27 octobre 2001

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