Enterrer les morts/réparer les vivants

du 20 au 29 avril 2000

Enterrer les morts/réparer les vivants

CLASSIQUE Terminé

Platonov est une matière à théâtre qui restitue un présent immédiat et l'histoire de la société, sans négliger l'aventure cosmique de la vie humaine. Dans sa joie, sa peine, son espoir et son impossibilité d'être, sa désespérance.

Présentation
Intentions de mise en scène
Platonov et la société
Platonov et le sexe
Le papillon
L'absence de père

Le Théâtre de Gennevilliers accueille trois spectacles de la Compagnie Utopia.

Présentation

Tchekhov écrit Platonov au sortir de l'adolescence, il avait dix-neuf ans. Ses personnages sont bourrés d'énergie, simplement ils ne savent pas où la mettre.

Ces quelques aristocrates russes démunis sont ensemble moins par amitié que parce qu'ils ne savent pas trop où aller. S'aiment-ils vraiment ? Non, mais ils ne peuvent pas vivre seuls, alors ils se regroupent et, pour parvenir à tenir, ils mettent un masque.

Arrive Platonov qui était destiné à un avenir brillant. Il l'a refusé et est devenu instituteur. Aux yeux du milieu dont il est issu, c'est un échec. Mais Platonov va démanteler leur rapport à la réussite, à l'argent, à la famille, au couple - l'association de deux personnes n'est-elle pas souvent identique à celle de ces gens réunis par défaut ? A la fin de la pièce tout est cassé mais quelque chose s'est passé dans la tête et dans la vie de chacun, de sorte qu'émerge une possibilité de construction.

Peut-être vont-ils arrêter de se mentir entre eux et de mentir au monde.

Avant d'imaginer possible la construction, j'ai eu besoin, avec Koltès et Barker de montrer l'inverse.

C'est peut-être parce qu'avant de réparer les vivants, on doit d'abord commencer par enterrer ses morts, y compris sa propre part de mort.

Armel Roussel

Intentions de mise en scène

Comment vivre avec sa mémoire ? Comment vivre avec son histoire ? Comment vivre sans but ? Comment vivre avec la mort ? La mort du père. La mort de l'ami. La mort de l'être aimé. La mort de l'amour. La mort de soi. Comment vivre avec son corps ? Comment vivre sans argent ? Comment vivre avec de l'argent ? Comment vivre seul ? Comment vivre à deux ? Comment vivre dans la société ? Comment vivre libre ? Comment vivre honnête ? Comment vivre malheureux ? Comment vivre malade ? Comment vivre et pourquoi ? Pourquoi vivre sans but ? Comment vivre et pourquoi vivre ?

" Et pan dans la gueule des spectateurs ! " écrit Anton Tchekhov dans son courrier.

Je ne désire pas " monter Tchekhov ", mais Platonov et un Platonov librement adapté puisque le spectacle a pour titre l'une des dernières répliques de la pièce.

Platonov est une matière à théâtre qui restitue un présent immédiat et l'histoire de la société, sans négliger l'aventure cosmique de la vie humaine. Dans sa joie, sa peine, son espoir et son impossibilité d'être, sa désespérance. Si cette " désespérance " tchekhovienne existe, elle ne s'inscrit pas dans un flou poétique mais dans une pièce très concrète et des dialogues musclés composés de phrases très courtes inscrites dans un rythme rapide. De là peut jaillir une émotion, entre rire et larme ou plutôt avec rire et larme. Sans romantisme pour autant. Tout se passe vite, comme si les personnages se précipitaient vers la fin (leur fin) dans la fièvre et le désir. Platonov est tel un tourbillon qu'on ne peut arrêter, fougueux, chaud et direct.

C'est cette impression de fête des sentiments, des sensations, des émotions que je ressens dans Zucco et dans Les Européens, que je retrouve dans Platonov et qui me touche. Dans la structure même de la pièce, on peut retrouver des points communs avec les précédentes dans la mesure où Platonov est aussi une " pièce-mosaïque " dotée d'un langage physique, une pièce éclatée comme le spasme violent d'une dernière fête, un prestissimo suicidaire, une structure fragmentée où personnages et pensées se chevauchent.

Enterrer les morts... est en cours d'adaptation dans cet esprit radical. Un mouvement ultra-rapide qui ralentit à certains moments pour révéler l'existence de l'homme, dans la complexité des émotions, derrière des masques mal ajustés.

" Soyez plus légers, plus fluides, plus simples, moins fatalistes, moins dramatiques, soyez aussi plus joyeux, comme dans la vie. Vie transposée mais vie toujours " disait Tchekhov aux acteurs. On va essayer.

Armel Roussel
Janvier 1999

Platonov et la société

Notre monde civilisé n'est donc en réalité qu'une grande mascarade. On y trouve des chevaliers, des curés, des soldats, des docteurs, des avocats, des prêtres, des philosophes et tout le reste; mais ils ne sont pas ce qu'ils représentent; ils ne sont que des masques sous lesquels, en règle générale, se cachent des spéculateurs. L'un revêt le masque du droit qu'il a emprunté à son avocat, uniquement pour pouvoir fourrer un autre dedans. Un second a choisi dans le même but; celui de la religion, de la pureté de la foi. Beaucoup déja se sont affublés, à toutes sortes de fins, du masque de la philosophie, de la philanthropie, etc... Les femmes ont moins de choix: la plupart emploient de la pureté, de la décence, des occupations domestiques et de la modestie. Il y a aussi des masques généraux, sans caractère particulier, comme qui dirait les dominos que l'on rencontre partout. Parmi eux se rangent la sévère intégrité, la politesse, la sympathie sincère et l'amabilité ricaneuse. Sous tous ces masques se cachent, comme nous venons de le dire, à peu près uniquement des industriels, des commerÿants et des spéculateurs. Les marchands constituent sous ce rapport la seule classe honnête. Seuls ils se donnent pour ce qu'ils sont, vont en conséquence sans masque et occupent pour cette raison un rang peu élevé. Il est très important d'apprendre de bonne heure, dès la jeunesse, qu'on se trouve au milieu d'une mascarade

(...) Il faut donc enseigner aux jeunes gens que dans cette mascarade, les pommes sont en cire, les fleurs en soie, les poissons en carton et que tout n'est que farce et plaisanterie; et que de ces deux hommes qu'ils voient si sérieusement aux prises ensemble, l'un ne vend que de la fausse marchandise, que l'autre paie avec des jetons à compter. Arthur Schopenhauer

Platonov et le sexe

La liste des restrictions imposées par la civilisation dans le domaine sexuel est longue : prohibition de l'auto-érotisme, des satisfactions prégénitales, des perversions, de l'inceste. Limitation des relations à un seul sexe et, à la limite, à un seul partenaire; la vie sexuelle de l'homme civilisé donne l'impression d'une fonction à l'état d'involution, comme paraissent l'être en tant qu'organes, nos dents et nos cheveux. Il faut admettre, dit Freud, que la fonction sexuelle a sensiblement diminué d'importance en tant que source de bonheur; rien d'étonnant à cela : le bonheur n'est pas inscrit dans le programme de la civilisation. D'où la grande différence entre le barbare et l'homme civilisé: le premier cherche le plaisir, le second cherche à éviter le déplaisir. Roland Jaccard

Le papillon

" La vie est éthérée et funèbre, tel le suicide d'un papillon."Friedrich Nietzsche

Dans l'hostilité inepte du monde dans lequel il vit, Platonov incarne le beau éphémère tel un papillon qui a voulu ouvrir tous les chemins. Lui se retrouve devant une multiplication de chemins qui ne mènent nulle part, et ce, parce que le choix de l'un de ces chemins isolerait au rang de chimère le possible des autres. Sa faille, c'est l'impossibilité du possible de tous les possibles; le bannissement d'une prétendue liberté de l'être au monde sur la fluctuation du temps.

L'absence de père

L'un des titres donné par certains traducteurs de Platonov est " Sans père ". Le titre original Piessa bez nazvania est quasiment intraduisible mais induit cette absence de père. En fait, Platonov, non seulement n'a plus de père, en parle avec acrimonie, mais par ailleurs, il est lui, tout nouvellement " père ". Nous ne savons pas si lui-même fut fils unique mais on pourrait le penser et supposer que le fait d'être, en tant que père chargé symboliquement d'un deuil carencé, le pousse à chercher le maternel en toute femme; donc l'impossible. Anéantir son statut de père, faire le deuil anticipé de l'achèvement de soi dans la paternité, semble être une part de son syndrome.

" Nos parents continuent à grandir en nous, leurs propriétés acquises sur le tard qui sont déjà présentes dans l'embryon, ont besoin de temps. Les propriétés de notre père en son âge d'homme, ce n'est que parvenus à l'âge d'homme que nous apprenons à les connaître." Friedrich Nietzsche

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41, avenue des Grésillons 92230 Gennevilliers
Spectacle terminé depuis le samedi 29 avril 2000

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