Judith

du 13 janvier au 20 février 2005

Judith

Quand Judith doute et défaille, c’est Agar qui sauve Israël. Ces deux femmes, l’une et l’autre, sont une et la même. La pièce, si elle montre leur conflit, montre leur identité, leur consanguinité. Judith, Agar, la Narratrice. Trois voix, trois femmes. Trois religions nées d’Abraham.

Trois voix, trois femmes, trois religions nées d’Abraham
Note de mise en scène
Extrait

Holopherne assiège Béthulie. Que la ville tombe, Israël n'est plus. Dieu le veut peut-être. Judith, pour sauver les siens, s'offre à Holopherne, et le tue. Sainte prostituée.

La servante de Judith n'a pas de nom dans la Bible. La nommer Agar éclaire autrement l'histoire. « Agar » : la servante de Sara, que Sara chasse au désert, et qui donne à Abraham un fils, Ismaël, demi-frère d’Isaac.

La pièce met en scène la double descendance : celle d’Isaac, père de Jacob : Israël ; celle d’Ismaël, ancêtre des Arabes et de l’Islam. Agar est une femme palestinienne.

Paradoxe : quand Judith doute et défaille, c’est Agar qui sauve Israël. Ces deux femmes, l’une et l’autre, sont une et la même. La pièce, si elle montre leur conflit, montre leur identité, leur consanguinité. Judith, Agar, la Narratrice. Trois voix, trois femmes. Trois religions nées d’Abraham.

Cela ne se passe pas seulement en un temps biblique, légendaire, mais aujourd'hui, entre Israël et Palestine.

Une pièce, quand elle vaut d'être écrite, ne s'écrit pas à partir d'idées, d'intentions. Elle vient à son auteur comme un poème, elle se forme en lui comme un rêve. Hasard, inspiration, dictée de l'inconscient : donner à la servante de Judith le nom, inouï, d'Agar - ce que je n'ai pas « voulu » - a décidé de l'essentiel, de tout. Par ce nom seul, l'histoire ancienne a pris un tout autre sens, le seul qui vaille pour moi. Comme si le nom caché de la Servante, l'innommée, « pierre que les bâtisseurs ont rejetée », devenait en effet « pierre d'angle », orientation de l'édifice, seuil de la crypte.

J’ai écrit Judith en 2001. Aujourd’hui, en 2004, l’État d’Israël s’enclôt d’un rempart de béton qu’il prétend nécessaire à sa sécurité. Je pense que le malheur, et l’injustice, que les descendants d’Israël infligent à ceux d’Ismaël fait aussi le malheur d’Israël, historique, spirituel.

Ici, loin du Jourdain, quelle parole opposer au carnage, quelle pensée ? Quelle pensée, contre la guerre et la conquête, la reconquête ? Au delà de celle du droit, la pensée de l’hospitalité.

En Abraham s’unissent la figure de l’Exilé et la figure de l’Hôte. Et c’est l’un près de l’autre qu’Ismaël et Isaac ensevelirent Abraham, leur père.

Claude-Henri Rocquet

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La mise en scène se veut résolument simple. Dans un décor de ruines, trois jeunes femmes cohabitent en attendant la fin des hostilités entre leur camp.

Une ONG perdue dans cette inextricable tragédie où le bon sentiment n’a plus sa place, une jeune israélienne venue des Kibboutz rescapés, sûre d’elle et de son choix et, la suivant comme son ombre, sa servante palestinienne. Les trois personnages s’observent se servent et se décrivent.

Holopherne doit être quelque part… il est venu écraser un peuple. Béthulie derrière son mur de défense attend, bombardée comme Bagdad ou bien Belgrade par les bonnes consciences puritaines qui croient toujours que la mort peut être donnée par délégation et ont pour constante qualité de gober les raisons données à leur besoin de « bonne conscience ».

La mort n’est juste que donnée par celui qui en assume la totale responsabilité devant lui-même. Il prend sur lui la mort. Il passe du côté de la tache indélébile sur l’œuvre pour éviter que cette tache ne grandisse. Il n’a aucun plaisir, aucune gloire… il fait son travail karmique… et il peut partir après le crime soit en pleurant, en gémissant ou en chantant.

Et tout homme tue ce qu’il aime
Le lâche le fait avec baiser
Le brave avec une épée

O. Wilde in La Ballade de la Geôle de Reading.

La mollesse et la décadence de notre société nous ont éloignés de la tragédie. Qu’elle revive, ça nous le pouvons encore !

Michel de Maulne

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Agar
Vous êtes, Judith, la dernière à prier dans Béthulie.
Et la dernière citerne est sèche.
La dernière boulangerie est vide.
De rage, on y a mis le feu.
Le boulanger et sa famille ont brûlé : quelques bouches de moins.
Plus un prêtre n'ose en chaire ou autrement parler de Dieu, de sa miséricorde.
Et qui l'écouterait ?
Quel prêtre croit encore en Dieu, en son amour ?
Je suis allée au marché, il n'y a plus rien.
Sur la place, ceux qui en ont encore la force, discutent.
Ceux qui parlent de se rendre ne sont plus arrêtés par la police.
Holopherne est-il plus affreux que cette mort lente ?
Vaut-il pas mieux mourir ainsi, massacrés, que de soif et de faim, - et peut-être survivre ? Les troupes d'Holopherne laissent en vie quelques-uns, paraît-il, ne serait-ce que pour enterrer les morts, mettre de l'ordre dans les ruines, déblayer.
Tout le monde est certain que Dieu n'est plus avec Israël, mais avec eux autres, s'il est avec quelqu'un, Dieu, et s'il se préoccupe de l'homme, sa créature, plus que des moucherons et de la vermine.
Et moi, pardon, je trouve que votre prière est belle, j'écoutais, elle est à la mode ancienne, Mais n'allez pas vouloir que je prie avec vous !
Je ne crois plus en un tel Dieu.
Je ne crois plus en ce Dieu-là.

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Spectacle terminé depuis le dimanche 20 février 2005

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