Opéra d'après le conte Le Rossignol et l'Empereur de Chine d'Andersen créé le 26 mai 1914 à l'Opéra de Paris au cours de la saison organisée par Diaghilev.
Féerie lyrique mise en image par le magicien Robert Lepage à la tête d’Ex Machina, sa compagnie québécoise, ce spectacle enchanta le Festival d’Aix-en-Provence sous la houlette de l’Opéra de Lyon, en 2010. Quel bonheur, une décennie plus tard, de retrouver à l’affiche ce pur enchantement des costumes et de la lumière, où scintillent musiciens, chanteurs, comédiens, marionnettistes et figurines (75, au total) évoluant au fil d’un théâtre fluvial (7000 litres d’eau dans la fosse d’orchestre !) baigné d’ombres chinoises.
Un monde féérique à la hauteur des enjeux du livret du Rossignol, conte lyrique en trois actes tiré d’un conte d’Andersen et mis en musique par Stravinsky, entre 1908 et 1914, avec la collaboration de son ami Stepan Mitoussov. Enivré par ses premières pages orchestrales (Scherzo symphonique et Feux d’artifice), le jeune Stravinsky âgé de 24 ans compose le premier acte de son opéra en Russie, dans une esthétique encore proche de celles de son maître Rimski-Korsakov, combinée au réalisme de dialogues parlés dans l’esprit du Mariage, l’opéra inachevé de Moussorgski – le tout, plongé dans des sonorités savantes et une harmonie vaporeuse.
Appelé à Paris par Diaghilev qui lui commande L’Oiseau de feu, un premier ballet, le compositeur abandonne son Rossignol… Il n’y reviendra que cinq ans plus tard, cette fois auréolé de la gloire de ses trois ballets parisiens : L’Oiseau de feu, Petrouchka et Le Sacre du printemps. La rupture, voulue, entre le calme et bucolique du 1er acte russe et les deux suivants composés en Suisse n’ajoute que plus de saveur à l’ouvrage investi d’un rythme nouveau et d’une polyphonie richement élaborée. Un charivari strident et un dévergondage ironique de timbres brûlants en rupture avec l’opéra traditionnel, au moment même où la Première Guerre mondiale confine Stravinsky en Suisse. La création à l’Opéra de Paris, sous la direction de Pierre Monteux dans une chorégraphie de Boris Romanov et des décors et costumes d’Alexandre Benois, le 26 mai 1914, fut un échec critique et public – seul Ravel, dans Comoedia illustré (5 juin 1914) défendit l’ouvrage, vantant la liberté contrapuntique absolue, cette indépendance audacieuse des thèmes, des rythmes, des harmonies, dont la combinaison, grâce à l’une des plus rares sensibilités musicales, nous offre un ensemble si séduisant.
Avec l'orchestre et et les chœurs de l’Opéra National de Lyon.
1, place du Châtelet 75001 Paris