La quatrième soeur

du 5 février au 21 mars 2004
2H00

La quatrième soeur

A Hollywood, John Freeman reçoit un oscar pour son documentaire sur les prostituées moscovites. A Moscou, un vieux général veille à grand renfort de vodka son épouse défunte. Il lui reste trois filles, trois sœurs qui rêvent d’ailleurs et d’autres vies… Mais Tchekov est loin de cette Russie moderne : les dollars, Versace et Julia Roberts ont franchi le rideau de fer. Une pièce contemporaine qui dynamite les stéréotypes et propose une vision décapante de notre monde.

La pièce
Intentions

La compagnie

A Hollywood, John Freeman, réalisateur américain, reçoit un Oscar pour Les enfants de Moscou. A Moscou, aux côtés d’une babouchka sans âge, un vieux Général veille à grand renfort de vodka son épouse défunte. Le militaire a trois filles : Tania, la benjamine se rêve en Pretty Woman ; Katia, la cadette, nourrit sa famille de la viande qu’elle dérobe à un tigre; Wiera attend un enfant d’un politicien véreux et marié. Trois sœurs, clin d’œil à Tchékhov, dont l’univers, pourtant, semble bien révolu.

“ Qui a le pouvoir ? Où est l’argent ? Comment tout cela finira-t-il ? (…) comment vivre ? ” Chacun des personnages apporte sa réponse aux questions du Général : Kostia, le fils de Babouchka, cherche à devenir Seigneur de la mafia; sa mère se fait la mascotte des gilets pare-balles ; Ivan Pavlovitch, acteur célèbre devenu malfrat, ponctue ses crimes de réflexions sur le Jazz ; Kola, jeune orphelin recueilli par le Général, semble trouver dans le silence et les tâches ménagères une réponse au désarroi moderne. Tous ressassent le même refrain : “ Je suis en dépression ”.

Katia rencontre John Freeman en quête de jeunes prostituées qui feraient « pleurer tout New-York ». Pour la circonstance, les trois sœurs en créent une quatrième : Kola, travesti, incarnera l’héroïne pathétique qui triomphera aux Oscars. Mais l’épisode hollywoodien ne change rien : rentré chez lui, Kola reprend le balai. Tania continue de se rêver en star, les bouteilles de vodka n’arborent toujours pas de “ capsules en or ”. Un ultime voyage de Kola en Amérique, censé inaugurer une nouvelle ère, s’achèvera sur un retour en catastrophe de l’enfant prodigue. De ses mésaventures, il ramène néanmoins, une mallette remplie d’or.

Tous les personnages sont réunis pour un semblant de happy-end : Wiera accouche. Le nouveau-né, s’appellera « Espoir ». Il sort armé d’une Kalachnikov du ventre de sa mère et tue tout le monde. Babouchka, seule, survit et délivre un ultime message : "portez les gilets pare-balles de la collection automne d’Ivan Ivanovitch Zosimov".

"Pour Les Trois Sœurs de Tchekhov, l’endroit magique, celui qui leur donne l’espoir d’une vie meilleure, c’est Moscou. Pour moi, qui ai vécu à Varsovie au temps du communisme, la terre promise, c’était l’Amérique. Dans La Quatrième Sœur, les personnages ne savent plus où aller."

Janusz Glowacki

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Dans La Quatrième Sœur, Glowacki se moque avec un humour corrosif de la perception stéréotypée de l’Est par l’Ouest et, réciproquement, de l’Ouest par l’Est. La référence aux Trois Sœurs incite le spectateur à repenser toute une mythologie littéraire du monde slave.

Le folklore russe plein de mafieux et de vodkas, de Tchekhov et de Chagall, de babouchkas et de misère, tel que le spectateur occidental peut l’imaginer, est une représentation caduque : les billets verts, Versace et Julia Roberts ont bien franchi le rideau de fer. Ici, la mafia est internationale et la vodka ne suffit plus qu’aux généraux à la retraite. En face, l’univers occidental idéalisé et ressassé par les personnages de la pièce - l’Amérique avec ses Oscars, ses comédies romantiques, ses « américains qui ne peuvent pas mentir », toute l’iconographie du succès sur papier glacé rêvé en quadrichromie par les trois sœurs version Glowacki - fait également figure de fantasme-baudruche. L’espérance messianique de ces cendrillons modernes dopées aux mélos ne résiste pas à la réalité. Ici, rien ne se passe comme on le croit : chaque moment d’euphorie se transforme en catastrophe et inversement. Le spectateur à l’instar des personnages se voit privé de toute certitude et dépossédé du confort d’une représentation univoque du monde.

Cet esprit iconoclaste suscite à la fois rire et malaise. Le rire, ambigu car suscité par une matière tragique, fait voler en éclat les lieux communs et tient seul lieu de discours. Les relations entre les personnages empreintes d’une atmosphère souvent nostalgique et tchékhovienne et le cynisme des situations qui les confrontent à une modernité mal maîtrisée créent une tension tragi-comique perceptible tout au long de la pièce. Les extrêmes doivent ici coexister : la comédie amère et la tragédie la plus grotesque ; les marques les plus clinquantes de l’Occident et les signes immédiatement repérables d’une Russie traditionnelle. Cette juxtaposition monstrueuse d’univers opposés, tout en donnant à la pièce une forte dimension métaphorique, la transporte dans un univers nouveau gagné par l’irrationnel et le loufoque.

Le décor, mobile et évolutif, épouse la trajectoire de la pièce qui s’arrache d’une situation ancrée dans la réalité, où les personnages évoluent dans un espace uniforme et fermé, pour basculer dans un monde porté par le délire. Les repères rationnels et matériels finissent par déserter en révélant leur propre vacuité. Deux musiciens accompagnent sur scène cette fuite, jouant à l’aide d’instruments traditionnels comme les dernière notes, chaleureuses et décalées, d’un univers slave mythique et englouti.

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La compagnie l’œil du guetteur s'est créée autour d'un projet à long terme de découverte et de création d'auteurs de notre temps. Notre rôle est celui du témoin : témoins comme nous le sommes de la création contemporaine, mais aussi texte témoin, qu’on passe à ceux qui veulent bien nous suivre dans cet affût - nécessaire à établir un renouveau, un véritable répertoire d'aujourd'hui.

L’œil du guetteur n’est ni un laboratoire ni un outil de théâtre expérimental, mais une compagnie dynamique, partisane d'un théâtre moderne jouable, festif et alléchant, qui se veut aussi fédérateur que nos meilleurs classiques. Cela, pour promouvoir une écriture dramatique qui nous séduit autant par son propos que par son style. Notre but est donc de proposer des créations et une programmation qui adhèrent à ces critères, pour créer dans l'enthousiasme le théâtre, non de demain, mais plus simplement d'aujourd’hui.

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Sélection d’avis du public

La quatrième soeur Le 5 mars 2004 à 11h29

Une pièce interprétée avec finesse et talent. Les comédiens sont complètement investis de leurs personnages et les tiennent avec beaucoup de justesse. La mise en scène est originale et vraiment réussie. On passe de l'humour au drame et on sort ravi d'avoir été plongé dans cet univers décalé.

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La quatrième soeur Le 5 mars 2004 à 11h29

Une pièce interprétée avec finesse et talent. Les comédiens sont complètement investis de leurs personnages et les tiennent avec beaucoup de justesse. La mise en scène est originale et vraiment réussie. On passe de l'humour au drame et on sort ravi d'avoir été plongé dans cet univers décalé.

Informations pratiques

Théâtre Silvia Monfort

106, rue Brancion 75015 Paris

Accès handicapé (sous conditions) Bar Restaurant
  • Métro : Porte de Vanves à 417 m
  • Tram : Brancion à 251 m
  • Bus : Morillons - Brancion à 104 m, Brancion - Morillons à 166 m, Fizeau à 186 m, Porte Brancion à 236 m, Vercingétorix - Paturle à 360 m
Calcul d'itinéraires avec Apple Plan et Google Maps

Plan d’accès

Théâtre Silvia Monfort
106, rue Brancion 75015 Paris
Spectacle terminé depuis le dimanche 21 mars 2004

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