Le Songe d’une nuit d’été

Paris 18e
du 16 janvier au 2 mars 2006

Le Songe d’une nuit d’été

CLASSIQUE Terminé

Par des sortilèges, Puck fera vivre aux humains de la cité entrés dans la forêt une nuit si incroyable qu’ils ne parviendront pas à déterminer si leurs aventures furent réelles ou s’il ne s’agissait que d’un songe étrange. Pouvoir, rapport amoureux, convoitise, désir, féerie, folie, haine, brutalité, animalité, croyance, maléfice, érotisme sont réunis dans cette nuit onirique.

 

  • Une nuit incroyable

Hermia et Lysandre, Héléna et Démétrius, quatre jeunes amants à la recherche de l’autre, émouvants et loufoques, amoureux de l’amour, aveuglés par lui jusqu’au moment où le suc d’une fleur magique leur permet de voir par d’autres yeux. Leur monde est régi par les lois d’Athènes qui perpétuent un ordre patriarcal dans lequel une fille doit épouser l’homme que son père a choisi pour elle, sous peine, si elle refuse, de passer le reste de ses jours dans un couvent ou d’être exécutée. Cette petite société est d’ailleurs dirigée par Thésée, héros masculin voire machiste qui conquit Hippolyta par la force. Si le décor de la pièce est d’ailleurs leur mariage que Thésée veut placer, l’âge venant, sous le signe non plus de la violence mais du respect, il ne semble pas pour autant que la future mariée ait son mot à dire. Une compagnie d’artisans s’improvise acteurs pour cette occasion, ridicules et touchants ils jouent la tragédie de Pyrame et Thisbé, amants malheureux que leur passion entraîne jusqu’à la mort pour un malentendu.

Tout près de la cité, dans la forêt, un autre monde coexiste, celui de féerie. Titania et Obéron, la reine et le roi des fées, s’y livrent un combat qui met en jeu domination, possession et sensualité. Leur conflit déchaîne les éléments cosmiques, et la nature en est déréglée, les saisons sont inversées. Ce monde mystérieux est dangereux pour les hommes, lorsque les personnages de la cité ont l’imprudence d’entrer dans la forêt alors même que la lutte entre le roi et la reine des fées se poursuit, ils y rencontrent Puck, serviteur joueur d’Obéron. Puck a l’intelligence du diable et est un démon du mouvement, arlequin maléfique d’inspiration moyenâgeuse. Par des sortilèges, il fera vivre à ces humains une nuit si incroyable qu’ils ne parviendront pas à déterminer si leurs aventures furent réelles ou s’il ne s’agissait que d’un songe étrange.

Les personnages sont unis par leur lutte pour le développement de soi : la réalité menaçant cette transformation et cet accomplissement, le rêve vient à leur secours et rend l’impossible possible. Dans la nuit et le songe, les humains peuvent approcher leur inconscient et l’essence de leur désir. Après cette nuit incroyable, l’ordre est rétabli, Titania et Obéron réconciliés, et le mariage du duc et de la duchesse devient aussi celui des deux couples d’amants apaisés.

  • Note sur la mise en scène

Le Songe d’une nuit d’été a sans aucun doute de petites et de grandes clefs, mais pour toutes les posséder il aurait fallu assister à la première représentation qui eut apparemment lieu lors des noces de la très noble mère du comte de Southampton. S’il en fût effectivement ainsi, sur scène et dans la salle, tout le monde se connaissait et chaque allusion portait immédiatement. La seule chose indiscutable est qu’il s’agit d’une comédie d’amour pleine de brutalité et de violence.

La pièce met en scène des jeux de pouvoir qui s’opposent et dont les conséquences concernent tout le monde puisque, dans ce cas précis, elles touchent la nature par le dérèglement des saisons. À l’heure de la mondialisation, lorsque des gens d’argent et de pouvoir entrent en discorde et décident de diminuer, supprimer ou déplacer leurs investissements, les répercussions sont sensibles sur tous les continents. Si Titania et Obéron, roi et reine de féérie, existaient on pourrait leur imputer le tsunami de 2004, les cyclones dévastateurs et toutes les catastrophes naturelles. On le sent bien, ce monde féerique est celui de l’ambivalence, il est merveilleux et inquiétant, il y grouille à l’état brut les forces obscures qui animent les humains. Le diptyque Titania/ Obéron auquel celui d’Hippolyta/Thésée fait écho laisse entrevoir, selon nous, des hommes puissants ou du moins qui l’ont été, des fins de dynasties capricieuses dont l’onde de choc est encore notable.

Cet aspect grinçant ne doit pourtant pas faire oublier que Le Songe d’une nuit d’été est avant tout une comédie. Cette pièce est emplie de l’autodérision de l’auteur, il y explore les mêmes thèmes que dans Roméo et Juliette, mais avec un recul étonnant. En effet, on retrouve tout au long de la pièce la question de la versatilité de l’amour et de la volonté de posséder l’être aimé. Cependant, dans le reflet mystérieux de ce songe, l’amour possessif échoue. L’allusion touche son paroxysme avec la représentation de Pyrame et Thisbé, exécutée de manière parodique quoique involontaire par les artisans, à travers eux, la pièce parle également et surtout d’un désir de théâtre.

Ce qui réunit les personnages est qu’ils parlent tous d’amour. Dans la pièce, le lieu suprême de rencontre entre le langage et le corps est le désir. Tous ces rêveurs d’une nuit d’été sont victimes d’une tempête de forces contradictoires qui provoque entre eux attraction et répulsion, qui les fait entrer en fusion et souffrir dans la solitude. De ce chaos naît peut-être un concept différent où l’autre est aimé dans le respect de ce qu’il est. Les sortilèges aident les personnages à se trouver, le plateau devient ainsi alternativement le lieu de l’illusion et celui où l’on fabrique artisanalement cette illusion, où l’on crée l’illusion de l’illusion, et où l’on découvre aussi sa vérité. La nuit les personnages se libèrent d’eux-mêmes à travers leur rêve, ils s’y révèlent, car elle permet l’accomplissement que le jour censure.

Pouvoir, rapport amoureux, convoitise, désir, féerie, folie, haine, brutalité, animalité, croyance, maléfice, érotisme : tous ces éléments participent de l’écriture de Shakespeare qui touche différents niveaux. Il ne s’agit pas ici de les réduire et de suivre un parti pris unique, mais de tenir ensemble, dosées et précises, toutes ces composantes afin de rendre compte avec justesse de l’univers shakespearien et de sa grande modernité. Ainsi, c’est à travers des procédés et signes dramaturgiques simples et une mise en scène au rythme soutenu que l’alchimie doit se faire pour restaurer les forces synergiques de cette pièce. Nous avons créé un spectacle contemporain qui s’efforce de faire justice aux données essentielles du matériel original.

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Informations pratiques

Sudden Théâtre

14 bis, rue Sainte Isaure 75018 Paris

Spectacle terminé depuis le jeudi 2 mars 2006

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