Georges Bernanos est connu pour ses romans et ses Dialogues des carmélites. Régulièrement réédités, adaptés dans des films comme Journal d’un curé de campagne et Mouchette de Robert Bresson ou Sous le soleil de Satan de Maurice Pialat, l’opéra de Francis Poulenc a porté l’histoire des carmélites de Compiègne dans le monde entier. Mais, à travers ses essais et autres Écrits de combat, Bernanos est tout autant témoin engagé dans l’Histoire que romancier. Sans doute, les deux ne font-ils qu’un chez lui et chacun de ses romans témoigne d’une vérité âprement disputée.
Grands cimetières sous la lune - Liberté, pour quoi faire ? - Scandale de la vérité - Révolte de l’esprit - France contre les robots. Autant de titres, autant de thèmes qui donnent le ton. « J’ai juré de vous émouvoir. D’amitié ou de colère, qu’importe. » Bernanos nous invite, nous exhorte, nous supplie parfois : « ce n’est pas ma chanson qui est éternelle, c’est ce que je chante ». C’est qu’il y a urgence ! «La maison brûle ». Ce monde, dans lequel nous sommes « informés de tout et condamnés ainsi à ne rien comprendre », s’organise inexorablement « contre toute espèce de vie intérieure » en accaparant l’ici et maintenant de chaque instant.
Insécurité, chômage, mondialisation, guerre économique, les mots se conjuguent ou se bousculent pour susciter la peur, au nom d’une société de consommation, dictée par le profit et engagée dans une course destructrice du monde et des hommes, aux besoins insatiables… inutiles. Angoisse et désir. Deux côtés d’une seule et même pièce. Pour quelle liberté et quel bonheur ? Comment s’y retrouver ? Ou plutôt se retrouver ?
Au milieu du brouhaha des sollicitations permanentes, sans silence point de salut. Sans vie intérieure, pas de liberté authentique. Précisément ! nous y sommes : « la liberté est sur le bord de la route mais vous passez devant elle sans tourner la tête ». Avec le spectacle La France contre les robots, c’est à une évocation fulgurante de la vision de Bernanos pour le XXIe siècle - et dont nous sommes aujourd’hui témoins - que Jean-Baptiste Sastre convie le spectateur.
Le spectacle est adapté à partir de plusieurs textes extraits des titres cités, parmi les plus révélateurs et les plus puissants de l’oeuvre, pour constituer un ensemble cohérent. À travers eux, l’auteur y trace un portrait sans concession du monde moderne tel qu’il l’entrevoit. Mais l’écrivain nous invite aussi et d’abord à des retrouvailles. « Car la liberté de notre pensée se conquiert chaque jour contre nous-mêmes, contre nos habitudes, nos préjugés... » Penser librement pour un autre regard sur le monde, une autre vision de l’avenir, une autre conception de l’Homme.
Gilles Bernanos
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