On ne saurait parler de jonglage sans se préoccuper de trajectoires. Celle de Sean Gandini trouve son centre de gravité dans des objets en mouvement. Fils d’une Irlandaise et d’un Italien, il passe son enfance à La Havane où il connaît ses premiers émerveillements devant les cirques soviétiques en tournée dans la communiste Caraïbe. “J’ai d’abord voulu être clown, puis je suis devenu obsédé par la magie. Or la plupart des magiciens savent un peu jongler, et j’ai développé une fascination pour le jonglage. Ça m’a d’abord empêché de traîner dans la rue, et puis j’ai fini par aimer ça.”

Un mystère ne vient jamais seul, il y a toujours un truc, une explication rationnelle… Sean Gandini se passionnera plus tard pour le siteswap ou “jonglage quantique”, notation pas moins mathématique que le solfège, qui trouve ses combinaisons dans des formules chiffrées – les happy few comprendront tout de suite, par exemple, qu’en termes de lancer (6X, 4) (4,2X)* correspond à (6X, 4)(4,2X)(4,6X)(2X, 4). Les autres peuvent se saisir du tube d’aspirine ou profiter du spectacle…

En 1992, Sean Gandini rencontre à Londres la Finlandaise Kati Ylä-Hokkala, ancienne championne de gymnastique rythmique, et fonde avec elle sa compagnie. Animés par “une soif insatiable de composer des pièces jonglées et un désir ardent de collaborer, de communiquer et de provoquer”, ils s’avèrent bientôt “férocement prolifiques”, collectionnant les records, qu’il s’agisse de faire voltiger des dizaines d’anneaux, d’être invités par les plus prestigieuses institutions ou de réunir plus de vingt artistes sur scène… Soit, pour ceux qui aiment les chiffres : 30 productions en 23 ans, et plus de 5 000 ­représentations dans 50 pays.