Foucault 71 - La Prison, Michel Foucault

"En un mot, faire d'un portrait, un paysage et d'un paysage, une arme." Mathieu Potte-Bonneville, Vacarme n°29

• Feuilleton théâtral

Philosophe mais également historien, chroniqueur, archiviste, Michel Foucault s'est intéressé à peu près à tout, portant un regard aigu sur les mécaniques du pouvoir, des pouvoirs de notre société. 1971 marque un tournant dans son investissement politique.

Nous ne connaissions ni l’homme, ni son oeuvre. Nous avons découvert au travers de l’année 1971 un Foucault militant, une pensée en actes, une démarche qui part du fait d’actualité pour diagnostiquer les dysfonctionnements de la société. Ce mouvement de va-et-vient des petites histoires à la grande nous a donné envie de nous emparer de ce matériau sur la scène du théâtre, de raconter à notre tour ces histoires, de donner corps à ces paroles publiques et ainsi d’explorer nos propres questionnements sur la société.

Avec nos outils, ceux du théâtre, nous cherchons à montrer comment il prend la parole sur des sujets différents (le pouvoir, la police, la justice, la prison, la liberté de la presse, l’immigration…), dans des lieux différents, par des moyens différents (presse, communiqués, tracts, manifestations, réunions, interviews…), et en choisissant d’apparaître (en tant qu’auteur signataire, en tant que porte-voix médiatique de ceux dont la parole est étouffée), ou de s’effacer (derrière une signature collective).

Notre résidence de travail au Théâtre-Studio d’Alfortville en 2007 comporte trois moments de représentations et nous permet ainsi de poursuivre notre projet théâtral évolutif Foucault 71. L’épisode 0, à la la manière d’une « matrice », donne lieu à d’autres épisodes toujours en rapport avec la pensée de Michel Foucault.

• Episode 1 : La Prison, Michel Foucault

Michel Foucault ne cesse d’interroger, disséquer, mettre à jour les rapports de pouvoir. Si la prison le passionne, c’est qu’elle est le lien par excellence où « le pouvoir se montre à l’état nu », où se révèlent les rapports de pouvoir. La prison ne concentre-t-elle pas en un point ultime les mécanismes de discipline à l’œuvre dans notre société toute entière ?

"La prison est le seul endroit où le pouvoir peut se manifester à l'état nu, dans ses dimensions les plus excessives et se justifier comme pouvoir moral (…) c'est ça qui est fascinant dans les prisons, que pour une fois le pouvoir ne se cache pas, qu'il ne se masque pas, qu'il se montre cyniquement lui même" dit Foucault en 1972.

Comment fonctionne la prison ? D'où vient-t-elle ? Comment les techniques "disciplinaires" modèlent nos corps, guident notre comportement vers plus d'utilité et de docilité, à la maison, à l'école ou à l'ANPE ? Quels sont les individus, les populations coupables ?

A l'instar de Foucault nous posons des questions, sans y apporter de réponses exhaustives, ni de solutions mais en utilisant le théâtre comme une boite à outils. Nous en jouons, installant le dispositif scénique au cœur du spectacle : il se passe des choses au centre, il se passe des choses à la périphérie aussi. Le frottement d'expériences de natures diverses comme la visite d'une prison américaine, l'analyse de l'Histoire, ou la pose d'un bracelet électronique, nous offre matière à penser la prison et la discipline aujourd'hui.