
Présentation
Trahison !
Histoires de langues
La presse
" Marseille, écoute-moi, je ten prie, sois attentive,Je voudrais te prendre dans un coin et te parler avec douceur.Reste donc un peu tranquille,Que nous nous regardions dans les yeux,O toi toujours en partanceEt retenue par les ancresQui tattachent à la côte et te mordillent sous la mer. "
Jules Supervielle
Les cahiers du sud. Décembre 1928
Le Chichi cest quelquun qui a des gens dans la bouche. Le Chichi, il est la ville de Marseille à lui tout seul. Parce que la ville de Marseille, cest les gens. Si tu enlèves les gens, y a plus rien, que des collines pelées et pas un arbre pour te mettre à lombre.Et Mahomet y tape !Alors le Chichi y va ouvrir la bouche, bien grand, et en troupe vont se bousculer des petites vieilles napolitaines, des cacous* grecs, des cagoles** maghrébines, Mme Arcidiacono qui naime que le théâtre, le professeur Vier qui adore sécouter parler de lhistoire de Marseille, sa femme Lucette Vier qui se prend pour une intellectuelle et qui parle la bouche en cul de poule parce que "laccent marseillais cest si vulgaire" !.Enfin une foule ! Et comme, déjà, le Chichi est un peu fada (cest-à-dire touché par les fées), ça va pas larranger surtout quil est persuadé quil doit régler quelques comptes avec : ses origines, le théâtre, Stanislas Nordey, la Fée Brigitte, doù il est parti et où il est rendu, etc...Heureusement que les voisines sont là, solides aux postes, depuis la création de la ville et quelles chantent. Depuis 2600 ans "Cane - Cane - Canebière", "Un petit cabanon" ça vous calme tous les chichis, ça relativise tout. Et comme elles disent "Tu te tournes devant, tu te tournes derrière. Ty as toujours le derrière derrière". Et ça, cest pas tragique ?
Pierre Ascaride
En fait, il sagit de faire le point sur ma trahison. Enfin de voir si je nai pas trop trahi ! Comment on vient de chez les pauvres, quand ses grands-parents ont parlé napolitain avant de parler français, quand on est persuadé que déjà dans le ventre de sa mère, on boutait les nazis hors de France et on participait à la Résistance, comment on fait aujourdhui ? Avec lEuro, Nordey qui me fatigue, les ingénieurs culturels et "mais la Mondialisation est inévitable ! ! !"
Le Chichi est-il encore vrai ? Quand on ne peut pas parler à sa mère avec la même langue quau ministre de la Culture sous peine quelle vous dise : "Quest-ce ty as, petit, ty malade ? On se débrouille comment ? Un chichi à Marseille ça désigne : un petit oiseau, un gros beignet gras ou un membre viril. Qu'est-ce que tu fais avec çà ? Que cest pas tellement culturel mais que cest toi aussi.
Alors le Chichi y va ouvrir la bouche, bien grand et en troupe vont se bousculer des petites vieilles napolitaines, des cacous* grecs, des gagoles ** maghrébines, Mme Arcidiacono qui naime que le théâtre, le professeur Vier qui adore sécouter parler de lhistoire de Marseille... A grand renfort d'histoires vraiment marseillaises, avec la complicité des soeurs Trébor, trésor vivant de l'Alcazar et de lopérette marseillaise, je vais essayer de vérifier que bien quartiste décoré je nai pas lâché le couffin.
Pierre Ascaride
* : cacous : ceux qui portent la chaîne en or avec les poils qui sortent
** cagoles : femmes des cacous
Finalement, je tape toujours sur le même clou qui me troue la langue. "De lessuie-mains des pieds", histoire dune famille juive séfarade dAlgérie, à "La perle de la Canebière" de ce Labiche anti-marseillais, en passant par "Jeux de langues" le bien nommé, "La Gonfle" de Roger Martin du Gard, écrit dans un patois français jusquau "Chichi", je me pose toujours la même question : comment puis-je oser parler Français ? A haute voix ? Devant des gens assemblés dont certains ont même payé ? Comment puis-je oser proférer cette langue devant tous ? Devant ceux qui forcément la connaissent si bien.
Puis insidieusement, je pense quà travers mon Français de Marseille, mes histoires de famille et mes histoires de langues, je vais réussir à lengrosser ce Français moyen, je vais lenrichir de voies et de voix nouvelles loin du pissat tiède du bruit de fond que fait souvent la langue courante.
Pierre Ascaride
" Modestement, à Malakoff, Pierre Ascaride pousse un cri de Marseillais amoureux de sa ville et du théâtre public. Avec lui, le théâtre subventionné retrouve ses quartiers de noblesse populaire..." Gilles Costaz. Politis.
"Une pagnolesque autobiographie théâtrale. Pierre Ascaride, "prolétaire du théâtre", se livre à un " one-man-chaud " où se succèdent hommages et règlements de comptes. Alors, tous les soirs, lhomme secoue son public comme le figuier de son enfance pour en faire tomber des rires, ces incontestables preuves damour quattendent tous les comiques..." Alain Spira. Match
"Des Cacous, des cagoles, quelques bordilles (il y en a toujours)... Que du beau monde, quoi ! Ce sont des gens, vous dira Pierre Ascaride, "A Marseille, si tu enlèves les gens, y a plus rien, que des collines et pas un arbre pour te mettre à lombre." Le Monde
3, place du 11 Novembre 92240 Malakoff
Voiture : Périphérique, sortie Porte de Vanves ou Porte Brancion puis direction Malakoff Centre-ville.