Lampedusa Beach

du 1 au 3 février 2014

Lampedusa Beach

Des sinistres faits divers que la presse nous rapporte des plages de Lampedusa, Lina Prosa tire une pièce bouleversante sur le parcours d’une femme, Shauba. Le premier volet du triptyque du naufrage est mis en scène par Christian Benedetti.
  • Monologue poétique

Des sinistres faits divers que la presse nous rapporte des plages de Lampedusa, Lina Prosa tire une pièce bouleversante sur le parcours d’une femme, Shauba.

Migrante comme tant d’autres, naufragée comme beaucoup, avalée par la mer, elle s’accroche à quelques centaines de mètres de la plage à sa paire de lunettes de soleil – dernière bouée avant la descente dans les flots. À travers ce monologue traversé d’une fulgurance poétique, l’auteure italienne nous entraîne dans le naufrage de ceux qui rêvent d’accoster une terre d’espérance.

  • La presse

« Rien de pathétique dans ce texte. De la violence et de la poésie. La mise en scène de Christian Benedetti joue sur la distance et la lumière. (...) La salle reste continuellement éclairée et l'on reçoit le spectacle comme un rappel terrible à notre réalité. » Sylviane Bernard-Gresh, Télérama

  • Note d'intention

L'acceptable et l'inacceptable
Lampedusa Beach est un monologue pour une comédienne, et se passe sur la Méditerranée, en plein soleil, alors qu'Existence est une pièce à deux personnages qui se déroule da ns la nuit londonienne. Pourtant, au fur et à mesure du travai l, j’ai eu la sensation que quelque chose comme une mémoire ancienne avait fait que, de façon complètement souterraine, ces deux propositions se sont progressivement rejointes, révélant plus de points communs que ce qu’on pouvait penser. Une question qui nous est posée sur notre « part de responsabilité ». Sur l’acceptable et l’inacceptable. Encore une fois : quel parti prenons-nous ? Ce qui est passionnant dans la pièce de Lina Prosa, c'est que, justement, il ne s'agit pas d'une pièce, il s'agit d’un texte ; un texte qui permet de voir au fur et à mesure l’émergence d’une conscience politique. Il est capital de savoir « d’où » parle ce texte, et qui parle ? Deux choses sont étroitement liées. Dans Lampedusa Beach, le point de vue est occidental, c'est celui de l'auteure, une femme italienne, sicilienne, une femme qui parle de ces femmes africaines – de ces hommes et ces femmes qui partent d’Afrique dans des barques remplies à ras-bord par des passeurs pour se rendre à Lampedusa, porte de l’Europe et de l’Eldorado, source d’espérance et de rêve. Au cours de ces voyages, la surcharge, la promiscuité, la violence, les tentatives de viol font que les barques se renversent et coulent... D'autre part, Lampedusa Beach est le récit de Shauba, une Africaine qui est en train de se noyer, et qui finira de parler quand elle sera complètement morte au fond de la mer. Ce qu'elle raconte sur son parcours entre l’Afrique et l’Italie est le temps qu’elle met pour aller de la surface de la mer jusqu'au fond : elle part de l’Afrique, de la surface, pour aller en Italie, au fond. Et c'est exactement le contraire de ce qu'on attendait.

Un texte qui ne peut pas être spectacle
Ce qui est intéressant aussi, c'est que Lina Prosa veuille que le texte soit interprété par une actrice blanche. Ce procédé de distanciation permet peut-être d'éviter le piège d'une l'illustration pure de l’expression d’une douleur, et de mettre en avant celle d'une pensée très précise. Cela implique une grande radicalité dans le travail, dans la mesure où si l’on veut que la pensée se voie, elle ne peut pas être spectacle (cela concerne également le travail sur la pièce de Bond). L'actrice ne peut pas incarner cette histoire. Elle va donc proposer quelque chose d’extrêmement radical : elle la met à disposition. Elle pourrait mettre à disposition des milliers d’histoires, des milliers d’autres, simplement, elle choisira cette histoire-là, et ess ayera de rendre compte, justement, de la façon dont, tout à coup, pour nous autres Occidentaux, l’émergence d’une conscience politique peut faire changer les choses et comment notre regard peut se déplacer, nous faire voir les choses autrement. L'actrice n'est pas le tableau, elle est le doigt qui montre le tableau.

Des acteurs au service d'une structure de pensée
Il faut donc trouver au départ une sorte de parole « touristique », un ton qui aborde le sujet de façon périphérique – qui reste à la surface des choses – si l'on veut qu'au fur et à mesure, malgré elle, elle soit happée par son récit. Alors seulement, le fait divers devient un fait de société. Toute la question est de savoir comment amener le spectateur à élargir le prisme de ce fait divers – celui d'une pauvre femme qui se noie – pour que s'ouvrent des perspectives qui le mettent en demeure de prendre parti. En cela, Lampedusa Beach est un texte politique et subversif. C’est un espace d’intranquillité. Il est impossible d'assister à la représentation de ce texte en se disant qu'on a passé une bonne soirée. Il nous force à regarder autrement le monde extérieur. Les acteurs sont conscients de cet enjeu-là et le prennent en charge de façon absolument magnifique.

Dans Existence comme dans Lampedusa Beach, ils se mettent au service d’un propos et du devoir fondamental de l’acteur face à l’œuvre qu’il représente ; cela dépasse le fait d’être un interprète. Ce que proposent Edward Bond et Lina Prosa, ce sont certes des rôles, mais aussi des structures de pensée : leurs textes sont comme des boîtes à ou tils. Ces deux textes apprennent à voir autrement. Si bien que l'on part de l’acteur, qui est central, qu'on s’en éloigne par cercles concentriques successifs et qu'on revient à lui parce que c’est lui qui nous guide à travers le texte, tout en permettant aux spectateurs d'habiter son espace comme ils l'entendent. Mais auparavant, ils ont appris comment se déplacer. Parfois, il faut faire un pas de côté. Parfois, regarder ce qui est derrière.

Christian Benedetti, février 2013
Propos recueillis par Laurent Muhleisen, conseiller littéraire de la Comédie-Française

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Spectacle terminé depuis le lundi 3 février 2014

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