Dans la solitude des champs de coton

Le Blanc-Mesnil (93)
du 25 mars au 3 avril 2004
1H20

Dans la solitude des champs de coton

Le désir se dévide sur la scène, du théâtre et du monde, et fait choc sur la question du rapport à l'autre : deux hommes, un dealer et un client, deux solitudes.

La pièce
Note d’intention
Ce n’était que cela

" D'une traite, le désir se dévide sur la scène, du théâtre et du monde, et fait choc sur la question du rapport à l'autre : deux hommes, un dealer et un client, deux solitudes.

Entre eux, seuls le manque, érigé comme une arme, et la parole, (a)dressée à l'un et à l'autre, de l'un à l'autre, dans un fleuve de mots qui s'arrachent du corps, comme des motifs, des idées, pour définir, préciser l'objet de la transaction commerciale qu'ils se livrent : le désir, toujours, encore, comme un deal. "

Philip Boulay

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Solitudes
La parole chez Koltès est hémorragique : elle se vide, elle se parle, elle est palabre. Cette parole est un geste, une parade. Elle a son corps, sa chair, sa musculature. Elle doit être incarnée. Cet "éclat" de la parole, chauffée à blanc, sonde le désir.

De quoi cela parle-t-il ? Ou, plus difficile encore, de quoi ceux-là (Le dealer, Le Client) parlent-ils ?
Les parleurs, les protagonistes de cette langue, se livrent, en allant bien au-delà d’eux-mêmes et rendent compte de la blessure de toute rencontre.

Ils ne parlent que pour trouver l’objet même de leur parole. Ils cherchent à dire leur désir.
Ce qui revient d’abord à presser, chez l’autre, l’aveu de son désir, et pour soi-même, à nier qu’on puisse en avoir un si ce n’est le désir malin de décliner l’offre ou le désir, fait apparemment d’abnégation, d’y pourvoir. Mais chercher à dire le désir, que ce soit l’humble désir de satisfaire l’autre désir ou que ce soit l’arrogance du désir qui refuse sa satisfaction, conduit invariablement à rencontrer son désir comme origine de la parole.
Chercher à dire son désir n’a en effet de sens que si la parole n’est pas, déjà, elle-même le fruit du désir.
Mais si c’est le désir qui fait parler, comment en parler ?
A vouloir la lumière qui fait voir, on ne trouve qu’éblouissement, aveuglement. Peut-être que la pièce parle de cette impasse, de l’éblouissement qui suit toujours la mise en lumière.

Une fois le désir paru au grand jour, on croirait découvrir le rien : le vide de toute offre qui oublie qu’elle n’est riche qu’à la lumière du désir de l’autre ou le vide d’une satisfaction qui n’aurait pas été précédée de l’épreuve propre au désir, laquelle consiste en son exposition, son énonciation, pour l’autre.

Le texte dit donc aussi ce combat : défi amoureux permanent, face à face de lutteurs, le manque, érigé comme arme ultime.
Et comme pour ne pas céder au fantasme de son désir (le meurtre de l’autre), l’un et l’autre entrent dans la dualité avec soi-même, sortent du duel, pour être vraiment deux : tant que le désir n’existe que par miroitement du désir de l’autre, il n’y a qu’une parole pour deux, c’est à dire plus de parole du tout. Reste en quelque sorte, parce qu’il y a rencontre, une tendresse, une tendresse humaine la tendresse restant l’unique trahison heureuse de l’amour ou sinon, ne resterait que faire tous la guerre contre tous et de perpétrer le meurtre : deux hommes ne peuvent se prendre la main qu’obliquement, latéralement, en se croisant ; chacun présentant à l’autre son profil, vulnérable, exposé.

Philip Boulay

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" A proprement parler nous vivons seulement dans cet instant-ci, qui passe ; il en revient un autre qui n’est déjà plus, où j’ai vécu, il est vrai, mais où je ne suis plus, et c’est comme si je n’avais pas été. Ainsi, ne pourrions-nous pas dire que notre vie ne dure pas, qu’elle commence toujours. "

Marivaux, Le spectateur français

" Essayez de m’atteindre, vous n’y arriverez pas ; essayez de me blesser : quand le sang coulerait, eh bien, ce serait des deux côtés et, inéluctablement, le sang nous unira, comme deux indiens, au coin du feu, qui échangent leur sang au milieu des animaux sauvages. Il n’y a pas d’amour, il n’y a pas d’amour. Non, vous ne pourrez pas m’atteindre qui ne le soit déjà, parce qu’un homme meurt d’abord, puis cherche sa mort et la rencontre finalement, par hasard, sur le trajet hasardeux d’une lumière à une autre lumière, et il dit : donc, ce n’était que cela. "

Bernard-Marie Koltès, Dans la solitude des champs de coton

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Informations pratiques

Le Forum de Blanc-Mesnil

1-5, place de la Libération 93150 Le Blanc-Mesnil

Accès handicapé (sous conditions) Bar Grand Paris Seine-Saint-Denis
Spectacle terminé depuis le samedi 3 avril 2004

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