Il y a d’abord du noir, qui dure, et duquel émerge une bande-son mêlant musique électronique, respirations, bruits de course et de pas. Avant d’être visuelle, la présence du corps surgit des sons qu’il produit dans l’espace. Puis un visage apparaît, souffrant, yeux fermés, comme un bébé qui viendrait au monde. La tête se met lentement en mouvement, éprouvant sa réalité. Articulation par articulation, membre par membre, ce corps debout, planté au milieu de la scène semble se (re)découvrir lui-même.
L’enjeu de Second Body est ainsi d’abord de « re-connaître » un corps, de vérifier son existence, de le tester, comme s’il s’agissait d’une lente renaissance qu’il fallait effectuer pas à pas, pour la danseuse comme pour le spectateur qui la regarde reprendre possession d’elle-même. Puis soudain, le corps disparaît, se fond dans le décor à moins que ce ne soit le décor qui fonde sur lui, tâches de lumières mouvantes dans lesquelles on le discerne encore, par fragments. Enfin, celui-ci n’est plus qu’une surface de projection, qui procède par duplication, écho, redoublements de couleurs et de lumières. Les limites corporelles s’effacent et le corps perd de sa matérialité pour devenir un « deuxième corps », qui donne son titre à la pièce.
De l’un à l’autre, Anarchy Dance Theatre interroge ce qu’est un corps, comment on le perçoit : un corps comme matérialité première mais aussi comme matériau malléable susceptible de métamorphoses, qui porte toujours en lui la mémoire de ce qu’il a été.
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