La Femme de Gilles

Une femme, Elisa, découvre que son mari, Gilles, la trompe avec sa jeune sœur, Victorine. Gilles, ouvrier à l'usine, Elisa, femme de Gilles, gens ordinaires... Dans ce drame ordinaire, Elisa va choisir l'extraordinaire, c'est-à-dire d'accompagner Gilles dans l'amour qu'il ressent pour Victorine.

Elle choisit d'écouter Gilles, de l'aider à comprendre ce qui lui arrive, sans jamais haïr, sans jamais vouloir punir : " J'attendrai, j'attendrai que ça te passe. " Elisa aime tellement Gilles, d'un amour puissant, immuable, qu'elle ne peut que refuser la logique évidente de la femme trahie et ses corollaires : geindre, faire une scène, dire que lui, l'homme, n'a plus qu'à s'en aller... Ce grand choix d'amour crée le désert autour d'elle. Tant pis. Elisa tâtonne vers l'élargissement inconnu de son être, dans ce choix exigeant, elle devient grande, très grande, immense d'humanité. Mais pourra-t-elle survivre à ce don inouï d'elle-même ?

Madeleine Bourdouxhe a trouvé les mots, des mots superbes, splendides, de ceux qui portent la lumière des cœurs simples. Nous, nous avons créé un café-guinguette, pour qu'un soir d'automne Elisa pousse la porte... Pour qu'elle ose y entrer, même timidement... Alors, elle y verrait des gens, des gens comme elle, comme tout le monde... Certains seront en train de manger une soupe au potiron, chaude, très chaude, comme peut l'être le réconfort, certains seront en train de boire la bière qui calme la brûlure des fours de l'usine... Alors elle s'inscrirait parmi eux, elle oserait, elle aussi, prendre place à une table...

Et elle prendrait la parole, doucement...

Chantal Morel