Gauche Uppercut

• Tout est lutte

Sur l'Archipel B 612, un lieu sauvage, à l'écart de la Zone rouge, six humains sont parqués: Bonsaï, Denfer, Moon, Nigger, Prince, Yiddish. Leur vie commune est régie selon trois lois. Un : à deux on se tient chaud. Deux : à trois c'est un de trop. Trois : seul on ne tient pas.

Un septième, celui par qui le drame arrive, vient bouleverser l'équilibre déjà fragile de cette planète des exclus. C'est l'étranger : Nain jaune. La main invisible qui préside à leurs sept destinées est celle de Menott, celui que l'on entend mais que jamais on ne voit. Propriétaire de la Zone rouge, il a tous les droits.

La pièce comporte douze séquences. Qui pourraient être les douze rounds d'un match de boxe. Les mots à la place des poings.

Par la Compagnie La Salamandre - Fusion.

• Note d’intention

A la fois comédie urbaine et tragédie impitoyable, œuvre évoquant Saint Exupéry aussi bien que David Lynch, à mi-chemin entre réalisme brut et conte de fée, Gauche Uppercut nécessite un engagement de mise en scène à la mesure de sa contradiction.

Enfermement et évasion. Dans l’Archipel B612, toute sortie est impossible - à moins qu’un contrat vous y autorise. Scéniquement, cela se traduit par l’omniprésence des personnages. Leur privation de liberté est le moteur de l’action. Ils mènent une existence circulaire, alternant souffrance permanente et bien-être éphémère, car si l’enfermement est avant tout physique, il n’est pas moins moral et psychologique. Ne leur reste plus que l’évasion intérieure, celle qui oppose l’imaginaire à la réalité - si bien que, peu à peu, les frontières disparaissent, l’opposition se dissout et la mort devient nouvelle vie.

Tout est lutte dans Gauche Uppercut. La parole y est une arme aussi dangereuse que le couteau qui scelle le destin de cette tribu urbaine. Le langage est échangé comme un code, tour à tour vital et mortel, physique et urbain dans son style et ses rythmes. Derrière s’y profile un véritable engagement social, le constat âpre d’une réalité on ne peut plus proche.

Le jeu est partout et l’humour un réflexe de survie. Des cartes à jouer attribuent contrats et identités. Le squat sinistre devient plateau de jeu de Nain Jaune au contact de l’étranger, puis ring lors d’un rituel de boxe fédérateur. Le monde intérieur des personnages s’échappe des comédiens pour envahir la scène, l’imaginaire magnifie la réalité. Gauche Uppercut utilise ainsi le théâtre dans ce qu’il a de plus pur et de plus puissant, l’imagination et l’évocation.