Présentation
Un mot d'Ariane Ascaride
Un mot de l'auteur
En 1997, elle rencontre la gloire avec Marius et Jeannette de son metteur en scène et complice Robert Guédiguian. Une dizaine de films de Dernier été à la Ville est tranquille associent désormais leurs deux noms. Au printemps dernier, Ariane Ascaride déclinait toutes les facettes de ses personnalités, devenant Rmiste de Nadia et les Hippopotames, la prostituée de Nag la bombe ou la mère de Drôle de Félix. Née à Marseille dun père dorigine napolitaine qui animait une troupe de théâtre, Ariane brûle les planches dès lâge de huit ans. Adolescente, elle investit les classes du Conservatoire, après avoir signé une maîtrise de sociologie sur Les Comportements idéologiques des élèves du Conservatoire de Paris . A son instigation, Evelyne Pieiller a concocté un monologue où lactrice devient commissaire-priseur dun théâtre menacé par la faillite. Pour en sauver les murs, une actrice tente de vendre aux enchères tout ce qui lui semble avoir une valeur marchande. Mais la couronne de Lear est en fer blanc, la table dOncle Vania en contreplaqué. Cette brocante est sans prix, mais avec ces bricoles-là, on fait des émotions. Ariane Ascaride ne sy trompe pas : Ici, dit-elle, est le sanctuaire de léphémère qui marque des vies à jamais. Elle a bien évidemment confié la direction du Grand Théâtre à Robert Guédiguian, qui signe ainsi sa première mise en scène de théâtre.
La plus grande qualité dun acteur à mon sens, est de savoir dire le texte de celui ou celle qui dans la solitude a écrit, a parlé. Pour communiquer.
Nous ne sommes que des interprètes, au sens premier du mot. Notre responsabilité est de traduire, avec humilité et sincérité, les sentiments, les interrogations, le regard sur le monde et le temps de lun pour lautre qui seront venus sasseoir dans une salle devenue sombre, attentifs et curieux dentendre les mots.*
Parfois, un acteur, un auteur se rencontrent volontairement pour fabriquer une uvre commune. Ce sont des moments rares, fragiles, riches en émotions, ambitions, tensions. Evelyne Pieiller et moi-même avons fait ce pari. Javais envie de dire son écriture serrée, pure aiguë, profondément émouvante et jamais entachée de sensiblerie.
Cest un magnifique cadeau pour une comédienne de jouer un texte écrit pour elle. Ca relève des rêves dacteurs. My voici, cest pourquoi je suis heureuse et flattée de vous présenter Evelyne Pieiller et son Grand Théâtre , dans lequel je me reconnais.
Ariane Ascaride
* A nous, acteurs dêtre des passeurs de texte consciencieux et respectueux.
Sur la scène du Grand Théâtre des Deux Dômes, connu des intimes sous le surnom plus entraînant du Grand Dédé, une comédienne savance. Le public est là, pour voir une pièce du répertoire. Le public va avoir une surprise. Car la comédienne, elle, est là pour organiser une vente aux enchères. Le Grand Dédé est au bord de la faillite. La troupe a donc décidé de trouver de largent : pour continuer. Ailleurs. Et autrement. La troupe est en coulisses, abattue, alcoolisée, prozacisée. La comédienne, seul élément regrettablement rétif aux calmants et euphorisants, est chargée de séduire le public, de lui faire perdre quelque peu la tête, parce que, au vrai, ce qui va apparaître peu à peu sur la scène na absolument aucune valeur. Accessoires, outils, costumes Cest de la broutille, de la brocante. La couronne de Lear est en fer blanc, la table doncle Vania est en contreplaqué, et les outils, on trouve les mêmes, neufs, au BHV. Et pourtant, cest inestimable. Parce que cest avec ces bricoles-là quon fait des émotions. Cest avec le concret de bouts de bois, de clous, de chatterton, quon peut commencer à faire des imaginations qui se partagent. En coulisses, par-çi, par-là, ça bruisse. Sur scène, la comédienne est face au public, face aux souvenirs quelle doit faire acheter, cher. Lhumeur est compliquée. Elle est seule, mais royalement. En piste, et en scène. Ces souvenirs, ses souvenirs, elle va en faire du théâtre : des objets, des incidents, du projecteur qui ne sallume pas, des blagues de copains, de ce quelle a dans la tête. Du théâtre partout. Pour la dernière fois sur la scène du Grand Théâtre des Deux Dômes. Du théâtre partout. Musique qui vient et scènes qui reviennent. Un petit tour. Partout, jusque dans la poussière qui danse sous la boule tango. La poussière qui vient du bois des planches et de lair qui bouge. Entre le plateau et la salle. Elle est prête à vendre la poussière. Bien plus cher que la boule tango.
Evelyne Pieiller
1, Place du Trocadéro 75016 Paris