Les Farces un
pan essentiel de notre tradition théâtrale
Le travail du rire
Notes de mise en scène
"La jalousie du Barbouillé" et "Le médecin volant" spectacle burlesque augmenté de deux farces anonymes du Moyen-âge "Le Cuvier" et "Le Chaudronnier". Création à Toulouse du 6 au 29 janvier 2000.
Les Farces un pan essentiel de notre tradition théâtrale
Que la farce, désormais nourrie des influences de la commedia dellarte, ait fait sesclaffer les spectateurs de province aussi bien que les spectateurs parisiens de la première moitié du XVII ème siècle, est une évidence. Les deux farces de Molière, jouées avant 1658, sont presque entièrement écrites et sont bien plus quun canevas à développer.
Le Médecin Volant présente des qualités communes avec La Jalousie du Barbouillé, qui sont aussi celles des meilleures anciennes farces: action vive, structurée et rythmée, personnages typés, souvent poussés au ridicule jusquà la caricature, dialogues familiers et vivants, le tout devant engendrer le rire, puisquun bon tour est joué à quelque naïf.
Molière excella dabord et continua dexceller dans la farce. Les personnages et les situations burlesques sont fidèles au réalisme populaire de la vieille satyre française, campant la vie quotidienne des petites gens, celle de ménages querelleurs et toujours au bord de la tromperie.
A travers la farce, le théâtre comique offre des éléments pour la peinture sociale et humaine: la préciosité, lémancipation des filles à marier et des épouses...
Ces farces se veulent et restent des pièces à rire. Les moyens sont ceux de la tradition française et/ou de la tradition comique universelle. Ces pièces reposent largement sur le jeu des acteurs, qui incarnent dabord des types conventionnels dont les vices, les passions élémentaires, les travers excessifs, le costume, les gestes et attitudes, les propos sont ridicules.
Le comique visuel garde une place importante, mais il ne faut pas oublier le jeu des mots, ni la fantaisie de la langue: jargons étrangers, logorrhées et fatras érudits des pédants, plaisanteries verbales imprégnés de gauloiserie, facéties niaises des valets grossiers et inconvenants, néologismes et décalages à la mode burlesque, tics de langages...
Ces pièces de divertissement ne sont pourtant pas dénuées de sens; à travers le grotesque, cest bien du monde et des hommes que lon rit, de leur bêtise et de leur travers, de leurs illusions, de leur obstination. Molière, de ses premières farces provinciales au Malade Imaginaire, na pas illustré dautre philosophie que celle du comique.
Très souvent, le texte de la farce ne nous donne aucune indication du jeu à produire, un texte de théâtre étant avant tout fait pour être joué. Aussi les comédiens exploreront des procédés visuels nouveaux sur des bases traditionnelles: précision du travail mécanique du corps, matérialité du jeu avec les objets, prise en compte du spectateur, délires clownesques, jeu inspiré de la commedia dellarte.
Pour monter La Jalousie du Barbouillé et Le Médecin Volant, nous avons choisi de travailler sur un imaginaire contemporain. Ici ce nest pas dans le sujet que nous allons trouver la modernité, mais dans la forme, une forme joyeusement débridée et loufoque dont on trouverait léquivalent aujourdhui dans lunivers du cartoon (Tex Avery) et celui de la grande époque du cinéma burlesque américain (Buster Keaton, Charlie Chaplin, Laurel et Hardy...).
Les passions sexpriment sans retenue; les ruptures brutales, les contrastes aberrants, le rythme soutenu, lenchaînement des gags à répétition, les retournements de clichés et surtout lunivers extraordinairement visuel du dessin animé saccordent bien ici au genre farcesque. Les qualités expressionnistes du cartoon et des courts-métrages du cinéma muet évoquent par la forme ce que la farce cherche à nous raconter: les pulsions élémentaires de ses personnages.
Les géants du cinéma burlesque des années 1910-1920 furent formés à lécole virtuose de la scène, du music-hall et de la pantomime: geste, acrobatie, expression corporelle, dans la tradition de la farce et des soties du moyen-âge, des parades de Tabarin, des turlupinades et des gaillardises comiques du début du XVIIème siècle, de la commedia dellarte et des "slapsticks" (coups de bâton) du cirque anglo-saxon.
L'espace scénique
Un espace scénique de 2 mètres sur 3 représentera laire principale de
jeu. Cette surface correspond à la dimension des tréteaux du moyen-âge et rappellera
aussi le cadre réduit des prises de vues des premiers films muets.
Le costume
Les costumes ne seront pas " moyenâgeux ", mais correspondront à une
recherche plastique en fonction des comédiens et des personnages. Noirs et blancs, ils
pourront rappeler les clowns modernes tels que nous les avons vus dans les spectacles de
Kantor, les danseurs de Joseph Nadj, ou les clowns particuliers de Beckett.
Le maquillage
Le maquillage sera lui aussi inspiré des films muets du début du siècle (principalement
noirs et blancs). Le Barbouillé de La Jalousie est avant tout un
" enfariné ", dans tous les sens du terme. Comme au moyen-âge et
comme au cinéma, les acteurs se feront une moustache avec du charbon (Groucho Marx) et se
blanchiront avec de la farine. Nous nous réservons une grande liberté dans ce domaine,
qui soulignera notre vivacité.
Le jeu de l'acteur
Le public vient voir des farces pour rire et être diverti. Lacteur des farces est
au centre de la représentation, ce qui implique dans la mise en scène un retour
inéluctable à lappareil physique, au corps de lacteur, à son volume, sa
plastique, son expressivité et sa gestuelle. La farce est un art plastique et cinétique
qui repose sur un texte qui ne doit en aucun cas prendre le pas sur le jeu.
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