Bash

Un spectacle « coup de poing » dans la lignée de Mamet, de O’Neill et du cinéma de Gus Van Sant ou de Tarantino
Des personnages prennent le public à témoin pour un meurtre que chacun a commis et qui reste impuni. Ils parlent sans culpabilité, sans morale, mais faisant preuve d'une singulière humanité. Un spectacle «  coup de poing » dans la lignée de Mamet, de O’Neill et du cinéma de Gus Van Sant ou de Tarantino

En guise d'avant propos
Un théâtre de la cruauté ordinaire
A Jean-Marie Serreau

Bash, scènes d’apocalypse, qui vient d’être une révélation à New York, Londres et en Allemagne (mise en scène de Peter Zadek) est la première pièce d’un nouvel auteur américain de trente ans, Neil Labute.

Quatre personnages prennent le public à témoin pour un meurtre que chacun a commis et qui reste impuni. Ils essaient de découvrir à travers ce qu’ils ont vécu, ce qui a pu les pousser à cette violence.

Ils s’adressent à nous sans culpabilité, sans morale, de manière simple et lumineuse, faisant preuve au final d’une humanité dans laquelle nous pouvons tous nous reconnaître. Pour en finir avec l’indifférence.

Pierre Laville

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J’aime que Neil LaBute ne prétende pas révolutionner l’art dramatique, et que Bash, sa première pièce, écrite alors qu’il était encore étudiant, soit une œuvre au langage limpide et non abstrait - ce qui ne veut pas dire, nous le savons bien, que cette sorte d’écriture soit privée de style ni de mystère. La recherche d’une stricte simplicité est une exigence et un art.

Bash réunit trois actes, trois événements distincts et séparés, mais reliés par un fil rouge précis. La fête (bash), dont il est question, est empreinte d’un crime, d’une catastrophe radicale, qui marquent la vie de chaque personnage, sinon la nôtre, collectivement. La pièce est sous-titrée : latterday plays, qui, littéralement, en appelle à l’apocalypse, à l’effondrement de notre monde, autant qu’à notre vécu, à notre quotidien. Il joue sur l’idée de fête et de ses derniers jours.

Ce qu’écrit LaBute émeut, secoue. Il entend relier des mythes anciens à des accidents de la vie d’aujourd’hui (Médée, Iphigénie) ou à la survivance d’une ancienne religion (Une bande de Saints). Il fait un saut dans le temps dont notre civilisation a eu besoin pour se construire, et se détruire.

Bash relève de la Tragédie (et non du Drame). Les personnages sont soumis à des forces qui les dépassent. Tout y est cru, et cru, avec humilité et exactitude, violent et comme dans un refus naturel de la morale ou des idées reçues. La pièce est un coup porté à notre bienséance et à notre confort. (bash peut se traduire par : Fête, soirée, et aussi par : coup, gnon). Elle ne manque pas d’éclaircies, d’humour, de goût pour le gaga, pour dépasser un certain palier d’horreur.

Les acteurs s’adressent en direct au public, qui est pris comme leur vrai partenaire et devient leur miroir. Bash offre de fortes partitions aux comédiens et fait appel à une conscience aiguë de la vie et de la mort, qui les libère et les incite à se lâcher comme en apnée. Aveux et confessions ne sont nullement des monologues, mais des sortes d’entrées en résonance, ou en écho, avec le public interpellé. Pas de psychologie, mais une approche nette, opérée hors culpabilité et hors sanction.

La pièce de Neil LaBute n’est pas sans parenté avec un théâtre plus acéré et plus opaque aussi, d’Edward Bond (qu’admire particulièrement LaBute) à Sarah Kane. Elle participe plus directement au courant dominant du théâtre américain, qui va de l’ancêtre Edouard Albee avec Zoo Story à David Mamet et son Oleanna, ou au millénariste Kuchner.

Tout américaine que soit la société visée, fut-ce avec son parfum mormon, Bash nous est familier par ce que la pièce a d’humain et d’inhumain, à un moment de l’histoire du monde où les événements nous rendent de plus en plus complices et ressemblants ici et là - qu’il s’agisse d’un crime collectif ou d’un infanticide, systématiquement répandus sur la scène publique.

Bash est une pièce fraternelle et cruelle, positive dans sa conscience même d’une charge qui nous est commune : l’omniprésence de la violence ordinaire qui s’impose à nous dans notre vie de tous les jours.

LaBute cherche à rompre avec le système de l’indifférence, du sang, du divertissement et de l’oubli.

Pierre Laville

J’ai tout appris de Jean-Marie Serreau. Tout, et d’abord le goût de l’écriture des textes neufs, la passion de créer une œuvre du moment, neuve, en état de risque, en prise sur son époque.

Jean-Marie Serreau, toute sa vie, a choisi, hors tout plan de carrière et sans subvention, de mettre en scène et de révéler des pièces contemporaines. Avec une force peu commune, il a pris lucidement en charge la responsabilité de créer des œuvres nouvelles et de s’attacher à révéler ce qu’elles avaient de plus exactement contemporain. Créer une pièce inédite, déceler sa force immédiate, ne pas la déformer à son profit ou à celui d’une esthétique, aller au bout d’un rapport de combativité, cela suppose une discipline et un engagement plus entiers, plus exigeants, plus singuliers que dans l’approche d’un texte classique ou déjà révélé.

Jean-Marie Serreau avait un fantastique sens de l’espace, du mouvement et du rythme. Il était un architecte et un poète, un géomètre et un danseur. Il travaillait, comme son maître Charles Dullin, en artisan et on apprenait auprès de lui tout naturellement le plaisir du théâtre, la volupté, la modestie, le respect de chaque geste sur un plateau. Et la passion pour le travail avec les acteurs. Et à estimer que la vocation première du théâtre est de considérer le public pour le plus intelligent qu’il soit et établir avec lui un lien, une résonance.

Pierre Laville

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Théâtre des Mathurins
36, rue des Mathurins 75008 Paris
Spectacle terminé depuis le dimanche 22 juin 2014

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