Paradise codes inconnus 1

Aubervilliers (93)
du 5 novembre au 16 décembre 2004
2H30

Paradise codes inconnus 1

Dans le théâtre transformé en boite de nuit, les spectateurs sont accueillis par le patron. Le spectacle peut commencer. Au Paradise, c'est le carnaval du sexe et de l'oubli de soi, où se mêlent beauté et grotesque, illusion et réalité. Au Paradise tout peut arriver.

Au Paradise tout peut arriver
Paradise (Un lieu meilleur que l'enfer)

Codes inconnus

Réalités parallèles
Le thème des « codes inconnus »

Dans le théâtre transformé en night-club, les spectateurs sont accueillis par le patron. Le spectacle peut commencer. Au Paradise, c'est le carnaval du sexe et de l'oubli de soi, où se mêlent beauté et grotesque, illusion et réalité. Au Paradise tout peut arriver.

" Je voudrais parler de la notion de limite, aller vers la frontière de ce qui est possible et de ce qui ne l'est pas... C'est parce qu'elle est le lieu de toutes les subversions que les sociétés sont toujours tentées de contrôler la sexualité : le retour de l'ordre moral, que l'on constate aujourd'hui, en témoigne… Le sexe n'est jamais apparu aussi effrayant. C'est cette peur, et tous les symptômes qui y sont liés (perversion, honte, contrôles des mœurs, etc.) que je voudrais explorer. " Laurent Laffargue

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Paradise… Un nom qui tinte comme une promesse pailletée. Ou un instant de bonheur volé à la grisaille des jours. Peut-être l’espoir d’une expérience inavouable. Vous qui pénétrez ici, dans cette boîte noire zébrée de cris de lumière, le cœur pulsé par les décibels techno, qu’attendez-vous ? Que regardez-vous dans l’ondulation surexposée de ces sensuelles vestales ? Qu’entendez-vous aux creux des confidences que vous glissent ces voix impudiques ? L’écho affolé de pensées qui vous caressent les intestins ? « Paradise est un lieu où tout peut arriver, où la frontière entre la réalité et le fantasme peut être franchie… ou gommée. Quiconque pénètre dans ce territoire incertain se met en danger : ici, l’identité de chacun peut être volée, manipulée, altérée » prévient l’auteur Daniel Keene…

Dans cette atmosphère enfumée de désirs à l’affût, les spectateurs, groupés autour du podium, deviennent clients consentants et troublés, effrayés et ravis par le charme soufré de ce bar interlope. Vladimir, taulier élimé de série B, présente les « numéros » : Cat, gigolo sado en mal de salut ; Monsieur Fabris, honnête commerçant cajoleur de petites filles ; Monsieur King, clochard ivre de Shakespeare pleurant sa Cordélia ; Paul, serial killer incertain ; Julie, Sarah et Virginie, strip-teaseuses forniquant au pays des morts ou encore Max, vieil acteur vautré dans sa splendeur d’antan… Tous effeuillent les pelures de leur âme et nous livrent la chronique crue de leurs déviances. Situations limites ? Excitantes ? Révoltantes ? Mais nous sommes au Paradise, Palm Beach féerique du divertissement !

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Avec Terminus, de Daniel Keene déjà, Laurent Laffargue s’aventurait dans l’univers insomniaque des périphéries glauques, où grouillent les rêves paumés et les pleurs écorchés d’une humanité désenchantée. S’enfonçant dans l’obscurité feutrée des tréfonds, il suivait les pulsations de cœurs en quête existentielle, égarés dans le passage entre l’ici et l’au-delà.

Après l’intermède shakespearien délicieusement enjoué de Beaucoup de bruit pour rien, le metteur en scène bordelais, 34 ans et déjà 17 spectacles à son actif, voulait continuer à sonder ces zones marécageuses de l’expérience de soi que donnent le rapport au sexe, la tentation de la transgression, l’écart entre nos désirs et notre réalité. « Notre époque connaît un regain du puritanisme, alors que la publicité et la mode exhibent partout le corps érotisé comme argument commercial. Ce paradoxe entre un certain retour à l’ordre moral et l’omniprésence de l’allusion sexuelle me pose question. J’ai eu envie d’explorer l’ambiguïté de cette fascination et de cette condamnation ». Il a commencé à travailler sur la notion de « codes inconnus », tirée du film de Michael Haneke, c’est-à-dire « la confrontation avec des situations qui échappent aux codes répertoriés, connus, réglementés », dans des domaines de l’expérience humaine à la fois très personnels et extrêmement normalisés, ritualisés : le sexe et la mort.

Ainsi que le soulignait Daniel Keene dans Ma vision du théâtre : « Tous les rituels sont des transgressions. Des transgressions auxquelles nous souscrivons. Des transgressions qu’il s’agit de célébrer. Elles permettent qu’une âme passe d’un lieu à un autre. De l’ignorance à la connaissance, des ténèbres à la lumière, de la jeunesse à la maturité, de la virginité à l’état d’épousé / d’épousée ».

Laurent Laffargue a alors ébauché un synopsis, esquissé les personnages, l’imaginaire nourri de références cinématographiques : Exotica d’Atom Egoyan, pour la moiteur vénéneuse de la boîte de strip-tease où se consolent des solitudes voyeuristes ; Mulholland Drive de David Lynch, pour la confusion du réel et de la fiction dans le tressage des récits ; Code inconnu de Michael Haneke, pour la construction en puzzle et le jeu des correspondances, et Funny Game, du même réalisateur, pour la réflexion sur la déréalisation de la violence dans notre société. Puis il a demandé à Daniel Keene d’écrire une pièce à partir de cette trame. « Ces thèmes sourdent dans tout son théâtre. Je savais qu’il pourrait les déployer pour en faire une œuvre ».

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L’auteur australien a tissé l’histoire avec ses propres mots. Ou plutôt des histoires, qui s’emboîtent en trompe-l’œil et brouillent les repères de la fiction. Car le public, partenaire tacite du jeu, partage le quotidien des employés du Paradise, naufragés suspendus dans une attente sans ailleurs qui s’inventent un mode de survie avec ce glamour de pacotille. Pendant que le temps s’évapore, marquant les auréoles des aspirations de la jeunesse. On navigue de la loge de Lola, femme du patron trouée par l’alcool et la nostalgie, à celle des jeunes strip-teaseuses, du comptoir où le barman et le vigile évident leur désarroi, à la scène où se produisent les « shows ». Les séquences s’enchaînent et se chevauchent, dans une mise en abîme vertigineuse d’effets de réel où le référent ne cesse de se déplacer.

Où se situent le spectacle, la frontière du plaisir, la limite du tolérable, par rapport à soi, par rapport aux mœurs, à la loi… donc la transgression ? La confusion transforme les spectateurs en voyeurs et révèle ainsi l’équivoque des sentiments titillés par les aveux pervers, en même temps qu’elle provoque une prise de conscience. « Cette confrontation touche la part obscure en chacun de nous, la schizophrénie entre le « je » désirant, secret, et le « je » social, concret » précise Laurent Laffargue. « Mais je ne cherche pas à choquer, ni à instaurer un climat malsain. Je travaille plutôt sur la vitalité des personnages, qui se débattent avec leur souffrance ». Formidable chef de troupe, il sait sculpter en virtuose l’énergie des comédiens pour orchestrer la partition du plateau tout en nuances, passant de l’ambiance électrique à la révélation susurrée.

Dans cet univers âpre et survolté, la langue de Daniel Keene, dénudée, essentielle, étreint le trivial et le lyrisme en une poésie sombre, striée d’ironie. Elle apporte l’ultime délivrance, « puisque personne, jamais, ne peut donner l’exacte mesure de ses besoins, ni de ses conceptions, ni de ses douleurs, et que la parole humaine est comme un chaudron fêlé où nous battons des mélodies à faire danser les ours, quand on voudrait attendrir les étoiles », comme disait si bien Flaubert.

Gwénola David
Journal du Théâtre de la Ville, octobre 2004

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… Je voudrais parler de sexe, de l’expérience de soi que donne le rapport au sexe, du désir, du fantasme et de la limite, c’est-à-dire de l’endroit, du moment, où l’on a envie de transcender les codes. Je ne pense pas à un traitement trop explicitement « sexuel », mais je souhaiterais que le discours et l’action expriment toujours la tentation, le désir d’aller plus loin, cette quête qui mène à quelques questions essentielles : « Qui suis-je ? », « Qu’est-ce que je veux ? » et « Suis-je ce que je veux ? ».

Ces deux thèmes ont toujours été liés (c’est la vieille association « Eros et Thanathos » des Grecs, et ne dit-on pas que la jouissance est une « petite mort » ?). Ce sont aussi des thèmes récurrents, que j’ai déjà abordés dans mes spectacles. Mais ici, je voudrais parler plus spécifiquement de la notion de limite : celle qui sépare la vie de la mort, l’humain de l’inhumain… Une des manifestations de cette limite, c’est la peur : peur de passer la frontière, de transgresser, de se perdre… Je voudrais questionner cette peur et l’autre dimension de la transgression : le désir, le plaisir, l’attirance vers l’inconnu…

La société a instauré des codes : code social (la loi, la morale), code linguistique (le langage). Des codes qui nous servent à communiquer ou à vivre ensemble, mais qui posent aussi des limites : ils définissent ce qui n’est pas communicable, ni « vivable ».

Le « codage », l’intégration des codes est donc une aliénation, une perte de liberté et d’identité. Il donne l’impression de maîtriser le monde, tente de rassurer l’individu mais crée son revers : la peur de l’inconnu, le désir de la transgression. Dans ce spectacle, on tentera de créer de nouveaux codes, à la fois familiers et étranges, et on s’interrogera en retour sur les nôtres : où est la limite ? Où est la transgression ? Le domaine de l’expérience sexuelle est à la fois l’un des plus « codés » (le code pénal peut en témoigner), et des plus incontrôlables : il est celui où l’individu remet en question son rapport au monde, son adhésion à l’ordre social. C’est parce qu’elle est le lieu de toutes les subversions que les sociétés sont toujours tentées de contrôler la sexualité : le retour de l’ordre moral, que l’on constate aujourd’hui, en témoigne… Le sexe n’est jamais apparu aussi effrayant. C’est cette peur, et tous les symptômes qui y sont liés (perversion, honte, contrôles des mœurs, etc.) que je voudrais explorer.

Aujourd’hui, je souhaite aller ailleurs dans ma démarche de metteur en scène. Je voudrais proposer un contexte, une thématique qui impliquent fortement le spectateur et l’amènent vers une forme d’expérience particulière, différente. J’ai envie de trouver une forme d’expression directe, frontale, « limite » en prise avec le présent, l’intime, l’universel… Ici et maintenant.

Le travail avec Daniel Keene sera particulier, puisqu’il ne s’agit pas ici expressément de « commande de pièce ». Je demande à Daniel de travailler à partir de ces propositions, au même titre que les comédiens. Il y aura bien sûr une construction dramatique, qui donnera sa cohérence au spectacle. Mais j’ai envie de garder cette idée d’expérimentation, d’« inconnu ». J’ai envie de partager cette aventure avec Daniel car je pense que dans son écriture, ces notions de « codes inconnus » sont très présentes, qu’il a toujours une manière singulière de parler du sexe et de la mort.

Laurent Laffargue, décembre 2002

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Spectacle terminé depuis le jeudi 16 décembre 2004

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