Après avoir abordé la saison dernière notamment Botho Strauss et Thomas Bernhard
nous vous proposons un second petit parcours germanique tant linfluence du théâtre
de langue allemande est grande pour la scène européenne.
La peur dévore lâme, dans une langue tendue et violente, cernant au plus près
les désirs et les peurs des personnages met en jeu, sous la lumière crue dune
société impitoyable et repliée sur elle-même, une utopie damour.
Emmi et Ali, au regard des préjugés raciaux de lAllemagne des années 70,
nont pas despace pour saimer. Ils sont obligés de se linventer,
de déblayer la route, encombrée de haine, de frustrations et de jalousies, qui mène à
la tolérance.
Mais, même sils réussissent à gagner ce combat, le prix quils doivent
payer dans leur chair et leur âme est encore bien lourd.
Les personnages de Fassbinder sont terriblement seuls face à linertie, à la
lacheté, à lindifférence dune société où les qualités profondes
dun être humain et son droit au bonheur ne se trouvent pas au centre de
lespace du monde.
Combat de titan, à la fin duquel les protagonistes se retrouvent K.O. debout... Et
pourtant nous ne sommes pas là en présence dun pessimisme radical, mais dune
lucidité infatigable qui jamais ne renonce à explorer les chemins dutopie.
La parole de Fassbinder est une parole dalarme et de résistance qui nous est
plus que jamais nécessaire au cur dune Europe où la peur de lautre
continue douvrir la porte aux ultra-nationalismes destructeurs.
Christian Taponard
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